Avec Home, Fien Troch s'est inspirée d'un documentaire qu'elle avait vu à la télévision et qui traitait d'une relation incestueuse mère-fils. La réalisatrice explique : "Cette histoire m’intéressait aussi car elle déplaçait le problème de l’inceste sur le terrain de la relation mère-fils, là où habituellement on parle plus volontiers des pères et de leurs filles. En précisant que mon film est basé sur des faits réels, je voulais montrer que la réalité dépasse parfois la fiction."
Fien Troch avait comme idée de départ celle d’un jeune garçon qui trouve refuge chez une femme habitant seule dans une grande maison isolée. De cette manière, la cinéaste cherchait à observer l’évolution de leur relation. Elle développe : "Dans mes films précédents, je m’attachais à la relation parents-enfants mais maintenant que je suis mère, je voulais prendre de la distance par rapport à l’enfance, en m’intéressant plutôt à des adolescents. Je souhaitais opérer, de cette manière, une rupture stylistique par rapport à mes autres films. J’ai pensé que filmer la jeunesse serait un bon moyen pour injecter un surcroît d’énergie à mes récits. C’est une énergie spontanée et j’en avais besoin à ce moment-là."
Fien Troch a pour la première fois, avec Home, écrit avec son mari Nico Leunen qui habituellement monte les films de la réalisatrice. Cette dernière se rappelle : "Il m’a interviewée, en me demandant de lui raconter tous les éléments que j’avais en tête. A partir de ce que je lui ai dit, il a écrit un canevas narratif. On a établi alors les relations entre les personnages. J’aime qu’ils soient actifs, vivants et en mouvement. Je désirais les ancrer dans des situations réalistes."
Fien Troch tenait à faire tourner des acteurs non professionnels. Six mois avant le tournage, des castings ont été organisés pendant lesquels la directrice de casting Magali Coremans demandait aux jeunes comment ils voyaient leur avenir dans 20 ans et les faisait aussi réagir à des vidéos sur Youtube. La deuxième étape a consisté à leur donner du texte. "Les quatre adolescents que j’ai retenus ne se disaient pas qu’ils allaient devenir des stars de cinéma. On a trouvé le personnage de Kevin dans un skatepark. Celui de John, c’est sa mère qui l’avait inscrit au casting. Ils restaient eux-mêmes, alors que je sentais trop la fabrication chez les acteurs professionnels", précise la cinéaste.
Fien Troch a fait le choix d'intégrer dans Home des vidéos réalisées par les jeunes via leurs smartphones. La réalisatrice justifie ce choix : "Les jeunes filment et se prennent en photo tout le temps ! Dans un souci de réalisme et pour en faire des personnages actifs, nous avons décidé de confier un téléphone à chacun des acteurs. Ils avaient pour consigne de filmer ce qu’ils voulaient. A la fin d’une scène, par exemple, je leur demandais de rester et de continuer à filmer, après que l’équipe ait quitté les lieux. La seule scène que nous avions prévue de tourner avec le smartphone est celle du meurtre de la mère, lorsque John et Kevin sont dehors."
Larry Clark, célèbre metteur en scène américain connu pour ses films très explicites sur l'adolescence, a été une influence pour Fien Troch. Dans Home, la cinéaste voulait retrouver la noirceur de la vision du réalisateur : "Je voulais faire un film dans lequel les jeunes ne sont pas pervertis, mais ne sont pas des saints non plus. Pour cela, je me suis replongée dans les sentiments que j’avais éprouvés il y a des années, en voyant les films de Larry Clark. Je souhaitais retrouver la noirceur de sa vision, conjuguée à son geste cool."
Fien Troch voit le meurtre de la mère comme une explosion de douleur résultant de la violence accumulée par un garçon qui a connu des abus pendant quinze ans. Dans cette optique, la réalisatrice a voulu que cette scène soit brutale. "On s’était dit dès le début qu’on filmerait tout, que la caméra devait être là et que ce serait très réaliste. on a fait comme si les événements n’avaient eu lieu qu’une fois et que la caméra se trouvait sur les lieux à ce moment-là. Les deux garçons entrent dans le salon et découvrent John métamorphosé. Je voulais créer un choc et jouer sur l’ambiguïté des sentiments qu’éprouve le spectateur. C’est ce que permet le cinéma", confie Fien Troch.