Le cinéma de Lumet est très dur à analyser pour un spectateur inattentif. Sa mise en scène paraît presque simpliste, dépouillée, certains diront télévisuelle. Il n'y a rien de plus faux. Sa connaissance parfaite de la grammaire cinématographique. Ainsi, il utilise tous les moyens à sa disposition pour rendre compte d'une situation, avec une grande économie d'effets : peu de musique, peu de mouvements, pas de jeu de vitesse avec la caméra et surtout un découpage qui doit flotter sous les mille plans alors que le film dure plus de 2 heures. (...) De la même façon, Lumet s'approprie le cadre et les effets de lumière pour exprimer par l'image des notions abstraites. Ainsi, le personnage de Frank est régulièrement représenté seul dans le cadre quand il fait face à ses adversaires, afin de mieux rendre compte de sa solitude. Quand la caméra bouge, c'est pour mieux le laisser au 1er plan, flou, quand les autres semblent ligués contre lui au 2nd plan. L'image souligne les paroles et parfois renforcent ces dernières. Pareillement, Frank est parfois représentés au milieu de ses 2 adversaires (Concannon et le juge), comme pris en étau entre le marteau et l'enclume qui veulent l'enfoncer dans sa perdition. C'est cette utilisation de la grammaire de l'image qui fait de Lumet un très grand réalisateur. (...) A mon sens, pour faire un grand film, il faut réunir 3 éléments majeurs : une mise en scène magistrale, des acteurs prodigieux et surtout un scénario maîtrisé. Autant dire qu'avec David Mamet à la plume, on est servi. Cet excellent artisan passe pour être un des meilleurs d'Hollywood dans son domaine. Cet homme du théâtre maîtrise les dialogues et les intrigue complexe comme peu d'autres dans le monde et son sens des dialogues tout comme sa science de la narration lui permet d'enchaîner les longues plages de palabres sans jamais être ennuyeux et tout en restant lisible. Si le montage acéré du film est une aide précieuse, il faut également savoir apprécier les différents monologues du film ou bien certaines scènes de dialogues notamment les scènes de prétoire, qui constituent souvent les vrais morceaux de bravoure du genre. Chaque mot est pesé, chaque phrase doit frappé le spectateur, chaque séquence doit faire avancer l'intrigue. (...) Au final, je dirais que nous voilà devant un grand film tout simplement, porté par une mise en scène éblouissante, avec des personnages attachants, une intrigue rondement menée, un rythme plaisant qui fait qu'on ne s'ennuie jamais tout au long des 2 heures du film avec des acteurs incroyablement justes qui récitent leurs numéros avec un savoir faire qui laisse pantois. On tutoie véritablement le chef d'oeuvre. La critique complète à lire ici