Luis Ortega s'est inspiré de l'histoire de Carlos Robledo Puch, plus connu sous le nom de « L'ange noir », qui assassina entre 1971 et 1972 onze personnes d’une balle dans le dos ou pendant leur sommeil. Pour lui, la mort était une notion abstraite. A cette époque en Argentine les théories de Cesare Lombroso soutenaient que la laideur justifiait les actes criminels le plus souvent commis par des meurtriers aux yeux globuleux, à la peau basanée, au nez crochu, au front très large ou aux dents mal alignées. Or, Robledo était aux antipodes de ce type de profil.
Ses origines sociales, son solide environnement familial, et ses bonnes manières constituaient une formidable couverture pour commettre ses crimes. Mais le plus déconcertant était sa beauté physique. C’est sur cette base que Sebastian Ortega a construit un Carlitos considérablement éloigné du Robledo monstrueux. On découvre un personnage pour qui ses propres actes sont un mystère. La presse le surnommait « Le chacal » ou « Le monstre au visage enfantin ». Son visage était angélique avec des boucles blondes et une beauté magnétique. Un policier avait même dit qu'il était la version masculine de Marilyn Monroe.
Né en 1952, Carlos Robledo Puch a été condamné en 1980 à la prison à perpétuité pour (entre autres crimes) 11 meurtres.
Luis Ortega a toujours été attiré par les histoires criminelles. Beaucoup de personnages de films ont nourri cette fascination. Au départ esthétique, cette attirance a ensuite été dominée par un besoin d'adrénaline. Le metteur en scène confie : "Adolescent, la réalité écrasante de la violence était trop délirante pour moi. Du coup, quand j'ai décidé de raconter l'histoire d'un jeune voleur devenu assassin, je me suis dit qu'il ne fallait pas faire un film féroce, mais empreint de beauté – comme un cadeau au spectateur."
Le tueur en série Carlitos se comporte comme une star. Il a le sentiment d'être filmé et cherche à capter l'attention de Dieu et à l'impressionner. Il est convaincu que tout est mis en scène et que même la mort n'est pas réelle. "Il marche comme le ferait une légende vivante, vole comme un danseur, et méprise la nature parce qu'il est convaincu que le destin est une pure construction", explique Luis Ortega, en poursuivant : "Il est très séduisant de s'attacher à un personnage qui estime être un espion travaillant pour Dieu. Et fascinant d'observer ce qu'il fait, parce qu'il le fait au nom d’un pouvoir suprême. Du coup, ceux qu'il cherche à impressionner sont dans une autre sphère ! On peut dire de lui qu'il attend Godot, un revolver à la main. Il vit tout intensément, jusqu'à la dernière limite, car au bout du compte, tout ça n’est peut-être qu’un film".