Avant d'envisager un visionnage de "Un Voisin trop parfait", potentielle purge avec Jennifer Lopez, autant s'attarder sur une autre catastrophe de la filmographie de Rob Cohen, "Alex Cross". Troisième apparition sur grand écran du célèbre détective créé par James Patterson après "Le Collectionneur" (aah l'époque où des producteurs croyaient en la carrière d'Ashley Judd) et "Le Masque de l'araignée". Cette fois plus de Morgan Freeman dans ce fameux rôle mais un étonnant choix : Tyler Perry, célèbre acteur "comique" dont le succès n'a jamais dépassé les frontières américaines. On sent donc une volonté de rajeunir le personnage, d'ailleurs le film s'inspire plus que très librement du livre "Cross" où il n'est encore qu'un détective de la criminelle. Pourquoi pas après tout, l'intention est louable, relancer une saga de films où l'on suivrait un même détective dans différentes affaires, ça n'est pas arrivé depuis un moment. Sauf qu'après à peine quelques minutes du long-métrage, on se met très vite à espérer que ce ne sera pas le cas.
C'est quand même complètement dingue... Dingue que, lors des longues journées de tournage, personne sur le plateau ne s'est écrié : "Oh, les mecs, on est en train de faire n'importe quoi, on n'a pas de scénario par contre il y a un type qui filme comme dans les pires thrillers des années 90 et un autre affligeant dans le rôle principal, en plus on a engagé Jean Reno !! N'importe quoi, je vous dis ! On arrête tout, on ne va pas présenter ça à des gens tout de même !"
Désolé, petit bonhomme imaginaire mais personne ne t'a hélas écouté...
Après un quart d'heure de film, c'est bien simple, on ne sait toujours pas où on va, jamais un très bon signe ça. Une poursuite à pied avec les policiers pour nous les présenter, une scène familiale avec le héros et un petit combat de celui qui va être le "grand" méchant de l'affaire, le tueur à gages interprété par Matthew Fox (on revient sur lui plus tard car sa prestation mérite bien un paragraphe à elle-seule) mais pas un semblant d'intrigue, rien de rien, nada.
Encore mieux, quand celle-ci démarre après un quadruple meurtre (il fallait au moins ça pour réveiller le spectateur), c'est encore pire car entre vraiment en scène Tyler Perry. Si Morgan Freeman dans les précédents films avait cette aura naturelle pour nous faire avaler n'importe quelle déduction invraisembable de son personnage sans broncher, son remplaçant dénué de tout charisme semble revivre les scènes de crime comme s'il y était, capable de décrire les agissements du tueur comme par magie quitte à friser le ridicule. Même son partenaire lui demandera "Comment sais-tu qu'il n'y a qu'un tueur ?" - réponse : "Il n'y en a qu'un.", ok, d'accord, pas de souci. Et puis, au-delà de ça, le jeu de Tyler Perry ne va cesser de s'enfoncer dans le pathétique et va même devenir involontairement hilarant quand son personnage va subir un drame. En effet, alors que l'enquête semble se diriger vers les commanditaires du tueur à gages, ben non en fait, suite à un incompréhensible n'importe quoi, ce dernier va choisir de s'en prendre à l'entourage des flics.
Mais oui, souvenez-vous, il y avait une scène familiale au début , c'était pour mieux nous préparer et nous attacher à ces personnages au cas où un potientiel drame survienne, qu'est-ce qu'ils sont malins, hein ?!? On ne l'avait pas vu venir à des kilomètres..
S'ensuivra alors du néant filmé avec une fainéantise comme rarement vu où l'on s'imagine que des types qui tirent dans des vitres au ralenti en se jettant à terre est encore une scène d'action originale, où l'on surprendra des acteurs (que l'on aime pourtant) venus tourner pour boire des coups entre potes (Edward Burns, Rachel Nichols, Giancarlo Esposito ou John C.McGinley (le Dr. Cox de Scrubs)), où Jean Reno viendra nous régaler d'une de ses prestations ridicules dont il a le secret dans les films US (encore qu'elle est loin d'égaler celle de Maître Marcel dans "Thérapie de Couple") et où, enfin, comme on n'a plus rien à perdre, on fera n'importe quoi du personnage d'Alex Cross en le transformant en Punisher assoiffé de vengeance. Bref, un spectacle affligeant où rien ne parviendra à fonctionner s'enfilant dans tous les plus mauvais lieux communs.
Mais, tout ça ne serait rien sans l'incroyable et inexplicable prestation de Matthew Fox. Le célèbre Jack de "Lost", amaigri pour les besoins (mais lequels ?) du rôle semble croire qu'il offre l'interprétation de sa vie (tu as lu le truc qui servait de scénario avant, mon gars ?) et part dans un trip totalement incompréhensible et tellement hallucinant qu'il en deviendrait fascinant. Déjà rien que son rôle est à mourir de rire : un tueur à gages visiblement hyper-méthodique mais qui prend le temps après ses meurtres de faire un dessin au fusain de ses victimes (tranquille, quoi) en y laissant des indices de ses prochaines cibles (ben oui, plus facile à arrêter comme ça). Il a aussi un petit côté hystéro-frappa-dingue car, quand il s'énerve en criant, ça fait plein de petits carrés de lui à l'écran donc c'est qu'il n'est pas très net. Visiblement possédé, Matthew Fox tente on-ne-sait-pas-trop-quoi, et on ne le saura probablement jamais, mais donne envie de l'emmener au centre de désintoxication le plus proche.
Voilà, voilà, un truc à voir absolument, quoi !