Une très belle surprise, pour un film difficile à classer. C’est bien sûr avant tout une comédie, où l’on rit beaucoup, de situations cocasses, de bons jeux de mots, de dialogues bien écrit, bien ciselés, de gags qui fonctionnent bien. Un comique que l’on a d’ailleurs du mal à classer, car c’est à la fois, moderne, bien écrit, politiquement incorrect, mais aussi dans la grande tradition française.. Mais de fait le référent du film c’est Audrey Dana qui a tout donné d’elle même dans son film. J’avais eu la chance de la voir au théâtre dans « Ring » ou elle faisait une performance exceptionnelle, mon plus beau moment de théâtre de ces 10 dernières années.. C’est une fille qui a une vitalité, une « violence intérieure» aussi, une fêlure. Son jeu est une performance perpétuelle, style Actor’s Studio des années 70 : Al Pacino, De Niro, John Cassavetes , Gena Rowlands. C’est fort , c’est violent, et son film est exactement à son image . Elle même joue à l’ extrême ses scènes de déprime, de crise, de pseudo hystérie, c’est superbe, mais surtout sa manière de diriger les autres actrices est unique. Et là elle prouve un talent formidable de Directeur d’acteurs. Toutes ces actrices sont sublimées, poussées dans leur dernier retranchement : Nakache et Taglioni apparaissent pour la 1er fois comme de grandes actrices, . Leur monologue respectif est superbe, Nakache nous émeut, elle joue juste, elle souffre, elle veut une autre vie. (Car chaque actrice a, à un moment donné, un monologue cadré en plan américain, où elle donne la substance de son personnage en un plan séquence). Sylvie Testud tient un de ses meilleurs rôles (même court). Hands pour la 1ere fois joue vraiment. Paradis est excellente ( comme toujours) dans ce rôle à contre- emploi. Sa jeune assistante Belaidi est merveilleuse de fraîcheur, et elle aussi nous émeut dans le monologue où elle défend sa mère accusée de meurtre, au tribunal. Adjani , un peu hésitante au début , termine en toute beauté aussi , et c’est bien de la revoir à ce niveau. Et puis il y a une lecture plus intellectuelle du film à faire , à un 2e niveau, où toutes ces situations sont en fait des clichés négatifs du comportement masculin. Taglioni la Baby sitter canon, va séduire non pas l’homme comme on l'a vu 100 fois au cinéma , mais la femme pour l’initier au saphisme, totalement perturbant, nouveau, dérangeant... Hands la femme forte va virer son « faible » mari, qui va se réfugier chez sa maîtresse avec ses enfants dans les bras, l’inverse de ce que l’on voit tout le temps. Casta , qui joue vraiment pour une fois, a trouvé quelqu’un qui l’aime malgré sa « vulgarité » , elle rote , elle pète. Elle se comporte en macho et même dans le sexe, comme un homme gavé de « Youporn » qui veut prouver à sa femme son expertise, avec sa "nouvelle maîtresse", elle lui pince ses tètons et lui met un doigt par derrière, et le pauvre Elbé (excellent aussi ) lui dit tout gentiment qu’il préfère l’amour normal et n’est pas attiré par les perversions. C’est le monde à l’ envers. Paradis enfin, c’est le blues classique du Busines man, en effet miroir. C’est incroyablement intelligent. Dana nous renverse, et nous bouscule. Chaque personnage est le double d’un stéréotype masculin. Et enfin la scène d’ouverture du film , la « choquante » apparition du Tampax est aussi un must, bien filmé, forte, dérangeante, avec un petite effet graphique 3D. C’est la première que c’est fait au cinéma, c’est de la liberté pure, et la femme aussi a le droit de parler de son intimité , à sa manière.. Bravo Dana , qui nous fait un film incroyable, qui va bien sûr en dérouter beaucoup, mais qui nous prouve un tempérament hors norme et un grand talent, aux facettes multiples.