L’intention première poursuivie par Abigail Disney, réalisatrice du film, ne fut pas de parler frontalement du port d’armes. Elle a d’abord cherché une personnalité affiliée à l’aile conservatrice de la droite américaine qui serait prête à réfléchir sur la position des évangélistes sur le port d’armes et l’avortement. Son intérêt pour la question est né après la promulgation de la loi intitulée Stand Your Ground, qui légitime l’auto-défense en autorisant l’utilisation de la force sur le seul jugement flou de celui qui en fait usage. Celle-ci lui paraissait alors en contradiction avec une éthique pro-vie défendue par ceux qui ont poussé la loi à être promulguée. Son appel a eu quelques réponses mais personne n’accepta une prise de parole publique au centre d’un documentaire. Jusqu’à ce que Rob Schenck l’appelle et suive la réalisatrice.
La première rencontre d’Abigail Disney, réalisatrice, avec le révérend Rob Schenck ne fut pas sans appréhensions. L’homme a pris toute sa vie des positions concernant certaines questions sociales telles que la réalisatrice voyait comme "contraires" à ses opinions. Il a aussi participé à la fondation de l’Operation Rescue, une des organisations anti-avortement les plus actives de la côte ouest américaine. "Pour moi, il était l’ennemi, il était le diable", se rappelle-t-elle. Après une rencontre qu’elle a décrit comme "pleine de surprises", elle a fini par développer une forte amitié avec le révérend. "Si vous approchez les gens avec respect et un cœur grand ouvert, ils vont presque toujours vous répondre de la même manière".
Du tournage au montage, l’expérience vécue par sa réalisatrice s’apparenta à une épreuve de force. Parfois férocement opposée aux positions du révérend et de ses alliés politiques, elle a dû se contenir au maximum pour ne pas "hurler sa désapprobation", se remémore-t-elle, en poursuivant : "C’est très difficile de ne pas couper quelqu’un avec qui vous êtes en profond désaccord quand vous avez tout le pouvoir de le faire dans la salle de montage".
Le révérend Rob Schenck fut d’abord soucieux du risque qu’il prenait à être au cœur d’un documentaire tout entier. Il fut rassuré de pouvoir s’exprimer librement avec un langage religieux qu’il juge constitutif de son identité, espace laissé consciemment par la réalisatrice. A l’opposé, celle-ci devint l’une des premières à être invité au sein d'une réunion entre évangélistes, évènement rendu encore plus rare par la seule présence d’une caméra à même de filmer les conversations.