La partie ne peut pas être gagnée d'avance lorsque l'on porte ce nom, de premier abord sommaire et répandu. Une once de réflexion et logiques sont les affiliations ! Luke Scott n'a décidément pas d'autre choix que de porter ce nom si sommaire et pourtant si notoire dans le monde du cinéma (et oui, ce n'est pas comme Duncan Jones !). Le troisième fils de cet écrasant Ridley trouve tout de même l'ambition suffisante pour suivre les traces de son paternel et se construire lui aussi sa propre identité de cinéaste.
Morgane, un titre qui, de premier abord, n'a malheureusement rien d'épatant. Il aurait pu s'appeler Esther ou Annabelle, la première impression se restreint très rapidement vers un énième et banal film d'horreur, ne renouvelant rien et privilégiant les clichés propres au genre actuel. Mais il faut avouer que son synopsis est un appel des plus explicite aux puristes de science-fiction. Un lien se crée alors à ce moment, puis se solidifie radicalement lorsque l'intéressé se rend compte qu'il s'agit du fils de celui à qui l'on doit ces chefs-d'oeuvre que sont Alien et Blade Runner. Enthousiasme ou scepticisme, là n'est plus la question, il mérite tout de même sa chance.
Morgane saisit le spectateur dès sa première séquence. L'accident entre la jeune androïde et une des scientifiques, filmé en plongée par le biais de caméras de surveillance, sert d'élément perturbateur et vient s'imposer comme repère essentiel pour le spectateur. Une manière de procéder concise et diablement efficace, venant d'emblée louer pour son réalisateur un certain talent de la mise en scène. En effet, outre ce premier point, Luke Scott prend soin d'implanter l'action au beau milieu d'un cadre verdoyant, l'étendue d'une forêt où l'attention ne s'oriente que vers ce laboratoire servant d'étude sur le comportement de la jeune fille. Il s'agit bien d'un huit-clos, revisitant avec ferveur les racines faisant la notoriété de son père. Le jeune réalisateur prend en compte chaque recoin du cadre qu'il a établi pour en gérer les espaces de manière foutrement astucieuse. Il parvient à instaurer une ambiance des plus froide et des plus métallique afin de mettre en exergue les fondements de son scénario.
S'il excelle dans l'art de la mise en scène, c'est parce que le jeune réalisateur compte également sur son casting. En effet, il réside un indéniable homogénéité entre l'ambiance installée et les prestations de ses acteurs. Outre la présence glaciale mais convaincante d'une Kata Mara enfin sur le devant de la scène, les yeux se tournent davantage vers la jeune Anya Taylor-Joy dans le rôle de l'androïde, aussi bouillonnante qu'imprévisible. Les seconds rôles tels que Toby Jones, Rose Leslie, Michelle Yeoh et Paul Giamatti viennent donner un cachet supplémentaire qu'il est nécessaire de mettre en avant.
Si Morgane a les ingrédients pour faire de lui un grand (ou grande ?) du genre, il ne viendra malheureusement pas se hisser au niveau d'un Moon ou d'un Ex Machina. La faute certainement à un scénario ne renouvelant strictement rien mais se permettant également certaines facilités. Les colères imprévisibles et ultraviolentes de l'androïde tiennent à quoi ? Comment pouvoir espérer un réel progrès scientifique tout en se cachant ? Autant de questions qui restent malheureusement sans réponses, des facilités scénaristiques qui servent davantage l'aspect divertissant du métrage que la profondeur de son scénario. Reste à dire que la tension et la mise en scène sont telles qu'elles viennent en partie gommer certaines faiblesses, mais seulement sur le moment...
Luke Scott livre un film quelque peu mitigé, parfois répétitif. Une petite sœur d'Ex Machina en moins profond et plus violent, ne renouvelant absolument rien dans le genre, mais bourré de clins d’œil et réutilisant habilement certains codes. Morgane se montre prenant et divertissant dans son ensemble, une tension tenue par une présence globalement féminine (il n'y a pas à dire, c'est dans les gênes) et qui, même s'il se termine un peu absurdement, laisse défiler ses 92 minutes dans un climat fort agréable.