Quelle déception ! Pour une fois, j’avais lu le synopsis avant de visionner ce film, et je dois dire qu’il m’avait fortement attiré. Estampillé comme un drame psychologique sur fond d’enquête policière, l’histoire semblait promettre une visite approfondie des méandres de la psychologie humaine noyée dans les non-dits et les mensonges. Malheureusement, comme le résume parfaitement bien le magazine Première, « Chabrol a exécuté son film avec une grande désinvolture, ratant la plupart de ses personnages ». Cependant je mettrais un bémol sur la première partie de cette phrase, tant Chabrol a voulu se pencher sur l’évolution des personnages. Son désir de bien faire est bien réel, mais il s’y est si fortement penché dessus qu’on a l’impression de perdre plus ou moins de vue le crime odieux sur lequel démarre cette histoire. Dans les faits, l’enquête est toujours là, en toile de fond, mais c’est tout juste si on la remarque. En tout cas, elle s’en retrouve presque reléguée au second plan. Il faut dire que surviennent deux problèmes, et pas des moindres. D’une part on a selon moi une énorme erreur de casting en la personne de Valeria Bruni Tedeschi. La question que je me suis posée en la voyant évoluer, c’est « est-elle vraiment une actrice ? ». Non mais franchement, vous ne trouvez pas qu’elle a tout à apprendre en matière de diction ? On ne comprend pas toujours ce qu’elle dit ! De plus, une personne comme ça, qui ressemble plus à une adolescente pourrie par la timidité et qui, pour faire bonne figure, tente de sourire en toute circonstance, y compris quand il n’y a pas lieu, n’a rien à faire au poste de commissaire. De ce fait, non seulement elle est agaçante, mais en plus elle n’a aucune crédibilité. D’autre part, toujours selon moi, le problème vient d’Antoine de Caunes, ou plutôt de son personnage. Très rapidement, ce dernier prend de la place. Beaucoup de place. Et ma foi, bien que je considère de Caunes comme un piètre acteur, il joue plutôt bien le coup de l’être vil, malsain, du prédateur en quête de sa nouvelle proie, d'un homme perfide qui ne pense qu’à lui, c’est-à-dire sa seule personne et sa notoriété, d'une personne qui se délecte à en mettre plein les yeux quitte à utiliser des citations qui ne lui appartiennent pas. Contre toute attente, ça marche ! Et ça marche si bien qu’on a envie de lui coller des baffes et qu’à nos yeux, il devient le suspect numéro un du meurtre de la jeune Héloïse. En cela, la structure de l’intrigue est habile dans le sens qu’elle multiplie les pistes. Seulement voilà : il y a eu une vraie volonté de multiplier les pistes, de complexifier le scénario, d’incorporer des affaires qui n’ont pas vraiment de lien entre elles. Mais il y en a trop. A un moment donné, je pense sincèrement qu’il fallait faire un choix car visiblement, Chabrol a été incapable de développer l’intrigue policière et l’évolution des personnages en même temps. De plus, on ne sent pas vraiment de réelle implication des acteurs quels qu’ils soient, bien que Jacques Gamblin rende une copie honorable, lequel alterne l’excellent et le moins bon. Mais après, qu’est-ce qu’on a ? A l’instar de Sandrine Bonnaire qu’on ne sent pas concernée, on ne ressent pas vraiment les tourments qui devraient agiter les personnages. Autrement dit, le film ne dégage aucune puissance psychologique. Un comble pour un long métrage qui se voulait être un drame psychologique ! Donc oui, la seconde partie de la phrase du magazine Première est juste quand elle affirme que la plupart des personnages ont été ratés. Et donc, insidieux, l’ennui finit par s’installer, doucement mais sûrement. Le pire est qu’aucune forme d’empathie ne montre le bout de son nez, mis à part peut-être envers Bernard Verley en inspecteur Loudun qui avait plus la carrure d’un commissaire. Pour une fois qu'il bénéficie d'un rôle de gentil... C’est d’ailleurs par lui que les fameux parlottages qu’on retrouve très souvent dans les petits villages sont mis sur le devant de la scène… Vous savez, ces échanges verbaux sous cape souvent médisants et manipulateurs… et parfaitement retranscrits par Bulle Ogier sous les traits d’Evelyne Bordier. Il en ressort un film balourd, mou du gras, sans aucun punch et que même la musique, plutôt rare, ne réussit pas à dynamiser ni même à aérer. Un film qui s'oublie plus vite qu'il n'a été de le voir. Il ne constitue même pas un film majeur du cinéaste. Pour tout dire, lui aussi s'est perdu dans sa propre réalisation, ne se rendant même pas compte de l'erreur qui s'est glissée sur la robe bleue que le mari avait commencé à défaire... et sur le plan d'après le zip n'était plus descendu... Comme quoi, quand on n'y est pas...