Comme je l’ai écrit souvent à propos des histoires vraies (et je radoterai sûrement encore), peu m’importe si la mise en scène est classique, du moment que l’histoire racontée me trouble, c’est gagné.
Je n’oublie jamais que le cinéma me raconte une histoire ou un document.
Si c’est un document qui me raconte une histoire, c’est encore mieux.
A ce paramètre s’ajoute mon cheval de bataille primordial : la direction d’acteurs que je place avant la mise en scène selon les cas de figure.
Je dois croire à l’histoire tout simplement.
Comment réagir face à des histoires vraies comme les biopic ?
Parfois, c’est romancé avec pudeur ; parfois c’est exagérément romancé au point de friser la malhonnêteté ; mais souvent c’est instructif.
« Instructif » ne signifie pas pour autant émouvant, ce peut-être clinique, sans âme.
« Fleur du désert » est indéniablement un sujet fort : une fillette somalienne fuit sa famille pauvre parce qu’elle refuse d’être donnée en mariage à un vieil homme riche… en chèvres !
Elle parvient à rejoindre Mogadiscio après une odyssée dans le désert où réside sa grand-mère, laquelle l’envoie à Londres dans une ambassade où un membre de sa famille exerce ; puis SDF et top model pour dénoncer l’excision !
Ouf !
«L’excision », voilà Le sujet.
Force est de constater que ledit sujet n’est abordé que deux fois : dans une chambre avec une amie et à quelques encablures de la fin du film lors d’un discours à l’ONU.
Dommage ou pas ?
Le film débute sur une fillette qui récupère un bébé chèvre tout juste sorti des entrailles de sa mère. La caméra s’élève et embrasse un paysage aride de Somalie. J’avoue que j’avais un oeil sur la femelle morte en couches : un corps relativement propre, aucune trace de la mise à bas. Quant au chevreau recueilli dans les bras de la fillette, il ne semble pas maculé de sang, de liquide amniotique.
Ce détail peut paraître inutile mais il donne l’air de rien le ton du film : un récit relativement glacé comme les feuilles d’un magazine… de mode !
Certes, la réalisatrice s’attardera sur les pieds de la petite fugitive mais dans l’ensemble le scénario ne respire pas la crasse, les mauvaises odeurs, la souffrance des corps.
En tout les cas, je ne l’ai pas vraiment perçu.
Par contre, le parcours de Waris Dirie, des montagnes arides de la Somalie au podium bling bling de la mode relève vraiment d’un parcours hors norme.
Et sa relation avec Marilyn, interprétée par la pétulante Sally Hawkins, constituait de bons moments sympathiques.
Cependant, il y a une scène à extraire de ces « bons moments sympathiques » :
la révélation de l’excision de Warris à Marilyn ; les deux actrices sont formidables d’intensité, de pudeur, de compassion.
Evidemment le discours de Warris Dirie à l’ONU est émouvant.
Elle a invité le monde entier à prendre conscience de l’excision. Acte barbare d’un autre temps, acte barbare qui n’aurait jamais dû appartenir à un autre temps !
Acte barbare encore et encore à l’initiative du mâle. De l’homme bestial.
Et encore, pourquoi employer le mot bestial, je ne crois pas me tromper si j’affirme que dans le monde animal, donc chez les bêtes, il y ait une espèce qui se comporte ainsi.
« Fleur du désert » a le mérite simple et fort de m’instruire et c’est déjà ça.
Je saluerai la prestation de Liya Kebede qui a su me faire croire à son personnage Waris Dirie.