L’essentiel de l’histoire porte sur le couple formé par Louis (Louis Garrel) et Claudia (Anna Mouglalis). Comme le titre l’indique, la jalousie affective est le thème central du film, et pas seulement celle de ce couple,
Je pense que c’est un bon film, mais j’ai quelques réserves qui m’empêchent de parler de chef d’œuvre.
Cet œuvre s’efforce de suivre l’adage : « il ne faut pas dire, il faut montrer». Les plans silencieux et les mises en situation sont établis pour apporter du sens.
Nous ne sommes pas ennuyés par les dialogues, dans l’ensemble les répliques sont concises et progressent rapidement vers l’essentiel. Contrairement à d’autres œuvres, celle-ci ne nous délivre pas des discours pompeux pour justifier les décisions ou revirement. Tout au plus, certaines clés de compréhension psychologique sont fournies par des personnages secondaires en quelques phrases.
La sobriété des dialogues et de la subtilité de la réalisation donnent une touche de réalisme à l’ensemble. J’ai eu l’impression de suivre la vie courante des individus concernés. Ce qui, en somme, est plutôt cohérent avec le rythme calme du film.
La musique qui oscille entre le guilleret et le mélancolique est adaptée au propos du film qu’elle accompagne discrètement (j’ai été surpris d’apprendre que
Jean Louis Aubert
était le compositeur).
Le jeu d’acteur du casting est juste. Si les personnages m’ont intéressés, nous ne sommes pas invités à être complaisant à leur égard.
L’acteur Louis Garrel joue son personnage homonyme avec intensité et conviction.
A plusieurs reprises, on nous montre de long plan sur Louis après qu’une discussion l’ai placé en état de mélancolie ou de souffrance. Il est louable de concevoir des scènes qui montrent l’émotion plutôt que de faire dire au personnage ce qui l’affecte. Cependant, ce qui me paraît problématique, c’est que l’on ne saisisse pas instantanément (ou complètement) le ressenti de Louis quand une discussion le met mal à l’aise. En conséquence, l’auteur a besoin de le montrer esseulé pour insister longuement sur son mal-être.
Anna Mouglalis joue Claudia avec subtilité mais parfois, on entend mal ce qu’elle dit. A sa décharge le film a été tourné en prises uniques, les scènes n’étaient pas répétées. C’est dommage car elle a une voix apaisante et suave. Il aurait fallu retravailler et égaliser les niveaux de son pour la rapprocher du volume sonore de son interlocuteur. Au contraire, je suppose que le réalisateur a volontairement gardé les prises de son brut pour conserver un caractère improvisé et naturaliste.
Olga Milshtein joue Charlotte, la fille de Louis, dans une poignée de scènes très touchantes. On est facilement attendris par ses scènes. C’est le personnage pour lequel j’ai ressenti le plus d’empathie. A mon sens, cela ne doit rien au hasard, puisque
le réalisateur s’est inspiré de son vécu quand il a écrit le scénario, or, durant son enfance, il était dans la même situation familiale que Charlotte. D’ailleurs, le début du film se place du point de vue de la petite. On peut comprendre alors, pourquoi le réalisateur nous donne une perception sans concession des adultes
.
En général, on sent les protagonistes impliqués. En particulier, le couple de Louis et Claudia.
Cet opus diffère des romances habituelles, idéalisées voire futiles. Ici, on met en relief la dépendance affective des protagonistes. Sentimentalement, les personnages naviguent à vue, il n’y a pas d’interrogation philosophico-existentielle superflue. Les protagonistes subissent les vicissitudes des sentiments, ils évoluent et nous les voyons en prendre acte. Il n’y a pas, céans, plus d’emphase que de grandiloquence. Ce long-métrage d’une heure se déroule dans la simplicité. L’étiquette « élitiste » régulièrement apposée sur cette œuvre tient principalement à son esthétique et ses parti-pris artistiques : la colorimétrie en noir et blanc, le rythme tranquille, les plans séquences (ou simplement plans longs), la localisation dans un ancien Paris et le tournage improvisé en une seule prise pour chaque plan. Le style de l'auteur s'inspirerait du courant de la Nouvelle Vague. Aussi, le réalisateur éprouve un goût assumé pour le cinéma muet qui le conduit à peaufiner l’expression non-verbale. Par contre, sur le fond, le contenu n’est pas très sophistiqué, il s’agit avant tout d’un regard sur une expérience de vie. Sauf erreur de ma part, le but n’est pas de développer un propos intellectualisant. Au final, cette production est accessible mais puise son style dans un cinéma "à l'ancienne".