Ultimo Tango s’inscrit dans le prolongement de "El Ultimo Aplauso", le précédent film réalisé par German Kral qui était également un documentaire musical. Cela étant, le metteur en scène argentin précise que les deux films sont différents sur le fond et la forme : "D’une part, Ultimo Tango raconte avant tout une histoire d’amour. D’autre part, mon caméraman Jo Heim et moi-même avons conçu en amont ce film pour le cinéma, idée à laquelle nous nous sommes rattachés tout au long du tournage."
German Kral connait Juan Carlos Copes et María Nieves depuis son enfance, ces deux danseurs formant LE couple phare du tango en Argentine. "On les voyait partout : à la télévision, au théâtre, dans les journaux… Dès qu’il s’agissait de tango, c’était le couple référence", se rappelle-t-il.
L'Argentin German Kral a développé une passion pour le tango lorsqu'il est arrivé à Berlin qui est, après Buenos Aires, la première ville au monde où l’on danse le plus le tango. Il s'était rendu en Allemagne il y a quelques années pour y étudier le cinéma. Le réalisateur explique :
"Un ami argentin m’attendait à l’aéroport et m’a accueilli chez lui. Il avait une cassette de Roberto Goyeneche, un célèbre chanteur de tango, qui interprétait Naranjo en Flor (L’oranger en fleur), un morceau magnifique. Les paroles étaient les suivantes : « Primero hay que saber sufrir, después amar, después partir y al fin andar sin pensamiento... » « Il faut d’abord savoir souffrir, puis savoir aimer, puis savoir partir, et enfin s’en aller sans penser… » Ces vers m’ont donc profondément touché. C’est à ce moment-là que je suis tombé amoureux du tango…"
Au début du projet, María Nieves et Juan Carlos Copes n’avaient presque plus dansé ensemble depuis leur séparation à la fin des années 1990. German Kral explique que les diriger tous les deux, pour qu’à la fin du film ils s’élancent l’un vers l’autre et adoptent la position de l’enlacement, a constitué une tâche titanesque :
"Pour pouvoir tourner cette scène, il aura fallu trois années de discussions, boire d’innombrables cafés avec Juan Copes, essuyer plusieurs refus, endurer des maux de tête, passer des nuits sans dormir. J’ai même reçu une lettre assassine de l’avocat de Juan Copes et de sa femme… Mais je n’ai pas baissé les bras. Jusqu’à la fin du tournage, nous ne savions pas si cette scène pourrait se faire. L’épouse de Juan Copes a finalement donné son accord. Je suis sincèrement heureux et reconnaissant envers Juan Carlos Copes et María Nieves d’avoir bien voulu coopérer. Si l’un d’entre eux n’avait pas été présent, le film s’en serait nettement appauvri."
German Kral voulait tout d'abord tourner le film en 3D du fait de Pina réalisé par Wim Wenders qui l'a beaucoup inspiré. Il est ainsi allé voir ce dernier (qui l'a toujours soutenu depuis ses études à l’École supérieure de cinéma et de télévision de Munich) et lui a montré un film-annonce qu'il avait tourné en 3D en lui demandant s’il pouvait produire le film. Wenders lui a alors dit de trouver des acteurs capables de jouer l’histoire de Juan et Maria et la transformer en un récit "plus vrai que nature".
C'est à ce moment que Kral a pensé que le film ne devait pas être uniquement composé de chorégraphies et d’entretiens, mais devait aussi contenir des discussions entre María, Juan et les danseurs. Il confie : "Je suis donc doublement reconnaissant envers Wim Wenders : pour son soutien en tant que producteur exécutif d’une part, et pour son conseil éclairé d’autre part !"