Ce film part d'une idée originale et très agréablement exploitée (contre l'avis de beaucoup, mais j'assume)! En effet, nous sommes immergés dans l'esprit d'une petite fille malade.
Je ne dirais pas « autiste » comme j'ai pu le lire souvent, car elle est trop bavarde et parvient à suivre des objets en mouvements avec son regard... de plus sa maladie, ou son don, l'amène à voir les morts tels le clochard, qui doit sans cesse revivre des examens médicaux traumatisants (idée de boucle ininterrompue avec le premier dessin, un espace temps confus où des actes se répètent, s'en-chassent,etc). L'enfant revit ces agressions « encore et encore » (« ce qui est arrivé, arrivera encore »), comme si le temps s'était arrêté de progresser pour réaliser un éternel retour en arrière.
Nous tombons donc dans un univers traumatisé, où les incohérences sont normalisées (
elle colorie de rouge les orbites d'une femme énucléée alors qu'elle n'a à sa disposition qu'un crayon noir
) , dans un monde où le réel est distordu... Ce qui apporte d'ailleurs de très belles images. Si l'idée d'un hôpital froid et inquiétant n'est pas innovante, elle est bien honorée avec une obscurité et une souillure toujours plus importantes à mesure que l'on descend dans les étages. Dans cet univers cauchemardesque, la fillette n'est pas écoutée, comme dans le monde réel lors de l'examen médical préliminaire.
Elle réalise des croquis, mais personne ne s'y attarde longtemps quand bien même leur signification est des plus claire! La carnet de dessins est alors abandonné sur le sol, sans égard... Dans ce monde obscur qui est le reflet de son esprit, la fillette exprime son « amertume » (le terme est faible) de ne pas être entendue : elle répète alors des phrases de son père hors contexte, ne véhiculant aucun sens exploitable (« dors bien mon ange, dors maintenant. Tu vas faire de beaux rêves, c'est promis. Je t'aime » ou encore « essaie de tenir le coup encore une minute, bébé ») afin de nous montrer l'ineptie des propos qui lui ont été tenus dans le monde réel. Et la transformation des discussions d'adultes en sons inintelligibles (répétition des premières minutes du film, mais cette fois sous le regard de Sarah) témoigne davantage de la volonté de la fillette de se couper de ce monde qui ne l'écoute pas plutôt que de l'autisme, car elle a entendu (sinon elle ne pourrait pas répéter)...
En bref, ce regard porté sur la maladie d'une fillette abandonnée à une solitude forcée est sublimé par une photographie impressionnante. Outre un film illuminant l'ego de son réalisateur, Dark Floors est une production profonde qui rend au genre de l'horreur ses lettres de noblesse!