La conception du Peintre, personnage central de cette histoire, a été retirée de plusieurs influences des années 1930 (quand la peinture n'était pas encore abstraite), ce qui a permis aux spectateurs de mieux s'identifier aux personnages. Le réalisateur Jean-François Laguionie et son équipe ont défini un protagoniste "influencé par Matisse ou Derain, Bonnard pour sa palette, Gaudi pour les décors."
Pour ce film d'animation en 3D portant sur la peinture à l'huile, l'équipe de création était consciente des difficultés issues du mélange d'images et de textures. Il a été décidé de réserver aux décors un cadre plus réaliste, fait d'images de synthèse, alors que les personnages s'approchent de l'image d'une peinture à l'huile.
Avec la hiérarchie de pouvoir entre ses personnages, Le Tableau s'affiche comme une métaphore de l'enfance. Après tout, le rapport entre les êtres "pas encore terminés" et ceux "pleinement dessinés" évoque la relation entre enfants et adultes, ces derniers estimant avoir un savoir plus développé que les premiers...
Bien que l'histoire des dessins qui sortent du tableau relève clairement de la fantaisie, le réalisateur Jean-François Laguionie tenait à ce que la narration soit vraisemblable et appuyée sur des faits réels. Place donc à un studio de peintre très réaliste, aux voix de personnages évitant toute caricature et à une composition musicale directement inspirée des années 1930.
C'était en 2004, pendant la réalisation de son précédent long-métrage, L' île de Black Mór, que Jean-François Laguionie a présenté aux producteurs Armelle Glorennec et Eric Jacquot le projet du film Le Tableau. Suite à l'intérêt de ces derniers, un long travail a commencé à émerger, initialement avec le scénario, ensuite le story-board, l'animatique, la recherche graphique, etc. Jusqu'à la conclusion de l'œuvre en 2011.
Passionné de l'animation à l'ancienne, développée par des équipes réduites, Jean-François Laguionie passe en moyenne huit ans sur chacun de ses projets. Depuis 1979, il n'a travaillé "que" sur quatre films d'animation, tous primés en France et à l'étranger : Gwen, le livre de sable (1985), Le Château des singes (1995), L' île de Black Mór (2003) et Le Tableau (2011).
Pour Le Tableau, Jean-François Laguionie a rassemblé une équipe très expérimentée, responsable de quelques-uns des plus grands succès français (et belges) de l'animation contemporaine. La scénariste Anik Le Ray avait travaillé entre autres sur L' île de Black Mór, L' Oiseau Do et Kérity la maison des contes, l'assistant réalisateur Rémi Chayé a contribué à Brendan et le secret de Kells et Jean Palenstijn fut le chef décorateur de L' île de Black Mór et a participé à la création des décors dans Mia et le Migou, aux côtés du chef décorateur Gaël Brizou.
Pendant son passage au Festival d'Angers 2009, Jean-François Laguionie voulait présenter les premières ébauches du Tableau, afin d'avoir la réaction du public. Après l'exhibition aux spectateurs du festival, le réalisateur a organisé une deuxième séance... Dans le CHU local, auprès des enfants hospitalisés. Une bonne manière de toucher également des spectateurs qui ne peuvent pas toujours se déplacer au cinéma.
Jean-François Laguionie est à l'origine de presque tous ses projets, depuis les premiers courts-métrages qu'il fabriquait seul, avec du papier découpé, au début des années 1960. Seuls deux films ont été commandés par un producteur italien : un conte corse et un conte breton, intitulés Potr' et la fille des eaux et Le Masque du diable.
Malgré le succès de ses long-métrages, Jean-François Laguionie soutient que ses meilleurs films ont été les courts-métrages du début de sa carrière, plus rudimentaires en termes techniques, parce que dans ce cas, "on est sûr d'être dans l'émotion". Il est même persuadé que "les meilleurs films d'animation, ce sont toujours les courts-métrages".