Bon, Eboué/Ngijol au programme, ce soir, à l’instant même où sort en salle leur dernier rejeton « Le Crocodile du Botswanga », ça me semblait un peu « gros »… Les temps modernes, quoi ! Faut que promo se fasse…
Et pourtant, l’Eboué, je le trouve plutôt marrant avec ses vannes qui valsent sur la corde raide entre crapulerie et « chiche que j’la fait » d’adolescent pour nous pointer avec acidité quelques travers bien d’cheu nous…
La curiosité a été la plus forte et, quoi qu’aussi lourde que soit ma paupière en ces temps d’intense diffusion virale, je me posais devant la pâle fenêtre d’où devait surgir « Case départ » calé entre de multiples coussins et un grog à la main…
Bien m’en pris !
« Case départ » est un film alerte, bien tourné, rythmé, soutenu par des dialogues percutants et intelligents… On ne s’ennuie pas un instant. On rit beaucoup. On apprend beaucoup aussi.
Le parti pris est risqué : traiter de l’esclavage sur le ton de la comédie… Casse cou !!!
Mais Fabrice Eboué et Thomas Ngijol ont réussi ce pari fou… Usant de l’auto-dérision et d’un humour brut de décoffrage mais visant juste ils montrent, et avec quelle force, qu’à trop vouloir être « intégré » dans notre monde actuel, on finit tous par oublier ce qui, dans notre histoire, nous a construit…
Les deux héros du film sont perclus par cette amnésie sur leur origine. Pire, ils ne veulent pas en entendre parler! Que ce soit Régis (Eboué) le « nègre blanc » adjoint municipal faisant des ronds de jambe à un maire réac aux propos racistes ou Joel (Ngijol) râleur qui considère que ce sont les préjugés racistes des français qui le maintiennent dans l’exclusion .
On a comparé « Case départ » au naveton « Les visiteurs »… Seul point commun cette remontée dans le temps qui les fait « atterrir » en l’an 1780 aux Antilles !
Les deux « héros » vont découvrir à leur dépens le monde étrange de ces petits blancs prétentieux, méprisants, cruels implantés loin de la métropole pour qui un « nègre » est juste un sous humain, une machine, un « bon à tout faire » (on fait allusion dans le film au « code noir » qui justifiait les sévices corporels, affirmant que les esclaves « sont meubles » (des biens) comme sont considérés aujourd’hui les animaux !!!
Le film expose, explose devrais-je dire, dans le rapport maître-esclave soutenu par une verve critique et satirique toute molièresque…
Ailleurs l’action se pare de la fantaisie burlesque avec de gros clins d’œil anachroniques qui sont le sel de cette histoire…
Dans le marasme de la critique où les mêmes qui attribuent cinq étoiles à n’importe quelle sous-merde d’un Michael Youn et qui ont fait la fine bouche à ce premier opus des deux humoristes, je suis heureux d’avoir découvert non pas un chef-d’œuvre absolu mais un film honnête dans son propos.
UNE COMEDIE QUI TIENT LA ROUTE ET QUI M’A BIEN FAIT RIRE