The Truman Show pousse loin les curseurs du voyeurisme. On croise la télé-réalité à la vidéosurveillance, façon 1984, dans un feuilleton suivi par des milliers de spectateurs, et scénarisé, depuis la naissance de Truman, par un Big Brother en chef.
Truman est un individu exploité à ses dépens, bouffon sur les bords, peinant à se rendre compte, par lui-même, de la prison où il se trouve.
Une amie l'éveille à la farce dont il est le dindon. C'est seulement après cette prise de conscience qu'il entreprend, seul contre tous, de fuir ce simulacre
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Qu'on interprète cette fuite comme une résistance contre l'oppression, contre l'emprise médiatique ou contre le patronat ne nous sert à rien, puisqu'on ne voit pas la suite des événements.
Le "vrai monde", qu'il rejoint ensuite, est-il plus vrai et moins aliénant que la fiction qu'il a quittée ? Son émancipation apparaît comme une démarche individualiste, décidée ex abrupto, en dépit d'un objectif concret, d'une espérance. Truman fuit pour fuir ; ou, au mieux, pour ne plus être une marionnette du divertissement
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Le choix de confier ce rôle à Jim Carrey lui donne l'occasion, via ses pitreries habituelles, de dévoyer le registre du film. Pourquoi pas. Cela étant, Weir n'embrasse pas non plus le registre parodique, et prend le risque, faute de maîtriser son sujet, de funambuler entre les genres ; et par conséquent, d'aboutir à une œuvre transgenre inachevée.