La famille Scott continue encore de s’agrandir au sein de système Hollywoodien : après le papa Ridley qu’on ne présente plus (pour les incultes : "Blade Runner", "Les Duellistes", "Gladiateur", "Alien", "Kingdom of Heaven", "Black Rain", "Prometheus"), le tonton Tony tout aussi excellent ("Top Gun", "Domino", "Jours de Tonnerre", "Man On Fire", "True Romance") et plus récemment le surprenant frangin Jake ("Welcome to the Rileys"), c’est au tour de Luke le second frangin de s’y coller. Et pour son premier métrage, il est allé chercher un script de la fameuse Black List d’Hollywood…bilan ? Et bien on peut affirmer que Luke a du potentiel et que dans ses veines coule bien celui de la famille Scott…malheureusement pour lui, son premier film ne restera pas dans les annales car il comporte beaucoup trop de maladresses qui transpirent l’inexpérience. Tout d’abord, à vouloir trop mélanger les thèmes et les genres (science-fiction, approche de l’intelligence artificielle, vision moderne du mythe du monstre de Frankenstein, thriller horrifique, questions existentielles et humanistes), le film part dans trop de directions différentes sans jamais les développer réellement : quand le générique de fin arrive, on ne peut donc s’empêcher de se sentier frustré car il nous manque quelque chose ! Il y a aussi parfois des bonnes idées qui peuvent se révéler handicapantes quand il s’agit d’éviter de spoiler le reste du récit (
ceux qui regarderont avec insistance les jeux de reflet entre Morgane et Lee ne seront pas dépourvus par la révélation finale
), des incohérences malvenues ou mal expliquées (
d’où Morgane sait se battre et conduire une auto ?!
), des choix de cadrages peu judicieux et une gestion de la colorimétrie pas toujours heureux (gaffe à la surexposition non de dieu !!). Prendre des acteurs charismatiques pour attirer le public c’est bien, mais encore faut-il ne pas les sous-exploiter de telle manière qu’on a l’impression qu’ils sont juste venus faire un caméo pour avoir un p’tit chèque (Michelle Yeoh, Toby Jones, Brian Cox et Jennifer Jason Leigh). Et puis, mais là c’est un petit peu plus personnel, j’accroche pas au choix de Kate Mara comme rôle principal : ok c’est une jolie femme mais jusqu’à présent elle ne m’a jamais convaincu à l’écran ; pire : ici j’ai carrément l’impression de revoir sa calamiteuse prestation dans "Les 4 Fantastiques". Bon, ne soyons pas totalement négatif, il y a aussi de bons points : 01) le lien entre Morgane et les scientifiques : ces derniers ont créé Morgane et l’ont vu grandir, ce qui a crée une forte relation entre eux. Ils se sentent comme ses parents ou ses amis (et Morgane les voit aussi comme tels), et il est presque impossible pour eux de ne pas la considérer comme un être humain (contrairement à l’agent Weahers qui la considère toujours comme une chose, notamment en la désignant toujours par les mots « ça » et « la chose » plutôt que « elle » et « la fille ») 02) l’interrogation sur la condition humaine avec la corrélation avec le monstre de Frankenstein : créée par l’homme, Morgane apprend à apprécier les hommes et commence à faire preuve de conscience et d’émotions comme un humain. Pourtant, lorsqu’elle sentira son existence menacée,
elle n’hésitera pas par se retourner contre eux avec une violence inouïe quitte à agir de façon de plus en plus monstrueuse
...et quoi de plus humain que de commettre des actes immondes et répressibles ? Dans la même veine, la scène du test psychologique est vraiment excellente par son déroulement, son texte intelligent et son interprétation (contrairement à Michelle Yeoh et Toby Jones, Paul Giamatti est irréprochable tant il est très impliqué pour ce qui sera pourtant son unique scène du film !) 03) certains plans, notamment ceux en extérieur dans la forêt et près de la rivière, sont plutôt réussis ; et l’utilisation du numérique pour accentuer les couleurs afin d’instaurer une atmosphère étrange est très judicieuse…c’est dans ces moments là qu’on sent un peu la patte de papa Ridley : c’est plutôt bon signe !! 04) la plus belle surprise du film n’est autre que la jeune Anya Taylor-Joy : emprunt d’un incroyable magnétisme, elle incarne une Morgane pleine de dualités (à la fois fragile et dangereuse, attendrissante et inquiétante, humaine et monstrueuse). Sur le papier, "Morgane" s’annonçait prometteur, psychologique et complexe ; malheureusement il n’arrive pas à se donner les moyens de ses ambitions (le faible budget d’environ 8 millions de dollars n’aidant pas forcément non plus !) et se contente de se la jouer petit thriller de science-fiction plutôt bien mené. Même s’il est encore tôt pour savoir ce que vaut réellement Luke Scott, il s’agit là de débuts assez prometteurs. Il ne reste plus qu’à attendre patiemment la suite de la carrière du Monsieur pour voir s’il est de la même trempe que son papa Ridley et son tonton Tony…