Eric et Ramzy signent avec Halal police d'état leur quatrième scénario de long métrage, après La Tour Montparnasse infernale, Les Dalton et Seuls Two.
Ramzy Bedia évoque ce qui l'a inspiré en premier lieu pour Halal police d'état : "C'est d'abord un clin d'œil aux programmes télé que je regardais dans mon enfance : quand je retournais au bled, en Algérie, il n'y avait que "l'Inspecteur Tahar", une série policière très populaire à l'époque (...) ! D'ailleurs on s'est surtout inspirés de l'épisode "L'Inspecteur Tahar et l'apprenti", qui a eu énormément de succès en Algérie".
"Comme pour tous nos autres films : on s'est enfermés dans une pièce avec des smoothies framboise-banane, et on s'est mis au travail (...)", raconte Ramzy, "on travaille sur une machine à écrire, et pas sur un ordinateur. On tape nos textes avec deux doigts, à la Colombo !"
L'idée principale du film était de parodier les américains, comme l'explique Eric Judor : "Ce qui nous amusait dans le scénario, c'est qu'on prenait le contrepied des polars américains où, en général, on attribue un partenaire au héros qui n'en veut pas parce qu'il veut remplir sa mission seul. A l'inverse, dans notre film, Nerh-Nerh, qui devait être envoyé en mission tout seul, gueule pour avoir un partenaire. On adore créer ce genre de décalage qui est vraiment dans notre nature à tout déformer... "
Ramzy avait une bonne excuse : "Je tournais un film avec ma femme juste avant (Il reste du jambon ?, NDLR) et, du coup, je n'aurais pas eu le temps de préparer Halal". Eric ajoute : "Et moi, je faisais de la musculation et du Pilate ! La beauté berbère, quoi !"
Rachid Dhibou a commencé en travaillant comme cadreur et réalisateur de making-of pour Luc Besson et sa société Europa Corp.. Il raconte : "Un jour, il m'a proposé de participer à un casting de réalisateurs sur un prochain long métrage, sans me dire de quoi il s'agissait. Quand je suis arrivé au rendez-vous, j'ai découvert que c'était le dernier projet d'Eric et Ramzy ! Je leur ai parlé de mon goût pour la comédie et de ma vision de l'univers blédard et ils m'ont choisi... "
On peut légitimement se demander comment un réalisateur peut gérer Eric & Ramzy, qui se connaissentt depuis des années, et qui sont habitués à travailler ensemble. Rachid Dhibou a bien vécu sa rencontre avec le duo : "(...) on peut toujours discuter avec eux. Ils n'étaient pas systématiquement d'accord avec moi, mais constamment ouverts au dialogue. (...) Ce sont de vrais pros qui adorent se marrer en permanence. Quand on tourne une comédie, c'est génial parce qu'ils savent installer une atmosphère propice au rire. Dès le matin, ils s'envoient des vannes pour tâter le terrain et se "tester". Cela peut sembler ingérable, mais ils maitrisent leurs personnages de A à Z".
Comme l'explique le réalisateur : "Souvent, les dialogues étaient révisés le jour même, notamment parce que Ramzy devait parler une sorte de mix entre français et arabe, ponctuée d'expressions typiquement blédardes. Comme par exemple, un "système d'écoutage"... Tous les jours, un certain Saïd Ait Madi arabisait le texte de Ramzy".
Eric Judor ironise sur le côté politique du film : "C'est important d'essayer de faire passer quelques messages (...). Étant donné qu'on vit en France, on perçoit et on ressent plusieurs choses qui nous choquent parfois et qu'il est important d'exprimer à notre manière, sans réellement les dénoncer. Mais on les dit quand même. Malgré les têtes qu'on s'est inventées pour nos personnages, c'est sans doute notre film le plus engagé et politique ! (rires)"
Eric commente l'attaque systématique des chinois dans les films du duo : "On essaye de mettre en garde le monde parce que d'ici dix ans, nous serons tous chinois et il sera trop tard (...)". Ramzy renchérit : "S'agissant des autres communautés, on souhaitait faire un film pas du tout politiquement correct. Ce qui fait qu'on est allés au bout de notre logique et qu'on s'en est pris à toutes les communautés : les Noirs, les Arabes, les Juifs !"
Le réalisateur justifie le choix de la comédie pour dénoncer le racisme : "La communauté maghrébine est trop souvent représentée sous forme de délinquants qui brûlent des voitures - mais il faut qu'elle soit aussi associée à des comédies ! C'est aussi pour cela qu'on a renversé les codes habituels et que, dans le film, la police française est sur la piste de la mafia chinoise, tandis que les policiers algériens soupçonnent un groupe extrémiste catholique".
Le tournage a parfois été perturbé, notamment par une météo capricieuse. Le réalisateur détaille : "Par exemple, on avait prévu de tourner la rencontre entre Hilguegue et Nerh-Nerh au Sacré-Cœur, dans un pur style de comédie romantique américaine, en jouant sur le côté glamour des deux personnages. Mais malheureusement, il a plu ce jour-là et on a dû trouver une solution de dernière minute : on a acheté deux ponchos jaunes de la ville de Paris à Montmartre et on a tourné la rencontre entre Hilguegue et Nerh-Nerh habillés en poncho ! Du coup, ce "déguisement" a contribué à l'effet comique de la scène et leur a fait deux têtes hallucinantes".
Le tournage a eu lieu en partie à Barbès et dans ses alentours. Rachid Dhibou se souvient d'un moment: "Tout s'est bien passé, même le vendredi 18 juin où avaient lieu en même temps le fameux apéro "saucisson-pinard*" et le match Algérie-Angleterre. On tournait ce jour-là une scène de prise d'otage avec des voitures de police et on nous a dit qu'on prenait un risque maximum. Mais tout s'est bien passé : les habitants du quartier nous ont très bien accueillis et l'ambiance était très festive".
* Un apéritif organisé via le réseau social Facebook par des particuliers pour protester contre ce qu'ils présentaient comme "l'islamisation de certaines rues du XVIIIe arrondissement". Ce rassemblement fut interdit à l'époque par la préfecture de police.
Dans la maison de Nerh-Nerh, on peut voir deux photos de la série originale "L'Inspecteur Tahar", dont le film est inspiré.
Le film a été tourné à Paris et au Maroc, plus précisément dans le quartier d'Essaouira, pour sa ressemblance avec la ville d'Oran. Ville portuaire, Essaouira est connue pour sa fraicheur, contrairement à beaucoup d'autres villes du pays. Elle a été exploitée au maximum pour le film : la sortie de la ville, son lac, son désert, un village.
A la question d'offrir une suite aux aventures du Kabyle et de Nerh-Nerh, Eric Judor déclare : "Oui, on y réfléchit. On retrouvera Nerh-Nerh à Dubaï dans l'opulence !". Ramzy précise déjà : "On sera en Ferrari et en yachts. ça nous changera".
Luc Besson produit Halal police d'Etat, via sa maison Europa Corp. C'est lui qui a proposé au duo d'acteurs des noms de réalisateurs pour le film, dont celui de Rachid Dhibou.
Il s'agit du premier film de Rachid Dhibou.
Le duo Eric et Ramzy joue pour la dixième fois ensemble dans un même film depuis leur apparition dans Recto / verso de Jean-Marc Longval en 1999.
En parallèle à la sortie du film, une bande-dessinée a été lancée intitulée Halal, Police d'état. Elle est scénarisée et dessinée par Alf Bart, dont c'est la première œuvre de fiction. Elle devrait être un one shot, et ne pas devenir une série.