Me voila bien emmerdé : cela dix jours que j’ai vu "Frankenweenie" et je n'en ai pas écrit la critique immédiatement. J'avoue être surpris moi-même de la conséquence qui en découle : je ne me souviens ABSOLUMENT plus du tout de ce film. D'un côté j'ai l’air bien con, parce que j'ai le souvenir qu'un paquet de trucs (pas très positifs) m'étaient venus en tête en le voyant, mais d'un autre côté, cet effacement inopiné de ma mémoire est en soi une information fort éloquente qui pourrait se suffire à elle-même. Le plus marrant c'est que, par contre, je me souviens encore à peu près des différentes phases qu'a connu mon état d'esprit face à ce film. Je me souviens que j'y suis allé en me disant : « Bon ! Mon gars... Tu es encore sous le choc de "Dark Shadows"... Le nom de Burton sonne encore pour toi comme une trahison à l'art, comme une infamie faite à ses œuvres passées... Mais bon, même si au fond de toi tu souhaites voir Burton être expatrié de force au Bhoutan pour qu'il ne puisse plus jamais faire de film, efforce-toi malgré tout d'aller voir ce "Frankenweenie" l'esprit ouvert, sinon à quoi bon... » ça c'était l'état d'esprit initial. Je me souviens d'ailleurs que cet état d'esprit s'est vite transformé dès que j’ai vu les fanions du nid d'aigle de Mickey flotter en guise d'introduction : je suis tout de suite descendu à : « N'attendons plus rien. Voyons le comme un de ces multiples films d'animation qui sortent en ce moment : espérons quelques moments sympas et croisons les doigts pour ne pas se ramasser deux trois réflexions bien réacs dans la gueule. » Le pire, c'est qu'en gros, je me souviens que c'est un peu ça que j'ai eu. Je n'ai pas été choqué par une fulgurance digne de l'oncle Walt ; je me suis marré deux fois en voyant la gamine avec son chat chelou, et à part ça... Bah à part ça j’ai bien eu dans ma gamelle un film d'animation plutôt bidon, sans relief, comme toutes les productions standardisées qui sortent en ce moment et qui n'espèrent qu'une seule chose : coller au plus près de la cible pour toucher sa part du grisbi. Est-ce que cela veut dire que, pendant la séance, je n'ai jamais osé faire la comparaison avec le Burton des grandes années durant ce "Frankenweenie ?" Bien sûr que non ! Comment l'éviter quand un réalisateur passe son temps à se faire des clins d'œil à lui-même ? Un pote parlait du plaisir qu'il a eu d'assister à un « retour aux sources ». Pour ma part, j'ai tout ressenti sauf ça. Pour moi un retour aux sources implique qu'une maturation s'est faite depuis ses débuts, et que le retour aux premières amours se fait en prenant le recul que l'expérience apporte. Pour moi, là, il y a aucun recul : juste du banal repompage. « Vous kiffiez mes films d’avant ? ...ça tombe bien ! Moi aussi ! D'ailleurs voilà un petit best of ! ...Et comme je suis sympa, en bonus, j'y rajoute deux trois extraits de films que j'aimais mater quand j'étais gosse... » Personnellement, c'est ça que j'ai entendu en voyant ce "Frankenweenie". Parce que, oui, moi quand je vois un mec qui passe son temps à se toucher la nouille en s'auto-référençant (faut oser quand même) c'est quelque-chose qui peut encore passer si le gars continue d'avancer dans son propos en amenant du neuf sur la table. Là, c'est pas le cas. Quand on vire les références qui pullulent, bah... y'a plus grand-chose. Niveau intrigue : chaque étape est annoncée par la B.A., rien n'est creusé davantage en regardant le film, et jamais je ne me suis retrouvé surpris par la tournure des événements. Pour ce qui est du propos : on prend le même qu'Edward mais on le vulgarise pour les gosses, tout en veillant bien malgré tout de claquer une happy end très Disney qui savate le minimum qui a été entrepris. Alors, face à ça, les gens de la presse se toucheront certainement une fois de plus, appréciant de se sentir intelligents en comprenant toutes les références que Burton fait à la sacro-sainte culture classique. Ainsi, ils vanteront sûrement sans hésitation un film qui pourtant ne les a pas secoué un seul instant. Moi, je ne marche pas comme ça. Vanter l'immobilisme et le conformisme, c'est pas mon truc parce que tout simplement je ne vais pas au cinéma pour qu'on me conforte dans mon propre univers et mes propres références. Moi je veux qu'on m'emmène à l'aventure, je veux explorer une œuvre, un artiste, une démarche. Là, on m'a resservi la même plâtrée que la dernière fois, scolairement en plus. Désolé, mais moi ça m'emmerde. Bref, je ne conclurai donc pas en le qualifiant d'indigeste ce "Frankenweenie", mais bon, par contre j'assume totalement le fait de le désigner comme un magnifique exemple d'insignifiance...