« HHhH » offre une première partie remarquable pendant laquelle la révélation du monstre implacable sera totale. Officier déchu de la « Reichsmarine », Heydrich montrera une aptitude hors du commun pour la création, puis l’industrialisation, de la machine à exterminer. Cédric Jimenez voulait montrer que le monstre cohabite avec un fin mélomane, cultivé et raffiné, qui transmet patiemment son art de soliste à ses enfants, en même temps que la tendresse naturelle d’un père. Egalement ses amicales relations avec Himmler (Stephen Graham très crédible) - un des pires monstres que la race humaine a produit- sont empreintes de respect, délicatesse et courtoisie. Un certain cinéma hollywoodien nous a représentés des monstres souvent (trop ?) comme des psychopathes, s’étalant complaisamment dans le gore. Ici rien de tout cela, mais une extrême retenue glaçante, où civilisation et barbarie cohabitent, parfaitement incarnée dans la silhouette massive de l’excellent Jason Clarke et sa compagne parfois hallucinée, Rosamund Pike. Cette description presque anthropologique s’achève avec la première partie du film et l’attentat. L’image s’arrête et le récit reprend six mois en arrière, du côté des résistants. Ce procédé souvent utilisé pour amener un flash back qui ne s’impose pas, est assez déplaisant (même si dans « Ratatouille » il peut amuser, la portée historique étant quelque peu moindre). Le film bascule alors dans une espèce de récit d’aventure, tenant davantage de « La grande évasion » de John Sturges (la maestria en moins) que de « L’armée des ombres » de Jean-Pierre Melville, le tout semblant s’être décidé à la suite d’un match de football dans la boue, où aucun des participants n’a la moindre salissure. Car à la précision de la première partie, succède l’a peu près - voire l’improvisé dans les bluettes - même si la photographie de Laurent Tangy et les interprètes font le job (mention à jack Reynor et Mia Makowska). Ain’t be enough comme dirait Eastwood dans « Million Dollar Baby ». Ainsi tout doucement la tension tombe et le danger, et la violence qui va avec, semblent s’être évaporé. Evidemment le massacre historique et total de Lidice nous rappelle qu’en terme d’horreur, les nazis ne s’étaient éloignés en rien. Plus fidèle à l’histoire que « Hangman Also Die ! » (Les bourreaux meurent aussi) que Fritz Lang réalisa en 1943, par une absence d’unité de style (si c’était pour la respiration, un cheminement parallèle le faisait aussi bien, sans remise en cause de la tension) Jimenez offre un film qui supporte mal la comparaison avec son illustre prédécesseur.