Le mécano de la Général fait partie de ces films que je n'ai pas envie d'analyser, tout du moins sur la technique, la forme, en tout cas d'en faire un commentaire approfondi; parce qu'il est de ces films qui nous touchent, t où on a simplement envie d'éteindre notre raison pour boire le film avec nos sentiments.
Tout de même je me lance dans cette critique qui est déjà éprouvante. C'est une découverte ce Buster Keaton, bien sûr j'en avais entendu parlé de nom, mais ce n'était pas une priorité avant que mes éclaireurs les plus éminents me le conseillent indirectement. Je me lance dans ce film la fleur au fusil, ne demandant qu'à être surprise.
Mon premier choc, c'est Buster Keaton lui même. Une vraie gueule. Un homme aux petits yeux qui sont pourtant grand ouverts à la lecture. Un regard vraiment mélancolique, sans doute le plus beau des sentiments, car il cache à la fois la tristesse, la simplicité, la timidité et surtout une grande sensibilité. Mais aussi bien évidement une façon très singulière de ce mouvoir, très burlesque, très incertaine et fébrile, qui fait tout son charme.
Ensuite, c'est évidement toute l'inventivité du réalisateur acteur. C'est simple, c'est une bonne idée par plan, un gag dès que c'est permis; et ça l'est souvent, car Keaton est intelligent pour trouver tous les gags les plus simples. Il exploite parfaitement son corps, lui même, ses expressions; mais aussi tout ce qui l'entoure. Ainsi, on a un duo très comique avec son "amour", sa locomotive la Général, mais aussi tous les décors qui l'entourent, tous les objets qui lui tombent sous la main et qui sont ingénieusement bien exploités, toujours de manière inattendu. C'est aussi ça la force de Keaton, on croit toujours savoir ce qu'il va faire, nous attirant le regard sur un élément précis, sur un gag fortement prévisible, et finalement nous en sortir un totalement inattendu qui nous surprend.
C'est aussi un véritable sens du rythme qui rend l'expérience si plaisante. Outre qu'il n'y a aucun temps morts, que les gags ne s'affaiblissent jamais, Keaton joue habilement des sentiments; c'est toujours drôle, mais c'est touchant, rien n'est si facile ou gratuit. Le mécano est un homme sensible, amoureux, passionnée, à qui il n'arrive que des malheurs alors qu'il mérite tant d'affection, comme ces personnages de cartoon pour lesquels un petit nuage pluvieux les suit toujours, si vous voyez l'image.
Et il y a enfin tellement d'autres choses à dires, mais les trouvailles sont trop nombreuses pour êtres listées. On pourra parler du personnage de Marion Mack, qui est bien plus qu'un faire valoir, et qui participe beaucoup aux nombreuses cascades et scènes cocasses. Le film est aussi sacrément bien filmé, les plans servent toujours le gag, comme je l'ai déjà dis Buster Keaton à l'art par ses plans d'attirer notre regard sur certaines éléments, pour au final bien nous tromper. Enfin, pour finir sur une dernière précision, j'ai regardé le film avec le bande sonore composée par Joe Hisaishi, et je l'ai trouvée vraiment bien adaptée aux images. C'est également, pour ceux qui n'auraient pas vu le film, la version qu'on peut trouver facilement sur Youtube.
Un vrai coup de coeur donc que ce film et Buster Keaton. J'écris cette critique après avoir vu Le Cameraman, c'est d'ailleurs la vision de ce deuxième film qui m'a poussé à écrire une critique pour le premier. Car Keaton fait partie de ces personnages de cinéma qui nous donnent l'impression, peut-être à raison, qu'il y a quand même de sacrés génies qui ont tout compris avant tout le monde. Je n'avais pas autant ri et était si touchée depuis un moment.