Woody Allen a récemment confessé qu'il jugeait n'avoir jamais réalisé de « grand film ». Ce n'est pas moi qui le contredirai. Toutefois, reconnaissons là une de ses qualités : la lucidité, surtout à propos de lui-même et de sa condition d'artiste. Ah Woody Allen! On retrouve dans «Manhattan» tout ce qui fait le charme de ses films... ou tout ce qui peut exaspérer, selon que l'on soit admirateur ou détracteur du réalisateur new-yorkais. Une fois de plus Allen se raconte, parle de lui encore et encore, véritable clown triste névrosé et (très) bavard. L'humour et l'auto-dérision sont certes omniprésents, mais peinent à compenser le manque de pertinence de l'ensemble, centré sur le cinéaste et son amour pour Manhattan, entre autres. On apprend que Woody Allen aime F. Scott Fitzgerald, Ingmar Bergman (ça n'est pas nouveau, et on lui souhaite d'en avoir enfin un jour le talent), August Strindberg (logiquement), Gustav Mahler, Carl Jung, Groucho Marx, Louis Armstrong, etc. etc. Très bien. Pour le fan, cet exercice de citation peut se révéler intéressant, voire passionnant. Pour le « non-fan » que je suis, cela n'est guère exaltant, et conforte l'opinion selon laquelle «Manhattan» est quelque peu surestimé. Car à part Woody Allen par ci, Woody Allen par là, à part une jolie photographie en noir et blanc et une agréable bande-son, pas grand chose à se mettre sous la dent. Quelques classiques de la comédie romantique : le couple, le sexe, l'infidélité,... Mais bon, tout ça reste léger même si souvent d'un relative justesse. Le public de Woody Allen est donc binaire : on aime ou on aime pas. Cependant quelques uns de ses films parviennent à mettre plus ou moins tout le monde d'accord, à intéresser un minimum la plupart des gens. C'est le cas de «Manhattan». De là à en voir un chef-d'oeuvre, il y a un énorme pas que je ne franchirai pas. Sympathique et mordant, nombriliste et bavard, «Manhattan» constitue un parfait exemple du cinéma de Woody Allen, pour le meilleur et pour le pire. [1/4] http://artetpoiesis.blogspot.fr/