Awake part d'un principe fantasque : sous peine de nous balancer dès l'introduction des chiffres incroyables sur le nombre d'anesthésies générales inefficaces lors d'opérations, il décide de partir dans un délire métaphysique proche du cinéma fantastique que n'aurait par exemple pas renié Adrian Lyne au sortir de son Échelle de Jacob.
Certes surprenant au premier abord, il part suffisamment loin dans ses idées pour offrir un visionnage enrichissant dans les thématiques qu'il traite, certes classiques mais toujours abordées avec un certain savoir-faire. La relation mère-fils aura beau pâtir de quelques clichés et d'effets mélodramatiques vulgaires, elle rattrapera ses errances par une fin d'histoire absolument magnifique, bien tournée et sympathiquement symbolique, aux jeux de lumière réussis et forts en significations.
Émouvante, elle offre une digne conclusion pour un divertissement jamais trop prise de tête, au point même de trop simplifier son principe : là où l'intérêt est de dépayser le spectateur et de jouer sur les lois de la physique, il réduit la situation à un point de vue omniscient proche d'une vision divine, avec des incohérences forcées par des narrations différentes de passages passés vus d'un oeil nouveau, portés par un Hayden Christensen jamais bien impliqué.
Parti beaucoup trop loin avec son histoire de multiples complots, Awake en vient à mal maîtriser son sujet : alors qu'il aurait du rester dans la simplicité et proposer au spectateur un divertissement mené tambour battant (il n'y a rien à redire sur son rythme effréné), la recherche du symbolisme évoqué comme appréciable constitue, en plus d'une qualité importante, son défaut majeur. C'est par son manque de finesse qu'il peine à dissimuler les quelques éléments bouleversants mis en avant par les scènes d'observation omnisciente, déjà bien révélés par sa mise en scène lourde et voyeuse (à trop rapprocher certains personnages dans ses plans, Joby Harold, pourtant auteur d'une mise en scène efficace bien qu'académique, évente ses révélations en laissant présager de futurs rebondissements de situation très attendus).
Sans cette histoire de complot, nul doute que le film aurait été plus digeste; s'il avait décidé de garder son principe pour faire quelque chose de purement fantastique, l'on aurait pu croire au fantasque de son principe. Visiblement décidé à s'encrer dans une approche réaliste de son sujet (en témoignent les textes de justification, le langage scientifique respecté et les protocoles chirurgicaux bien retranscrits), Awake se tire seul une balle dans le pied, limitant son enrobage à rester du côté des séries b à pitch intéressant mais mal exploité.
Pourtant joliment enrobé, il ne va pas au bout de ses idées et se révèle, au final, trop convenu. Paradoxalement, il manque de folie et s'enferme lui-même entre deux possibilités : celle de faire un film haletant puisque réaliste et forcé de finir mal, avec l'alternative adverse de basculer totalement dans un délire métaphysique et purement réflexif, cas nécessitant bien plus que des flashbacks réécrits et des rapports mère-fils abstraits.
Il fallait soit abandonner la réflexion pour privilégier le sensitif, soit préférer la philosophie au détriment de son action. Ne choisissant jamais entre les deux possibilités, Awake se dénigre seul en rentrant dans deux catégories qui le fusillent automatiquement : il n'est ni suffisamment tendu pour entrer dans la cour des grands films à tension, ni trop intellectuel pour intéresser les amateurs de réflexion métaphysiques.
La définition d'avoir le cul entre deux chaises.