Quand l’auteur de ces lignes s’est trouvé invité à l’Avant-première au Gaumont Opéra-côté Premier à PARIS (75 002), jeudi dernier, 17 Mars, il avait vu la Bande-annonce qui ne l’avait pas emballé et il y allait principalement pour LUCHON !
Bien sûr qu’il avait en tête les vers de RIMBAUD et ce qui précédait « quand on a dix-sept ans », le fameux « on n’est pas sérieux » ; bien sûr qu’il avait en tête son visage pris en photo. à … 17 ans, justement, le plus connu qu’on lui connaisse et cette modernité des traits jusque dans la coiffure, bien sûr qu’il avait toujours ressenti comment « Arthur » avait pu souffrir et du manque de lumière et des terres et du climat de … CHARLEVILLE-MEZIERES - qu’il conjurera la moitié de sa vie et jusqu’en Abyssinie -, lui qui avait été jusqu’à ASSOUAN, transporté par ses couleurs d’or et de bleu, lui qui connaissait un autre plat pays et la révolte intérieure qu’il pouvait engendrer.
Bien sûr qu’il se doutait que la suite des vers le conduirait « sous les tilleuls verts de la promenade » qu’il imaginait comme nos allées d’Etigny et peut-être même qu’une des scènes aurait pour décor « des cafés tapageurs aux lustres éclatants » …
Mais il était loin d’imaginer que la fiction trouverait en notre « Reine des Pyrénées » sont écrin naturel ! Que même Sandrine KIBERLAIN ferait aveu au détour d’un dialogue de son éducation rigoriste en Beauce !
Tout aurait pu commencer sur un air de Calogero tel que « J’ai le droit aussi », extrait de son album des Feux d’artifice … un instant la peur le saisit aux premières images de la composition d’équipes sportives, entre élèves d’un lycée (« Edmond-Rostand », en l’occurrence) ou l’humiliation d’être « choisi » parmi les deux derniers le rejoint aux premiers sentiments de la différence et de l’exclusion
Béranger ANCEAUX se cachait là, en fil conducteur, aussi bien dans le Clip que dans notre souvenir de son Baisers cachés, sélectionné au 18ème. Festival des Créations télévisuelles et qu’il nous avait été donné de découvrir, là aussi, en Avant-première.
Le poncif achevé, les personnages et l’histoire pouvaient s’installer, un trio « qui fonctionne » comme on dit maintenant, entre une mère compréhensive, Sandrine KIBERLAIN, douce et sensible, son fils, Damien, incarné par Kacey MOTTET-KLEIN et son condisciple, Tom, Corentin FILA.
Le triptyque entre « violence, désirs et prendre soin » qu’a intelligemment relevé un spectateur lors du débat qui succéda la projection peut donner une des clefs mais il y manque le quatrième élément, notre ville, nos belles montagnes et puis, un cinquième, le poème dont j’emprunte, ici, les mots pour visualiser les scènes, qui de la douleur d’une femme dans « la clarté d’un pâle réverbère » du Cimetière nouveau, qui de cette « nuit de juin » où Damien, « piqué de doux frissons […] se laisse griser » autour de notre Brandon de la Saint-Jean (classé l’année dernière au Patrimoine Culturel Immatériel de l’U.N.E.S.C.O.), qui de la rue Sylvie, « le vent chargé de bruits – la ville n’est pas loin », « un beau soir […] de bocks et de […] limonade » avec une mère qui invite son fils à s’ouvrir et faire confiance …
Charge émotive !
Comment vous écrire la véritable charge émotive qui s’empare de vous, dès lors, dans la seconde partie du Film ?
Sinon qu’une critique doit trouver autant d’échos à être lue avant qu’après la diffusion, hier soir pour vous, il y a près d’une semaine pour nous, pauvres expat’ luchonnais de la Capitale !
Dans une salle par avance acquise, en tout cas très désireuse (!), Corentin FILA a même pu faire l’analogie entre son rôle et la mélancolie, la solitude, qui peuvent l’étreindre sur le pavé parisien alors que Kacey disait avoir appris à connaître « au fur et à mesure » son personnage ; il reconnut même une certaine difficulté dans la relation homosexuelle quand, nous lui trouvions plutôt une grande justesse faite de retenue mêlée à l’incandescence adolescente des premiers émois, « qui palpite là, comme une petite bête … Le cœur fou robinsonne », écrirait encore RIMBAUD
L’intrusion du Cinéste - après que l’auteur de ces lignes ait ouvert le Débat par une première question comme il se devait (!) sur le choix de notre pays de Luchon qui ramenait aux origines d’André TECHINE –, arrivé par surprise en « Uber », a permis d’aller plus loin.
Nous l’évoquerons avec le Cimetière nouveau (n° 04) et son muret à la fois haut et peu haut, comme un écho des … Hauts de Hurlevent, ces scènes qu’il affectionne où « l’on prend le maximum de risques, sans filet » (sic) telle celle qu’on ne déflorera pas, littéralement et qui donna lieu à un nombreux questionnement.
Le « Haut et le Bas », c’est aussi la raison du choix de notre vallée, dixit la Co-Scénariste, Céline SCIAMMA, alternance entre le milieu familial de Tom et celui de Damien, un Tom qui pourrait habiter Superbagnères ou … GARIN ou quand SAINT-GIRONS, en Ariège, en dispute la vedette, rires !
Ces lieux nous parlent.
Arthur RIMABAUD était de la même génération que Jean-Marie MENGUE, le Sculpteur luchonnais bien connu et monté à PARIS mener la carrière que l’on sait, né pour le premier en 1854 et pour le second -, peint au soir de sa vie par André REGAGNON, de … SAINT-GIRONS, en Ariège (!), quelle coïncidence – en 1855 ; comment dire, également, que le nouveau caveau visible dans le Film pouvait s’interpréter comme un clin d’œil à la mort, au groupe de Cain & Abel, aux Quinconces et laisser nous présager le pire.
Mais voilà, « vous êtes amoureux. Loué jusqu’au mois d’août [l’année scolaire terminée]. Vous êtes amoureux » continuait d’écrire RIMBAUD et en sortant du Gaumont Opéra, comme happé par le métro, nous avions failli manquer celle ou celui qui s’était pris pour le Poète, justement, « Donne-moi de la haine, je t’en fais de l’amour », quelle charge émotive, vous disais-je
Par Mathieu BRETILLARD-MENGUE