Dans la famille Garrel, voici le fils : un des acteurs les plus doués de sa génération et, depuis la sortie de son premier film (« Les Deux Amis ») en 2015, un réalisateur de talent marchant sur les traces de son père Philippe. Tout comme ce dernier, Louis fait montre d’une disposition pour un cinéma intimiste faisant la part belle aux atermoiements des cœurs.
Avec son coscénariste Jean-Claude Carrière, c’est une histoire d’amour triangulaire qu’il a conçue et réalisée, se mettant à la fois derrière et devant la caméra. Dans le film, Louis Garrel se prénomme Abel et, d’entrée, il se présente dans une position de faiblesse face à Marianne (Laetitia Casta), celle avec qui il partage son existence. Cette dernière, en effet, lui annonce tout de go qu’elle est enceinte, que le père de l’enfant est Paul, son meilleur ami, et que, par conséquent, elle le quitte pour vivre avec celui-ci.
L’histoire, cependant, ne s’arrête pas là. Neuf ans plus tard, c’est au cimetière qu’Abel retrouve Marianne. Quant à celui qu’on enterre, c’est Paul qui vient subitement de décéder. Près de Marianne se trouve un garçon, son enfant, prénommé Joseph (Joseph Engel), mais aussi une certaine Ève (Lily-Rose Depp), la sœur de Paul qui, depuis longue date, est follement amoureuse d’Abel.
Tout est en place maintenant pour le chassé-croisé des cœurs. Cela pourrait sembler banal s’il n’y avait un metteur en scène inventif pour rendre tout cela attrayant. Détournant habilement des idées de mise en scène qu’avait sublimées François Truffaut, Louis Garrel se plaît à intégrer des séquences en voix off, donnant, tour à tour, la parole à chacun des trois protagonistes principaux. C’est de cette jolie manière que le cinéaste donne toute leur place aux spectateurs qui deviennent, en quelque sorte, les confidents des personnages.
Mais, d’une certaine manière, ce que le film propose de plus original et de plus captivant, c’est le rôle, pas banal du tout, qu’il réserve au jeune Joseph. Curieux de tout, fouineur, on pourrait presque dire espion, celui-ci s’immisce, autant qu’il le peut dans les histoires des grands. Il fait même davantage que cela puisqu’il se plaît à moucharder, laissant supposer, par exemple, que si son père, Paul, est mort, c’est parce qu’il a été empoisonné par sa mère. Le film, du coup, prend souvent des allures d’histoire à énigmes conduite par un jeune détective parfaitement joué par Joseph Engel. Il faut d’ailleurs complimenter, pour finir, la direction d’acteurs, toujours parfaite. C’est la première fois que Lily-Rose Depp parvient non seulement à me convaincre mais à me charmer par son jeu !