Sylvain Desclous a choisi d'ancrer son premier long métrage dans le monde de la vente. Il a eu cette idée en voyant un reportage télévisé ayant pour sujet un vendeur « extra » : un vendeur qui n’est pas salarié mais qui passe de magasin en magasin. Le cinéaste a vu dans ce reportage le prix à payer d'une telle profession : la solitude et une vie personnelle pauvre.
Gérard Lanvin, précédemment annoncé dans le rôle du père de Pio Marmai, ne figure plus au casting du film. C'est Gilbert Melki qui tient finalement l'un des deux rôles principaux.
Avant l'écriture du scénario, Sylvain Desclous a commencé par faire beaucoup de recherches sur le sujet en rencontrant des vendeurs, en assistant à des séances de coaching où on leur apprend à maximiser leur savoir-faire et bien sûr en les observant à l'oeuvre. Il se souvient :
"Tout ce « travail d’approche » m’a conforté dans l’idée que oui, il y avait chez certains d’entre eux, les meilleurs, quelque chose que j’avais envie de montrer à l’écran, car certains vendeurs sont de grands comédiens ! Pour décrocher un contrat, ils sont capables de parler pendant des heures avec des clients, de les faire rire, de les émouvoir, de les faire parler aussi... Cela masque parfois une grande solitude."
Le vendeur campé par Gilbert Melki comble le vide de sa vie personnelle en passant beaucoup de temps dans les bars, en fréquentant des prostituées et en se droguant. Si cette situation semble exagérée, Sylvain Desclous explique qu'il n'a pas voulu faire de ce personnage un archétype du vendeur mais un tremplin pour explorer le thème de la solitude née de la profession exercée.
Sylvain Desclous a tenu à tourner dans de vraies zones commerciales. Il a cherché à donner à ces endroits, qui ne sont par définition pas les plus glamours du monde, de la beauté pour qu’ils génèrent de l’émotion. Dans cette optique, le cinéaste n'a pas opté pour un traitement réaliste avec une caméra à l'épaule.
Au niveau de l'esthétique, Sylvain Desclous et son directeur de la photographie Emmanuel Soyer avaient en tête des films très esthétiques faisant la part belle au plan large : L’Épouvantail de Jerry Schatzberg, The Yards de James Gray ou encore Under the Skin de Jonathan Glazer.
L'une des raisons ayant poussé Sylvain Desclous à choisir Gilbert Melki provient du fait qu'il s'agit d'un comédien réussissant à être populaire en tournant peu. Il ne voulait pas de quelqu'un apparaissant à l'écran plusieurs fois par an. Au sujet de Pio Marmai, c'est sa prestation de dealer parisien mal dans sa peau dans le sombre Alyah qui a le plus séduit le metteur en scène.
Sylvain Desclous souhaitait de la musique américaine des années 1970 pour renforcer la dimension cinématographique du film. Il confie : "Le morceau des Zombies, à la moitié du film, c’est Gilbert qui me l’a fait découvrir, et j’en suis tout de suite tombé amoureux. « Cadillac Walk » de Mink Meville, nous l’avions tous deux dans notre iPhone. Quant aux deux chansons de Fred Buscaglione, Gilbert les fredonnait pendant le tournage entre les prises, et je m’en suis souvenu au montage. Elles ont quelque chose d’intemporel. Quant à la musique originale, composée par Amaury Chabauty, elle devait être à la hauteur des morceaux contenus dans le film, mais aussi travailler le thème de Serge."
Pour se glisser dans la peau de son personnage de vendeur, Gilbert Melki a pioché dans ses souvenirs, l'acteur ayant été, lorsqu'il avait 18 ans, vendeur dans un magasin de vêtements du Sentier. "A cette époque-là, j’ai connu beaucoup de gens qui faisaient les foires et les marchés, au cours d’interminables tournées. Souvent, c’étaient des gens qui se la jouaient, étaient dans la flambe, mais qui, en fait, avaient une vie d’une grande solitude", se rappelle-t-il.