Brighton Rock est le remake d'un film de 1947 intitulé Le Gang des tueurs, un classique du film noir. Le réalisateur Rowan Joffe a tout d'abord refusé le projet lorsqu'on le lui a proposé : "Je me disais que ce serait un suicide professionnel, d’autant que je n’apprécie pas les remakes."
Brighton Rock est l'adaptation du roman éponyme de Graham Greene paru en 1939. Rowan Joffe a été séduit par le personnage de Pinkie, "à la fois démoniaque et empli d’une maturité candide", et sa relation malsaine avec Rose : "Comme Rose, je suis tombé amoureux d’un obscur et dangereux objet de désir. Sauf que dans mon cas, il s’agit du roman. Et lorsque l’on est amoureux, on se conduit de manière irrationnelle. Mon idée, sans doute un peu folle, était d’écarter le remake, au profit d’une nouvelle adaptation. En effet, si Brighton Rock est une grande oeuvre littéraire, elle appelle, comme les pièces de Shakespeare, différentes interprétations." Pour lui, le roman est avant tout "le portrait d’un jeune garçon au sortir de l’adolescence qui renverse de façon brutale une génération plus âgée de gangsters."
Brighton Rock est le premier long métrage de Rowan Joffe, qui s'était déjà frotté à la réalisation avec des téléfilms. Egalement scénariste, le fils de Roland Joffé (Mission) a signé les scripts de 28 semaines plus tard et The American.
Ce n'est pas la première fois que l'auteur britannique Graham Greene est adapté au cinéma. Fritz Lang (Le Ministère de la peur / Espions sur la Tamise) ou Otto Preminger (Sainte Jeanne) ont notamment porté ses écrits sur grand écran. On peut également citer des films comme Première désillusion avec Michèle Morgan, Le Troisième homme avec Orson Welles, Un américain bien tranquille (en 1958 et en 2002) ou encore The end of the affair (en 1955 et en 1999).
Pendant son travail d'adaptation, Rowan Joffe a décidé de situer l'action de son film en 1964 alors que celle du livre se déroule en 1939. Ce choix s'explique par les évènements qui ont marqué cette année-là : "Toute l’Angleterre était ravagée par une déferlante de jeunes hommes en costumes cintrés, juchés sur des vespas italiennes et qui ont porté au vieil ordre établi de l’avant-guerre (que représentent Helen Mirren et John Hurt) un coup de couteau provocateur. Ils ont inauguré une ère moderne centrée sur la jeunesse", explique le réalisateur. Les années 60 marquent également l'émancipation des femmes qui s'échappent de leur condition passive. Cette évolution est montrée à travers le personnage de Rose. Enfin, 1964 est la dernière année d’application de la peine de mort en Grande-Bretagne. Ce bouleversement entraîne l'apparition de nouveaux gangsters, évoqués dans de nombreux films de genre de l'époque (La Loi du milieu par exemple).
Le film met en scène la confrontation entre deux groupes de la jeunesse britannique, les Mods et les Rockers. Les premiers, hédonistes et optimistes, affichent un look très étudié (costumes sur mesure, polos, chaussures de créateurs italiens, ...) et se déplacent principalement en Vespa. Quant aux Rockers, habillés de cuir noir, se déplaçant sur des motos américaines, ils représentent l'inverse de la nouvelle culture. Les affrontements entre les deux bandes atteignent leur paroxysme en 1964 et se transforment en véritables émeutes.
Nommé aux Oscars pour son travail sur Gladiator et Le Fantôme de l'Opéra, le directeur de la photographie John Mathieson s'est appuyé sur Le Cercle Rouge de Jean-Pierre Melville pour reconstituer l'ambiance des vieux films noirs. Pour cela, il a notamment utilisé des objectifs de 1960 nommés "crystal express".
Révélé par Control où il incarnait le leader charismatique de Joy Division, Ian Curtis, Sam Riley incarne Pinkie, un rôle qu'il rêvait de jouer après avoir lu le livre de Graham Greene à l'âge de 12-13 ans : "Vous vous retrouvez à incarner un individu qui n’est pas particulièrement sympathique, qui porte de magnifiques costumes avec une cicatrice sur le visage, un cran d’arrêt et une bouteille d’acide dans sa poche. J’ai appris à faire du scooter et des tours de pickpocket. Par ailleurs, j’ai toujours voulu tourner dans un film de gangsters avec les cheveux lissés. J’étais aux anges !", raconte-t-il.
Vue dans Be Happy, We Want Sex Equality (deux films où elle côtoie Sally Hawkins) et Never Let Me Go, Andrea Riseborough a été séduite par l'innocence du personnage de Rose : "Sa pureté et son authenticité ne s’expriment pas d’une manière hypocrite, commune ou agaçante. Elle croit profondément au bien", explique-t-elle.
Les deux acteurs britanniques s'étaient déjà donnés la réplique sur les planches dans une pièce intitulée A Month in the Country. Pour jouer Ida, Helen Mirren s'est transformée en rousse flamboyante, avec pour modèles Sophia Loren et Anna Magnani (Rome ville ouverte, La Rose tatouée) pour leur "pragmatisme et [leur] effronterie".
Le chef costumier Julian Day a cherché à appuyer les différents univers qui se confrontent dans le film à travers un jeu sur les couleurs : "La jeunesse, d’une certaine manière, se démarquait par la couleur alors que le vieux Brighton se distinguait par ses tons bruns et verts. Le déclin des vieilles civilisations était en jeu, opposé à l’émergence d’une génération très visuelle et audacieuse. C’est ainsi que j’ai voulu différencier ces univers", explique-t-il.
Malgré son titre, Brighton Rock n'a pas été tourné à Brighton mais à Eastbourne, située sur la côte sud de l'Angleterre. Brighton est en effet devenue trop moderne pour servir de décor à un film situé dans les années 60.
Le rôle de Rose était à l'origine destiné à Carey Mulligan qui s'est finalement désistée pour tourner Wall Street : l'argent ne dort jamais.