La carrière de Gavin Hood est vraiment en dents de scie, entre du blockbuster calamiteux ("X-Men Origins : Wolverine") et des films politisés bien plus réussis, souvent en lien avec l'Afrique. Heureusement, "Eye in the Sky" navigue dans la seconde catégorie. On y suit, presque en temps réel, une opération anti-terroriste menée conjointement entre les USA, le Royaume-Uni et le Kenya. Un projet d'arrestation musclée se transforme en opportunité de faire une juteuse frappe au drone, dans un bidonville de Nairobi, avec dommage collatéraux potentiels. Que faire ? On suivra toute la chaîne de commande. Entre des pilotes de drone qui ne sont que des pions mais qui sont ceux qui appuient sur la gâchette. Des hauts gradés qui veulent voir enfin leur travail de traque payer, et rayer de la carte de dangereux individus. Et des politiciens assez lâches, prompts à discuter, référer et déléguer plutôt qu'à décider. Une intrigue écrite avec intelligence, où personne n'a vraiment tort. Les divers arguments stratégiques, moraux, légaux, ou politiques s'entendent tous. Chacun a raison, chaque personnage est nuancé, laissant aussi au spectateur le soin de prendre parti. Ce n'est donc ni une charge anti-drone, ni un film critiquant le besoin britannique de discuter et d'avoir un consensus (là où les Américains sont plus expéditifs !). Il montre les tenants et aboutissants, de manière probablement réalistes, tout en taclant tout de même la difficulté pour les politiciens de décider. Le tout emballé dans un scénario assez haletant, embarquant tout le monde dans un suspense bien géré du début à la fin. Avec en prime quelques têtes bien connues. Pour ne citer qu'eux, Helen Mirren et Alan Rickman (dont il s'agit d'ailleurs du dernier rôle live avant son décès). Il faut aussi signaler que le thème des frappes de drone était pleinement d'actualité à l'époque. "Good Kill", centré sur les pilotes de drone, était sorti l'année précédente. Et l'on sait aujourd'hui que François Hollande est le président de la 5ème République à avoir autorisé le plus d'assassinats à l'étranger (terroristes tués par frappe de drones américains), suite aux attentats de 2015/2016. La situation présentée dans le film n'a donc sans doute rien d'inédit.