Sorti en catimini, ce film a failli m'échapper. J'avoue que dans un premier temps cela m'a un peu surpris : quand on a les créateurs de "Little Miss Sunshine" et Paul Dano au générique, on a quand même de sérieux arguments pour inciter les masses à aller voir cet "Elle s’appelle Ruby". Et puis, il y a eu le second temps : celui où je suis allé le voir le film... Et là, l'incompréhension est devenue encore plus grande. Comment cette perle peut passer inaperçue ?! Dans le monde aseptisé de la comédie romantique, comment ne pas vanter les mérites de ce film plein de vie et plein d'envie ?!! On dira ce qu'on voudra de cet "Elle s’appelle Ruby" - qu'on aime ou qu'on n’aime pas – mais qu'on reconnaisse au moins sa véritable imagination et cet enthousiasme sensible à vouloir rompre les codes pour raconter ce qui a déjà été mille fois raconté, mais d'une façon nouvelle et fraîche ? Moi, en tout cas, j'ai totalement adhéré. Ne connaissant absolument pas l'histoire avant d'entrer dans la salle, j'ai été très agréablement embarqué dans une intrigue très riche et très audacieuse, qui sait aussi bien nous faire saliver sur le champ de possibilités narratives que cela offre, qu'elle parvient également à ouvrir un champ remarquable de questionnements sur ce qu'on recherche dans la relation amoureuse. Rien que pour cela, je ne peux que féliciter Jonathan Dayton et Valérie Faris pour leur talent, car pour le coup, je ne me suis pas retrouvé comme je me retrouve souvent devant une comédie romantique. Souvent, on nous offre une espèce de rêve idyllique un peu cul-cul, très surfait, et surtout ultra-prévisible face auquel je finis très rapidement par me barber (vous me direz, certains recherchent cela, mais bon, personnellement à force ça me gonfle vite...). Ici, ils osent aller au-delà du rêve jubilatoire du début de relation : ils osent explorer vraiment ce qu'est un fantasme amoureux et si vraiment ce fantasme correspond à nos vrais désirs. Là – enfin – on va un peu plus loin dans l'exploration de ce qu'est une relation amoureuse, voire tout simplement humaine. Le film va même au-delà de ça en sachant brillamment mettre en parallèle le désir d'aller vers l'autre et la passion de rapport d'un artiste à son oeuvre... Et le pire, c'est que ce film parvient à le faire sans jamais vraiment tomber dans les lourdeurs : l'inventivité de son principe de base lui permettant de questionner frontalement aussi bien sur le ton de la dérision que du drama… Rien que pour cela, j'ai totalement adhéré à la démarche, et j'avalais les minutes de ce film avec gourmandise juste pour voir jusqu'où ces chers Jonathan Dayton et Valérie Faris allaient mener leur raisonnement. Il faut dire que le film est aussi grandement aidé par les prestations conjuguées de Paul Dano, Zoe Kazan et le fort sympathique Chris Messina, qui savent donner saveur et sincérité à cet artifice scénaristique. Enfin bref, vous l'aurez compris : comme pour "Little Miss Sunshine, la fraîcheur et l'enthousiasme du duo Dayton & Faris a su avoir raison de moi et lui pardonner toutes les petites longueurs qui peuvent parfois clairsemer le film. Si je précise d'ailleurs cela, ce n'est pas pour trouver absolument un défaut à ce film : sachez qu'au contraire, à la sortie de mon premier visionnage je lui avais même attribué mes 5 étoiles. Seulement voilà, vous l'aurez compris, mon enthousiasme pour ce film me l'a fait revoir récemment et, même si au final je reste encore une fois conquis par la générosité de ce film, je dois bien reconnaître malgré tout que, comme "Little Miss", cette "Ruby" manque légèrement de "background" pour supporter une deuxième vision. Mais bon, pour discuter de la pertinence d'une seconde vision encore faut-il avoir déjà vu ce "Elle s'appelle Ruby" une fois et surtout l'avoir apprécié pour ce que ce film est : une oeuvre originale, sincère et spontanée comme beaucoup de films devraient être aujourd'hui. Pour moi cela fait déjà de trop nombreuses qualités pour qu'on risque ne pas s'y oser...