Tout d’abord, si vous n’avez guère un sérieux penchant pour les sentiments humains, évitez d’y aller : ça vous évitera de partir en cours de séance et d’imposer votre silhouette en plein milieu de l’écran à ceux que ça intéresse. Quoique vous pourriez apprendre bien des choses. Pour les autres, si vous avez aimé "Mary", alors vous devriez apprécier le bien nommé "Wonder". Parce qu’il traite lui aussi de la différence, à un degré différent toutefois. A croire que ça devient une mode depuis quelques temps… Mais c’est aussi une façon de délier les langues peu à peu, ce qui ne serait pas un mal, surtout si on considère le temps depuis lequel ça dure. Et heureusement qu’il y a le septième art pour tenter de déclencher une réelle prise de conscience. Alors voici mon avis, influencé il est vrai par ma connaissance du sujet puisque j’ai dans mon entourage une famille qui a un enfant… différent. Et pour la fréquenter de près, je me suis rendu compte du combat quotidien pour ne pas tenir compte du regard des gens, de la lutte contre le jugement qui sort de ces regards tout en essayant de ne pas y prêter cas. Mais quand sa jeune progéniture est en prise avec la méchanceté des jeunes de son âge, le combat est d’autant plus difficile, à plus forte raison quand les parents n’admettent pas la différence au point de catégoriser telle ou telle personne au rang de monstre ou de débile profond. Nous retrouvons tout cela dans ce film éminemment authentique. Un père infiniment prévenant, une mère entièrement dévouée à la protection de son petit, une grande sœur en quête d’existence aux yeux de sa maman mais profondément attachée à son petit frère, tel est le portrait brossé du giron familial du jeune Auguste, ce jeune garçon qui n’a rien demandé à personne mais qui doit porter le lourd fardeau de la différence au grand jour en endossant en prime le statut peu enviable de bleu. Nul n’ignore qu’il n’y a pas plus méchant que les enfants entre eux, et c’est parfaitement retranscrit ici. Mais ils sont capables aussi du meilleur. Outre Julia Roberts et Owen Wilson qui sont absolument parfaits dans le rôle des parents que nous aimerions tous avoir, notre attachement ira envers les enfants, à commencer vers Jacob Tremblay, époustouflant dans le rôle d’Auggie. Mais le cadre de cette famille soudée quoi qu’il arrive est aussi scellé par l’excellente performance d’Izabela Vidovic dans les traits de la grande sœur attentionnée. En somme, ils forment une famille inscrite dans les parfaits idéaux, par ailleurs douée d’une gentillesse innée. Point de vue gentillesse, on la verra d’entrée de jeu sur le visage de Noah Jupe dans le costume de Jack Will. Et aussi chez d’autres enfants, tels que Summer (interprétée par Millie Davis) et Charlotte (Elle McKinnon). Il faut dire qu’ils sont dans un établissement scolaire qui prône les idéaux et la bonne conduite qui va avec, dirigé avec beaucoup de bienveillance par Monsieur Tushman (Mandy Patinkin, plus habitué à des rôles de série), il est vrai aidé par des enseignants qui ont la passion de leur métier, une passion très visible chez Mr Browne (Daveed Diggs). Autant dire que le casting réalisé a été d’une grande qualité dans ses choix. En dehors de ça, on s’interrogera peut-être sur la romance entre deux adolescents, pas très utile pour enrichir le propos, mais c’est aussi par cette accumulation de petits faits anodins que de grandes choses finissent par se produire. On pourra peut-être aussi reprocher cette facilité scénaristique qui semble donner un revirement assez facile d’un certain nombre d’élèves par rapport à leur petit camarade. Certes, les spectateurs croyant encore profondément au genre humain, en la croyance des sentiments et attachés aux vraies valeurs verront la tournure des événements d’un bon œil et se satisferont de la diffusion du message à un large public. Il manque cependant ce petit truc qui aurait pu donner à la dimension émotionnelle une ampleur qui aurait emporté l’adhésion de tous. Oui, il manque ce petit quelque chose d’indéfinissable. Mais quoi ? Si je le savais… Oh je ne dis pas que l’émotion est absente. Non, elle est bien présente, et même fort. Assez fort en tout cas pour faire rouler quelques petites perles salées sur vos joues. Et puis surtout, je suis sorti du film en me demandant que tout compte fait, elle est où la différence ? Après tout, nous sommes tous différents. En effet, nous n’avons pas tous les mêmes capacités… pas plus que les mêmes aspects physiques. Ne dit-on pas qu’il faut de tout pour faire un monde ? Ne dit-on pas que tous les goûts sont dans la nature ? Eh bien, c’est pareil pour LA différence telle que l’être humain l’entend. Quant à "Wonder", on se souviendra du message distillé, de l’authenticité de l’œuvre, du jeu juste de l’ensemble des acteurs, et de la musique qui accompagne merveilleusement bien le film.