Suite à une erreur technique, un groupe de six bombardiers américains reçoit l’ordre d’aller bombarder Moscou, or cet ordre ne peut être annulé qu’au bout de cinq minutes… Dès lors, le président américain appelle le Kremlin pour tenter d’éviter le pire… Si pour son huitième film, adaptation d'un roman d'Eugene Burdick et Harvey Wheeler, l’idée de départ rappelle fortement « Docteur Folamour » de Stanley Kubrick, Sidney Lumet s’en éloigne fortement, loin de l’humour de Kubrick…
Mais s’il sacrifie l’humour, c’est pour nous livrer un film puissant, réaliste, très sombre et terrifiant. En plus de dénoncer et de mettre en image les inquiétudes de son époque (l’arme nucléaire, la guerre froide, les relations entre la maison blanche et le Kremlin, non sans rappeler l’affaire des missiles de Cuba) et de rendre ses propos encore puissant aujourd’hui, il s’attaque aussi à l’influence grandissante des machines et de leurs utilisations dans le monde d’après-guerre ainsi que la nature humaine dans ce qu’il y a de pire, à l’image des dialogues de cette première scène suivant le cauchemar initial, avec l’« expert civil » ou encore se le sur les communistes.
Sa mise en scène est nerveuse et efficace, il instaure un climat de plus en plus intense et maintient le suspense de bout en bout, notamment grâce à un scénario très bien ficelé et écrit, à l’image des dialogues et notamment des affrontements verbaux captivant et intense ainsi que la galerie de personnages qu’il met en scène. La tension se fait de plus en plus forte au fur et à mesure que le récit avance. Le traitement est toujours réaliste, il ne tombe pas dans le sentimentalisme niais et bien au contraire propose un traitement dur.
Comme souvent chez Lumet, la direction d’acteurs est irréprochable et ces derniers le lui rendent bien. Henry Fonda se donne à fond dans son rôle, lui qui était partisan de Kennedy qui sera assassiné peu de temps après la fin du tournage. Les seconds rôles tels que l’inquiétant Walter Matthau et Dan O’Jerlihy sont impeccables.
Lumet est aujourd’hui célèbre pour des films comme 12 Hommes en colères, Network ou encore Serpico, c’est dommage que celui-là soit aussi peu cité, il est pourtant très bon, captivant de bout en bout, très bien réalisé, écrit et joués.