En juxtaposant, selon un traitement méticuleusement identique, les différents genres d'images, le réalisateur cherche à provoquer un questionnement sur la valeur de l'image. Johan Grimonprez, artiste plasticien de formation, choisit ainsi volontairement d'associer images d'oiseaux et de bombes sans toute autre forme de procès, renvoyant ainsi le spectateur vers sa propre logique...
S'il y a une ombre de profil que tout le monde reconnaît, c'est bien celle du maître Alfred, popularisé notamment par son émission-phare "Alfred Hitchchock Présente" qui avait de lui un personnage télévisuel incontournable aux yeux du public américain. Ici cette ombre est matérialisée, et l'habituel caméo duquel le réalisateur était friand dans ses productions, se transforme en un habile jeu entre les différentes facettes du personnage. La présence du double est bien sûr capitale et le montage met en place, comme dans ses films, des présences fugitives, tels des ombres du double personnage qu'il devient dans un monde qui devient théatre de son plateau. Envahissant un espace visuel sans fin, il recrée ainsi sa propre émission à l'échelle du monde..
Il est difficile de ne pas penser musique et particulièrement Bernard Herrmann quand on évoque les montages des films d'Alfred Hitchcock, lui le premier à théoriser et mettre en pratique l'art de manier le suspense à une partition adéquate. Le soin apporté à cette composition était donc essentiel et c'est le compositeur allemand Christian Halten qui fut chargé de construire la structure musicale, en étroite collaboration avec les monteurs Dieter Diependaele et Tyler Hubby.
On retrouve dans ce film certains enjeux auxquels le réalisateur aime s'attacher, à savoir comment la télévision manipule les foules, effraie et brouille la frontière entre réalité et fiction. Ce film reprend d'ailleurs certains principes d'un de ses courts métrages précédant, Looking For Alfred (2005), qui travaillait également le thème de la duplicité en décortiquant les apparitions d’Alfred Hitchcock dans ses propres films, et qui se demandait ce qui se passerait s'il venait à se rencontrer...lui-même.
En retraçant le parcours d Hitchcock à base d'images d'archives, le réalisateur permet également un habile documentaire sur la Guerre Froide, période à laquelle le maître du suspense était à son apogée. Le réalisateur choisit d'organiser la trame de son récit selon les événements qui ont marqué l'histoire, en allant même jusqu'à conserver parfois uniquement les images d'archives en tant que telles. Il crée ainsi un curieux mélange fiction/documentaire dans un même récit d'où l'une des idées principales serait de prouver que la Guerre froide serait en fait une "coproduction" américano-soviétique, destinée à canaliser l'attention des populations.
A la base du récit se trouve une nouvelle de l'auteur argentin J. Luis Borges, intitulée “August 25, 1983” et tirée du recueil The book of sand, sorti en 1975. Spécialiste incontesté de la manipulation du temps, ce film démontre une nouvelle fois la fertilité de son imaginaire, berceau d'inspirations pour de nombreux cinéastes.
Le réalisateur, artiste plasticien de formation, s’est fait connaître en 1997 avec son film dial H-I-S-T-O-R-Y, un documentaire traitant de détournements d’avions, qui pour certains faisait figure de véritable prédiction. Il y étudiait la fascination qu’exercent les piratages sur les spectateurs ainsi que les méthodes ingénieuses – parfois dignes des plus grands cinéastes d’avant-garde – avec lesquelles les medias filment et présentent les actualités.