Guillaume Canet garde un souvenir très douloureux des Petits mouchoirs. Ce projet est né suite à un grave problème de santé qu'il a connu en 2009 et qui a failli lui coûter la vie : un staphylocoque doré doublé d’une septicémie. Lorsqu'il était à l'hôpital, aucun de ses amis n'est venu le voir et c'est ce constat amer sur l'amitié qui lui a donné envie d'écrire cette histoire. Le tournage fut ensuite très difficile, notamment pour des raisons liées à la canalisation du groupe d'acteurs, et le jour de la sortie du film, l'un de ses amis s'est tué en moto. Il se rappelle :
"Dès cet instant, tout s’est arrêté. Le succès rencontré par le film m’est évidemment apparu bien anecdotique par rapport à cette tragédie. J’ai donc mis Les Petits mouchoirs de côté pendant des années. Jusqu’à ce qu’un soir, des années plus tard, je retombe par hasard sur le film à la télé. Et je me suis surpris à me marrer, à être ému, à prendre plaisir à retrouver ces personnages. Mais sans avoir alors l’idée de les retrouver dans un autre film."
C'est plus précisément pendant la promotion de Rock'n Roll que le projet s'est concrétisé. Guillaume Canet explique : "À un moment où je fais le constat que j’arrive à un âge où mon entourage comme moi-même ne réagissons plus de la même manière que dix ans auparavant. Au fil de ces années, on a parfois perdu un parent, on s’est remariés ou on a eu des enfants. Nos priorités ne sont plus les mêmes. On a moins le temps pour faire les choses et du coup, on se parle plus franchement. J’ai donc eu envie de plonger les personnages des Petits mouchoirs dans ces situations où on solde les comptes. « C’est pas parce qu’on est pote depuis vingt ans qu’on est obligé de le rester ». Et de voir si, une fois leurs quatre vérités dites, ils finiront ensemble ou non."
Si le casting du premier volet est de retour, Nous finirons ensemble compte deux nouveaux venus : José Garcia et Clémentine Baert (récemment à l'affiche de L'Amour est une fête avec Guillaume Canet et Gilles Lellouche). Tous les deux se sont croisés sur le plateau des Seigneurs en 2012.
Avec plus de 5.4 millions d'entrées, Les Petits mouchoirs a été le deuxième plus gros succès en France de l'année 2010, derrière Harry Potter et les Reliques de la Mort - 1re partie et ses 6 millions.
Guillaume Canet a voulu que Nous finirons ensemble soit plus cynique que Les Petits mouchoirs, principalement parce ce que les personnages se disent davantage les choses en face au lieu de les taire. Le cinéaste précise : "Et l’état des lieux est rude en effet. Car beaucoup d’entre eux ont perdu leurs illusions. Je continue donc à montrer des personnages imparfaits, enfermés dans leurs problèmes mais en insistant aussi sur l’idée qu’ensemble, malgré leurs dissensions, ils finiront par être plus forts et ne plus subir les choses. Qu’il y a une lumière au bout du chemin de cette noirceur que vous évoquez. Je voulais simplement éviter de verser dans le pathos comme j’avais pu le faire dans Les Petits mouchoirs. Parce que j’ai changé. Je voulais une émotion présente mais tenue et tendue, jamais pleurnicharde.
Dans un premier temps, Guillaume Canet a d’abord pensé à Yvan Attal pour jouer le nouveau venu Alain. Le réalisateur a en effet apprécié collaborer avec le comédien sur Rock'n Roll, son précédent film. Mais cela n’a pas pu se faire pour des questions de planning. Canet se souvient : "Or il se trouve que la veille où Yvan me l’annonce, j’avais passé un dîner à côté de José où je m’étais vraiment marré et fait la réflexion que par son bagout, son humour et son énergie, il serait génial dans ce rôle. Le hasard a donc bien fait les choses."
Assez tôt, dans l’écriture, Guillaume Canet a décidé que Max allait être séparé de Véronique. Dans Les Petits mouchoirs, ils formaient le couple parfait et établi. Il raconte : "Les « parents » de tous les autres personnages : lui qui les accueillait dans leur maison et elle qui s’occupait de tout. Leur séparation allait donc logiquement provoquer des bouleversements dans cette bande. Et j’ai alors imaginé ce personnage d’Alain, concurrent direct de Max dans le domaine de la restauration. Un véritable requin qui va vouloir tout lui piquer : son vin, sa maison, son ex-femme… À mes yeux, il représente le Max d’il y a neuf ans. Combatif, très confiant. Un bulldozer. Un petit mec nerveux, son alter ego en un peu plus jeune.."
Pour jouer la nouvelle compagne de François Cluzet, Guillaume Canet ne voulait pas d’une comédienne connue du grand public, de telle sorte à renforcer le décalage avec le reste du groupe dont les visages sont tous identifiables. Il se rappelle : "J’avais une idée très précise de ce à quoi elle devait ressembler. Mais j’ai fait quelque chose d’assez peu orthodoxe (rires). J’ai tapé « actrices françaises » dans Google et regardé des centaines de photos pour trouver celle qui allait correspondre à l’image du personnage que j’avais en tête. J’ai fait une première sélection, regardé différents films dans lesquels les comédiennes en question avaient joué. Clémentine faisait partie de ces choix. Quand soudain j’ai réalisé que je l’avais trouvée absolument formidable dans le film de Cédric. Ce fut dès lors une évidence de lui proposer ce rôle."
Lors du tournage des Petits mouchoirs, Guillaume Canet avait dit à son casting de "se lâcher" pour gagner en naturel. Mais le réalisateur n'était pas parvenu à canaliser et gérer le groupe, ce dont il a beaucoup souffert. Sa compagne Marion Cotillard se remémore : "On ne s’en était pas rendu compte sur le moment. Mais on l’a appris au moment de la promotion quand il a formulé les choses. Sachant cela, on s’est donc comporté différemment sur Nous finirons ensemble. On a été plus disponibles et plus présents pour lui. Mais en gardant de la vie dans nos échanges et sans renier ce que nous sommes profondément : une bande de potes qui aime délirer ensemble."
La bande-annonce de Nous finirons ensemble comprend deux chansons marquantes. La première est "Toop Toop" du duo de musique électronique Cassius. La seconde est une reprise du célèbre morceau des Bee Gees "To Love Somebody" par Nina Simone.
Avec Nous finirons ensemble, José Garcia retrouve François Cluzet et Valérie Bonneton avec qui il avait tourné dans La Mort du Chinois.
Guillaume Canet a voulu tourner Nous finirons ensemble hors-saison pour changer d’ambiance et de lumière par rapport aux Petits mouchoirs qui se déroulait au coeur des vacances d’été. Voilà pourquoi il a choisi de débuter le récit un jour où il venait de pleuvoir, avec la terrasse de la maison jonchée de branches cassées… Le metteur en scène explique :
"Dans cette même logique, tout au long du film, on a forcé régulièrement le trait sur la densité et la noirceur sans pour autant faire disparaître totalement la lumière. Cela donne la couleur du climat dans lequel les personnages vont évoluer. Et comme nous connaissons très bien la région du Cap-Ferret avec Christophe, on avait des références communes de lumière selon les heures du jour. Ensuite, au niveau des cadres à proprement parler, j’ai comme à mon habitude privilégié les longues focales. Car j’aime la profondeur dans le champ, la possibilité d’avoir des personnages, flous, en amorce, pour créer cette proximité et cette complicité entre les acteurs et avec les spectateurs."
Si le titre de la suite des Petits mouchoirs, Nous finirons ensemble, met l'accent sur deux thématiques au centre du film, l'amitié et le temps qui passe, il constitue également un clin d'oeil à deux classiques du cinéma français : Nous ne vieillirons pas ensemble de Maurice Pialat et Nous irons tous au paradis d'Yves Robert, sortis tous les deux dans les années 1970.
Basé sur un roman relativement autobiographique écrit Maurice Pialat, Nous ne vieillirons pas ensemble est son second long métrage après L'Enfance nue. Le film raconte l'histoire d'un éternel enfant et cinéaste raté (Jean Yanne) qui a une relation tumultueuse avec sa maîtresse (Marlène Jobert). Présenté en compétition au Festival de Cannes de 1972, Nous ne vieillirons pas ensemble permet à son acteur principal de remporter le Prix d'interprétation masculine. Ayant réalisé plus de 1,7 millions d'entrées sur le sol français, le long métrage a par la même occasion révélé Maurice Pialat à un public plus large.
Référence incontournable en matière de film de potes (dont Guillaume Canet s'est inspiré pour Nous finirons ensemble), Nous irons tous au paradis est la suite d'Un éléphant ça trompe énormément sorti un an avant, en 1976. Les deux comédies dramatiques réalisées par Yves Robert suivent quatre amis quarantenaires – notamment leur rapport aux femmes et à l'amitié – incarnés par Jean Rochefort, Claude Brasseur, Victor Lanoux et Guy Bedos. En lice pour trois César en 1978 (meilleur film, meilleurs décors et meilleur scénario), le long métrage n'en a remporté aucun, mais a réalisé plus de deux millions d'entrées en France.