Les Affamés est le premier long métrage de Léa Frédeval, qui adapte à l'écran son propre roman édité en 2014 chez Bayard, Les Affamés - Chroniques d'une jeunesse qui ne lâche rien.
Alors qu'elle était stagiaire, la réalisatrice Léa Frédeval tenait un blog sur lequel elle racontait son quotidien et celui des gens de son âge. Un éditeur est tombé par hasard dessus et lui a proposé d'en faire un livre. Quelques années plus tard, Lucile Ric, une de ses anciennes amies de fac devenue productrice, veut porter à l'écran son roman. Réticente à l'idée de réaliser un film alors qu'elle ne connaissait pas le milieu du cinéma, Léa Frédeval se laisse pourtant convaincre et décide de se lancer : "Je me sentais inutile à la fac, utilisée en tant que stagiaire, et une moins que rien dans mes jobs alimentaires. Bref, à aucun moment de ma journée, je ne me sentais valorisée. Je n’avais aucune perspective. Alors j’ai foncé. A partir de là, la grande affaire a été de rameuter toutes les parties de mon être pour être la plus pertinente, faire les choses au mieux, construire une histoire dans laquelle le public puisse se reconnaître..."
Afin de créer une véritable complicité entre ses acteurs, Léa Frédeval a organisé en amont du tournage une colocation d'une semaine en Sarthe : "on a vécu tous ensemble, mangé ensemble, regardé la télé ensemble, répété toute la journée, et le soir, on faisait la fête ensemble. C’est là qu’on a créé cette famille qu’on voit à l’écran."
La trilogie de Cédric Klapisch, composée de L’Auberge espagnole, Les Poupées russes et Casse-tête chinois, mettait déjà en scène l’absence d’orientation ou de repères propre à la jeunesse et à l'entrée dans le monde adulte. Léa Frédeval admet adorer ces films. Cependant, Les Affamés prend en compte l'arrivée d'internet et les bouleversements qui en ont découlé : "Avec les nouvelles technologies, on peut être tout à la fois. Les temporalités se superposent : c’est cette schizophrénie ordinaire que je voulais montrer, dans le film. Avec ce questionnement complètement paradoxal : on endosse tellement de rôles dans la journée… Quand est-ce qu’on est nous-mêmes ? Le temps s’est ultra condensé, on n’a même plus le temps de se chercher. Cette nonchalance propre à la jeunesse, ces années qu’on pouvait prendre sur un chemin qui mènerait à soi, ça n’existe plus."
Bien que Les Affamés évoque la jeunesse française, Léa Frédeval se défend d'être un quelconque porte-parole : "Je ne parle que de ce que je connais. « La » jeunesse n’existe pas. Il y a beaucoup de jeunesses très différentes. J’ai eu certaines chances : je suis née blanche, j’ai un prénom qui sonne français, j’ai été éduquée par des parents lettrés… J’avais donc plus de cartes pour trouver du travail et m’insérer dans la société. Je ne suis pas de cette jeunesse qu’on stigmatise, celle des quartiers difficiles."