Stéphane Giusti explique le choix du titre Made In Italy : "C'est avant tout une marque de fabrique, une histoire, un style déposé... Pour la plupart des gens, tout ce qui est "Made In Italy" est beau, raffiné, sent bon, chante des chansons d'amour mais a aussi un côté un peu démonstratif, mafieux, excessif, pour ne pas dire bordélique. Pour moi, l'Italie c'est tout ça à la fois. Un miracle quotidien de paradis et d'enfer. D'ailleurs, ce n'est pas pour rien que le Pape s'y est installé..."
Sept ans après le drame Bella Ciao, Stéphane Giusti rend à nouveau hommage à la terre de ses origines avec Made in Italy. "J'écris sur ce que je connais, sur ce que je vis et ressens profondément, explique le cinéaste. L'Italie coule en moi comme le sang dans mes veines, même si je le voulais, je ne pourrais pas m'en débarrasser. La France aussi, mais de manière différente, la France, c'est mon cerveau, mon intellect, tout ce qui en moi réfléchit est français. Mais tout ce qui est sensible, intuitif, passionnel est italien. C'est une dualité assez éprouvante au quotidien, vous pouvez me croire. C'est une lutte permanente entre deux conceptions de la vie. Comme pour Luca, le héros du film."
Stéphane Giusti a mis beaucoup de lui-même dans le personnage de Luca Morandi. "Enfant, je ressemblais à Luca dans le film, avec ses tenues 70 flashy et son cartable, confie le réalisateur. Et dès que je voyais mon père, j'étais en transe. Il faut du temps pour regarder sa propre vie en face et se l'approprier. On dit qu'on devient adulte à la mort de ses parents. Luca grandit, mais c'est plus fort que lui, à la fin, il reste un gosse. Comme son père, et le père de son père... Luca est aussi le personnage de toutes mes contradictions. Il vit en France, mais il est Italien. Il écrit en français, mais dans sa tête, il chante en italien. Il construit sa vie en France, mais il ne cesse de regarder au delà des Alpes. Luca vit dans la mémoire de l'Italie de son enfance, je dirais même : il est la mémoire de l'Italie. Et il entretient un rapport d'amour et de haine partagée envers son pays. Moi-même, je porte un regard très français sur l'Italie, parfois cynique, mais à la fois je la regarde avec les yeux émerveillés d'un éternel amoureux, c'est le pays de mes rêves d'enfant, celui de ma famille, il ne peut pas être mauvais, sale, bruyant, critiquable. D'un autre côté, je porte un regard très italien sur la France. Comme Luca. Il vit comme un Italien, il s'amuse, chante, va jouer au ballon plutôt que de travailler, il ne prend rien au sérieux."
Pour Stéphane Giusti, Gilbert Melki s'est imposé de lui-même. Au départ - même si Luca est quasiment son double - le cinéaste ne voulait pas de quelqu'un qui lui ressemble. "Je voulais surtout un comédien capable d'incarner cet écrivain de 40 ans et pas seulement de le jouer, raconte-t-il. Vous pouvez demander à n'importe quel comédien de jouer un écrivain, il le fera, il s'assoira à une table et fera semblant d'écrire. Mais ce qui est essentiel, c'est l'écrivain quand il n'écrit pas. Et Gilbert incarne parfaitement l'écrivain, dans sa vie la plus intime, ses doutes, ses certitudes, ses coups de folies. D'autre part, je ne voulais pas d'un comédien qui soit trop "parisien", c'est à dire trop marqué dans un snobisme culturel, et cela aussi, Gilbert l'incarne. Gilbert est aussi un amoureux de l'Italie. Il y a vécu, il parle l'Italien couramment. Je ne pouvais pas faire ce film avec un comédien qui n'aurait pas connu l'Italie et ne l'aurait pas aimée. Enfin, il me fallait un homme particulier, qui évolue au milieu de femmes excessives, envahissantes, passionnées, étouffantes... Il devait exister je dirais "virilement" sans pour autant perdre son côté adolescent, fragile. Voilà. Gilbert possède toutes ces qualités."
Made In Italy réunit un joli casting féminin au sein duquel figurent Caterina Murino, Françoise Fabian, Amira Casar et Barbora Bobulova. L'occasion pour Stéphane Giusti de couvrir comme dans son premier long métrage Pourquoi pas moi? un large spectre de la féminité. "Chacune d'entre elles représente un certain type de femme, une certaine féminité, mais aussi un type de séduction et une histoire, raconte le réalisateur. Rose, la mère, évoque les années soixante, avec cette légèreté et cette inconscience de l'époque, Isabella, la soeur est une femme d'aujourd'hui, un peu masochiste, qui fait de son sacrifice un art de vivre, Monica et Lilla sont les deux faces d'une même pièce. Elle sont toutes deux une image de l'Italie d'aujourd'hui, excessive, "berlusconisée", "Dolce et gabbanisée" pour Monica, et pour Lilla, plus lucide, plus simple, mais qui n'a rien perdu de son "italianité". Yolanda et Bijou, elles aussi, représentent une époque particulière, le terrorisme et les années 70, le mannequin et le fric des années 80."
Claudia Cardinale a été pressentie dans le rôle de Rose avant que ce personnage ne soit finalement attribué à Françoise Fabian.