Après avoir passé plus de 10 ans à produire essentiellement pour la télévision, le duo de producteurs Pietro Valsecchi et Camilla Nesbitt font leur retour au cinéma avec Le Grand rêve. Ces derniers avaient déjà produit deux films de Michele Placido : Pummaro en 1989 et Un héros ordinaire en 1994. D'un point de vue strictement économique, Le Grand rêve est le premier film produit par la fusion en 2007 entre leurs deux sociétés Taodue et Medusa, avec un plan de distribution en Italie tablé sur 450 copies, et coproduit par la société française Babe Films. Aussi Le Grand rêve est-il le deuxième gros candidat italien projeté cette année à la 66e Mostra de Venise, après Baaria - La Porta del Vento de Giuseppe Tornatore.
Le film s'inspire des souvenirs de son réalisateur Michele Placido, quand il était un policier venu du Sud pour devenir acteur au théâtre. Placido précise qu'il s'agit de "son journal de bord, un roman populaire et politique reliant l'ombre de la violence des années Soixante-dix. En 68, on était créatif : on dansait, on jouait... C'était la fête". L'écriture du film a été interrompue par la sortie d'un des films plus emblématiques sur cette période, Innocents - The Dreamers de Bernardo Bertolucci, avant de reprendre le travail en 2006.
Michele Placido a un point de vue tranché sur les événements de mai 68, retournant les propos de Pier Paolo Pasolini suite aux affrontements de Valle Giulia à Rome, en mars 1968. Fondamentalement à gauche, ce dernier avait pourtant pris a parti des policiers parce que "c'était des fils de pauvres contre des enfants de bourgeois conformistes". Placido, policier à cette époque, estime que cela a été vain, car "beaucoup de gens ont abandonné les idéaux de l'époque. Moi, je continue à faire mon 68 par l'orientation politique de mes films".
Si Le Grand rêve montre que l'année 1968 a été une étape charnière en Italie, menant à une décennie sanglante, entre par la révolte des masses et les groupuscules de gauche comme les Brigades Rouges, ce n'est pas le premier film italien qui revient sur les événements. Dès la moitié des années 90, un travail de mémoires apparaît concernant cette période, où les films sont centrés sur la manière dont les individus perçoivent la montée des violences. La Seconda volta de Mimmo Calopresti est le premier à s'intéresser au sujet des ex-brigadiste rouges sortant de prison en "semi-liberté". On peut également citer deux autres oeuvres marquantes : la grande fresque Nos meilleures années de Marco Tullio Giordana, qui suit une bande d'amis des années 60 à nos jours, puis Mon frère est fils unique de Daniele Luchetti, qui raconte l'éclatement de deux frères d'un village au sud de Rome des années 60 aux années 70, l'un, révolutionnaire, et l'autre, séminariste, ne tardant pas à rejoindre les fascistes. Marco Bellocchio, auteur du film Vincere qu'on a pu voir sur la Croisette en 2009, s'est aussi intéressé à cette période avec Buongiorno, notte, qui revenait sur l'enlèvement d'Aldo Moro, fantasmant sur sa libération et les conséquences que cela aurait eu.
C'est la seconde fois que Riccardo Scamarcio tourne sous la direction de Michele Placido après Romanzo criminale.
Après avoir travaillé ensemble sur Romanzo criminale en 2006, et sur Il Grande sogno en 2009, c'est donc la troisième fois que la jeune actrice Jasmine Trinca collabore avec le réalisateur Michele Placido.
La comédienne italienne Jasmine Trinca a été récompensée du prix Marcello Mastroianni lors de la 66e Mostra de Venise.