En 2009, Corneliu Porumboiu a vu un reportage sur le langage sifflé le Silbo, qui se pratique sur l'île de La Gomera située près du Maroc. A l'époque, le metteur en scène venait de terminer son film Policier, adjectif, centré sur le langage et la façon dont il est utilisé à des fins politiques. Le langage sifflé lui a alors semblé être une possibilité de poursuivre ce thème, mais différemment.
Avec Les Siffleurs, Corneliu Porumboiu a voulu raconter l’histoire d’un flic désillusionné, Cristi, qui débarque à La Gomera pour retrouver une femme, fatale, et pour apprendre un langage sifflé. Il précise : "Mais les choses se compliquent et rien ne se passe comme prévu. Le policier va s’embarquer dans un voyage initiatique, une sorte d’aventure aux allers-retours multiples et aux virages surprenants."
Le Silbo qui se parle sur l’île de la Gomera permet de coder le langage parlé, un peu comme le cinéma code la réalité. Corneliu Porumboiu s'est donc mis à jouer avec les codes de genres très différents - du film policier ou film noir, au western en passant par la comédie. Le réalisateur voulait raconter une histoire avec des personnages qui mentent, qui jouent un double jeu tout en s'inspirant de beaucoup de films noirs classiques.
Corneliu Porumboiu a cherché des personnages puissants, capables de marquer, en très peu de temps une scène du film, rien qu’avec leur présence physique. Le cinéaste avait plusieurs références : Gilda (Catrinel Marlon) est la femme fatale, et Magda (Rodica Lazar), la procureure, supérieure de Cristi, est une femme forte et froide dans le style de Marlène Dietrich. Il ajoute : "J’ai choisi Agusti Villaronga, qui incarne le chef de la mafia, pour lui donner un côté aristocrate, justement pour échapper au cliché du mafieux. J’avais envie d’un casting décalé et surprenant et j’ai engagé des acteurs assez atypiques pour leurs rôles."
Les Siffleurs a été présenté en Compétition au Festival de Cannes 2019, et marque la première participation du réalisateur Corneliu Porumboiu à cette sélection.
Corneliu Porumboiu explique au sujet du personnage principal : "Cristi ne croit plus à sa vocation, il commence à travailler avec la mafia et à toucher de l’argent du trafic de la drogue. C’est quelqu’un qui ne croit plus en rien, ni dans sa vie professionnelle, ni dans sa vie privée, et il cherche à s’échapper de tout cela quand il arrive sur l’île de La Gomera. En tant que policier, il fait partie du système et pense maîtriser sa vie. Mais les évènements vont vite le dépasser..."
Corneliu Porumboiu et le directeur de la photographie Tudor Mircea ont cherché à donner forme à un langage visuel faisant référence à Edward Hopper, Alfred Hitchcock, et aux films noirs classiques. Il confie : "Avec Arantxa, la directrice artistique, qui est aussi mon épouse, nous avons décidé de teinter les différents chapitres du film aux couleurs de l’arc en ciel, chacun des chapitres portant le nom d’un personnage qui joue une place importante dans le trajet de Cristi. Nous avons tenté de mettre en place une esthétique un peu distanciée, abstraite, pour mettre en valeur l’idée d’artifice et de rôle joué par chacun d’eux."