À la poursuite de demain (bon cette fois j'avoue que les traducteurs ont une bonne excuse pour ne pas avoir gardé le titre original mais était-ce si difficile de traduire par Le Monde de Demain comme l'ont fait les québécois?) est un pari plus que risqué pour les studios Disney. Il s'agit en effet de leur nouvelle production Live originale qui est censée faire oublier les échecs durs à encaisser de John Carter et Lone Ranger, Naissance d'un Héros. Et qui dit Disney, dit gros budget à 190 millions de $. Autre chose intéressante qui me donnait d'avance envie d'aller voir ce film au cinéma, c'est le nouvel essai des studios à la science-fiction. Un genre qu'ils ont notamment expérimenté avec le désormais culte Tron et sa suite Tron: L'Héritage (hâte à Tron: Ascencion d'ailleurs) et le totalement méconnu Le Trou Noir. Mais là où le film semblait vraiment se démarquer c'était sur son sujet. Tout semblait se dérouler dans une ambiance faisant beaucoup rappeler les films de science-fiction des années 70-80's. Un peu comme Super 8 lors de sa sortie en 2011. Le projet Tomorrowland semblait alors comme un hommage à ce vieux style. Et quel plaisir ce fût de voir Brad Bird à la direction de ce nouveau Disney Live. Tout semblait bien parti pour nous pondre un film marquant. Malheureusement, le film a subi le même accueil critique que John Carter et côté box-office, ça n'a pas l'air pour le moment très rassurant. Un peu chiant pour moi qui étais ultra-excité de voir ce film, j'en attendais le nouveau Vingt Mille Lieues sous les Mers! Qu'en est-il au final? Et bien, je résumerai À la poursuite de demain comme un film imparfait, très imparfait mais dont les qualités m'ont complètement séduit. Un peu à la manière de Tron: L'Héritage. Parlons donc des acteurs. On sera surpris de voir que seulement deux stars figurent au casting, ce qui n'arrange rien pour la promo du film. Notre héroïne est donc interprétée par Britt Robertson, une actrice peu connue, qui se charge de jouer Casey, une adolescente douée en science et en raisonnement partant toujours sur un ton optimiste et croyant en un avenir meilleur. On évite fort heureusement le cliché de la jeune fille parfaite rapidement tête-à-claque. Le personnage qui nous est proposé est en vérité très attachant. Cela est surtout dû au fait que l’actrice en question est excellente. Chance, aucune grosse ficelle pour qu’on s’attache au personnage (la mère n’est jamais présente dans le film et n’est jamais mentionnée), son caractère plaisant et sa ténacité suffisent à la rendre très appréciable. Une très bonne chose également concernant son exploitation car il faut bien le dire, on est heureux de voir que pour une fois,
ce n’est pas le protagoniste du film qui sauve tout le monde.
George Clooney arrive pour la première fois dans un film Disney et ça fait vraiment plaisir de voir l’acteur se prêter au jeu. Son personnage de Frank Walker, ancien inventeur d’exception devenu une fois adulte ronchon et peu amical, est lui aussi très attachant. Et son duo avec Casey le rend encore meilleur. Ce n’est pas la première fois pourtant qu’on assiste à une équipe d’un jeune optimiste et d’un vieux grincheux mais dans le contexte du film, ça marche très bien et on n’a jamais l’impression d’avoir un sentiment de déjà-vu. Ou du moins, pas au point que ça soit dérangeant. Clooney nous livre bien sûr une excellente performance comme à son habitude avec la classe naturelle qui lui est due. La révélation du film, outre Britt Robertson, est la jeune Raffey Cassidy. Elle interprète Athena, une petite fille mystérieuse qui semble avoir plus de connaissances que n’importe qui dans ce monde et plus d’une surprise à montrer à notre héroïne. L’actrice s’en sort remarquablement bien, ne tombant dans le surjeu ce qui n’était pas gagné vu que
son personnage se révélera être un robot programmé pour rechercher les futurs petits génies.
Elle vient compléter le trio déjà formé avec Casey et Frank ce qui apporte beaucoup de fraîcheur à cette équipe. On les suit avec grand plaisir. Hugh Laurie est la seule star avec George Clooney à figurer au générique. 20 ans après sa première collaboration avec Disney (si, si, rappelez-vous, Jasper dans Les 101 Dalmatiens c’était lui), l’acteur revient cette fois endosser le rôle de l’antagoniste : David Nyx. Et si le comédien est plutôt bon, on ne peut pas en dire autant de son personnage dont les motivations sont si confuses et le comportement si étrange que ce méchant finit par manquer de personnalité malgré qu’on tente de masquer ses faiblesses. Mais ce point mérite à lui tout seul d’être traité dans la partie scénario. Ce sont donc les seuls acteurs à occuper une place importante dans ce film et tous s’en sortent avec les honneurs avec des performances très sincères et des personnages attachants. L’association entre Brad Bird et Michael Giacchino nous fait rêver depuis bien des années. Notamment grâce aux excellentes musiques de Les Indestructibles et Ratatouille, deux chefs-d’œuvre cultes de chez Pixar. Le travail de Giacchino pour Mission Impossible : Protocole Fantôme était lui aussi de bonne qualité. Pour À la poursuite de Demain, le compositeur n’a pas chômé et nous sert une fois de plus un travail de très bonne facture. Si ce n’est pas sa meilleure bande-originale, le thème principal revient souvent au cours du film pour nous happer d’avantage dans ce monde merveilleux qu’est celui de Tomorrowland. Des compositions complètement dans le ton des 80’s qui correspond encore mieux à l’ambiance du film. C’est super ça non ? Et lorsqu’elle est placée sur les images sublimes du long-métrage, ça nous offre de grands moments particulièrement mémorables. Le plus marquant étant sans aucun doute
la découverte de Tomorrowland par Casey. Toute la scène est un énorme plan-séquence tout simplement bluffant. On est transporté avec l’héroïne dans ces paysages urbains d’une ampleur et d’une précision à en faire baver plus d’un. Certains pourront dire que ça fait un peu trop jeu vidéo mais c’est un peu le but, nous sommes censés tourner la tête dans tous les sens et nous agiter pour voir toutes les richesses de la ville, ce que fait Casey,
et ce qui est magnifiquement retranscrit par la mise en scène presque irréprochable de Brad Bird. Les mouvements de caméra sont fluides, nous font naviguer là où il faut, rendent les décors plus beaux qu’ils ne le sont déjà, bref, une preuve de plus que Disney accorde bien plus de liberté artistique à leurs réalisateurs qu’on ne le pense. Visuellement, c’est la première fois depuis Lone Ranger, Naissance d’un Héros qu’une production Disney Live ne m’a jamais « gêné » au niveau du numérique. Ça ne veut pas dire qu’un film comme Maléfique était mal fait au niveau des effets spéciaux, loin de là, mais on sentait toujours qu’on avait droit à plein de fonds verts tout partout. Là où dans À la poursuite de Demain, j’ai rarement eu le sentiment de « me faire avoir » par des trucages grossiers. Les effets spéciaux sont très soignés (190 millions de $ de budget en même temps ! ) et permettent une immersion totale dans cet univers fantastique. La photo est parfaite ! Elle sait alterner les couleurs un peu sobres du monde réel avec celles très piquantes de Tomorrowland. Et c’est un vrai régal à l’œil. Le scénario, contrairement à beaucoup de films de la Compagnie, est en fait tout ce qui m’intéressait dans ce film. Parce que c’est là que À la poursuite de Demain s’avère réellement intéressant pour un fan et se démarque : Il agit presque comme un film-hommage à Walt Disney. Rien que l’origine-même de la production du film, il s’agit de prendre ce qui était au départ une attraction de DisneyWorld pour la placer au centre d’un film de science-fiction. Le tout avec les design et les idées qu’avaient en tête Walt Disney pour créer E.P.C.O.T., un véritable centre de recherches et de développement pour le Futur (qui malheureusement n’a jamais eu lieu). Et cela, on le comprendra dès le début du film. Pourtant, ça ne commence pas super bien.
L’introduction part immédiatement sur Casey et Frank qui ont fini de vivre leur aventure et qui racontent tout au spectateur à travers un flash-back. Et le discours de Frank sera interrompu 3, voire même 4 fois par Casey dans la narration en voix-off. Ce qui devient rapidement saoulant en plus d’être déjà-vu. Fort heureusement, ça ne dure pas et on constate dès la première scène en flash-back l’hommage que constitue ce film. Il commence en 1964 lors de la Foire Mondiale de New York. La même année, au même endroit, Walt Disney récoltait les fonds pour le projet E.P.C.O.T..
Super, le film vient à peine d’installer ses décors que je commence déjà à baver. Et le film est rempli à ras-bord de ce genre d’anecdotes ou de références. Outre les costumes évidents des personnages Disney pendant la Foire, on remarquera d’autres détails dans le film comme
l’intérieur de la capsule qu’utilisent Casey, Frank et Athena pour traverser le cosmos qui possède le même style que celui du Nautilus de Vint Mille Lieues sous les Mers, les design de certains vaisseaux aériens de Tomorrowland faisant échos aux modèles de Disneyland utilisés dans les parcs d’attraction à partir des années 50’s, le magasin dans lequel Casey se retrouve qui contient des références à Star Wars par ses costumes de pilote d’Un Nouvel Espoir, ses gros modèles de R2, à Toy Story avec la présence de la figurine de L’Infâme Empereur Zurg (j’adore citer le nom complet, petit fantasme à moi, cherchez pas à comprendre), à Le Trou Noir avec le comptoir où Casey pose son pin’s et où est dessiné le robot Vincent du même film etc
… Et il faut le dire, tous les messages du film sont ceux que le Tonton Walt nous a enseigné il y a plusieurs décennies. Juste qu’il faut simplement rêver, imaginer, croire que rien n’est impossible etc… des leçons qui ont leur place dans ce film rien que par son aspect qui le rend plus agréable : L’optimisme. Tomorrowland est un monde utopique où tous les habitants cohabitent et créent chaque jour de nouvelles merveilles. Alors que nos derniers blockbusters nous proposent souvent dans le thème de la science-fiction des univers sombres avec une vision pessimiste du Futur de l’Humanité, il a fallu que les studios Disney rétablissent l’équilibre avec un film très vieux jeu et old school. Et bon sang que ça fait du bien par les temps qui courent! Rien que pour ça, ce film doit être vu! Mais alors que les deux premiers tiers de l’aventure sont en soit bien écrits et très divertissants malgré quelques imperfections (
sérieux, le magasin se fait bombarder de l’intérieur, y a personne dehors qui remarque quoi que ce soit?!)
, le derniers tiers est par contre bien moins réjouissant. C’est ironiquement la partie que l’on attendait le plus.
L’arrivée à Tomorrowland.
Dès lors, le scénario devient très faible et confirme une chose : Damon Lindelof est bon pour avoir des idées mais pas pour les développer. Et à ce niveau, À la poursuite de Demain est un excellent exemple tant on ne comprend plus rien au fonctionnement de ce monde. Par exemple,
si les Nec plus ultra ne sont plus admis à Tomorrowland, que la Cité n’accepte plus personne et que tous les accès pour y pénétrer son verrouillés depuis La Terre, à quoi ça sert de laisser des androïdes sur la planète sachant que notre monde est condamné et que tous les accès sont bloqués depuis plus de 30 ans??!! Et si c’est parce qu’ils savaient qu’il existait un dernier moyen à travers la Fusée en plein centre de La Tour Eiffel pour aller jusqu’au monde de Tomorrowland, pourquoi ne pas avoir détruit cette Fusée??!! Et d’ailleurs, si personne ne vieillit à Tomorrowland (comment exactement je n’en sais rien), pourquoi est-ce que quand Frank s’est tiré, il était devenu plus vieux ??!! Tous ceux de Tomorrowland ne sont-ils pas des êtres humains pourtant??
Bref, pas la peine de vous faire un dessin. Il est impossible de piger comment cet univers fonctionne et les incohérences se multiplient rapidement. Le passage le plus marrant étant celui où Nyx doit justifier le fait qu
’il veuille laisser La Terre s’autodétruire.
C’est là qu’on remarquera qu’avec ce genre de méchant, il y a toujours deux solutions. Soit, ils règlent leurs explications à travers des mots simples qui rendent leurs intentions encore plus stupides, soient ils nous balancent un speech interminable où le scénariste espère que le spectateur se dira « Pfiou ! C’est long ! Je ne comprends plus rien à ce qu’il dit ! Ah ? Il a fini ? Bon ben je suppose que ce sont des bonnes motivations pour que ça soit aussi long. » Nyx fait parti de cette deuxième catégorie. Le film se force alors à tomber dans un climax d’action sans vouloir insister sur cet aspect pourtant. C’est comme si, soit il ne s’assumait pas, soit il était perdu au niveau du genre. Et c’est dommage d’arriver à une telle déception pour le final car pour le reste, l’histoire se tient assez bien. C’est très sympathique de
voir que le pin’s de Tomorrowland peut être donné à chaque personne quelque soit sa profession ou son rêve, du moment qu’il croit. Cela justifie les costumes ou décors particuliers de Tomorrowland. Tout ce monde n’est qu’un terrain d’entraînement pour les génies de Demain. Le film a beau être un peu trop moralisateur dans sa révélation avant le climax (la fin du Monde),
il parvient à se recentrer rapidement sur son vrai sujet. Le tout avec un humour convaincant. En conclusion, À la poursuite de Demain est un film que je vous recommande chaudement. Il va diviser comme beaucoup de Disney Live sortis récemment, mais ce nouvel essai de Disney à la science-fiction est tellement ambitieux, sincère et frais qu’il serait dommage de s’en priver. Je préfère que les studios nous fassent des films imparfaits mais qui tentent des choses comme À la poursuite de Demain plutôt que nous pondre tous les ans une réadaptation d’un Classique. Espérons que le film aura un bon bouche-à-oreille et ne sera pas oublié. Je le maintiens, c’est un divertissement de qualité. Imparfait, mais de qualité.