Désir, culpabilité et vengeance devant la caméra d'Adrian Lyne. Sur les écrans français ce mercredi 5 juin, Infidèle, suit le dramatique triangle amoureux formé par Richard Gere, Diane Lane et le Français Olivier Martinez. Présents à Paris pour présenter le film, les comédiens et le réalisateur sont revenus sur cette adaptation américaine de La Femme infidèle de Claude Chabrol. Interviews ou extraits de la conférence de presse, retrouvez leurs confidences...
Naissance du projet
Adrian Lyne : J'avais vu le film de Chabrol il y a trente ans, en 1969. Je n'ai jamais oublié ce film. Je crois même que c'est mon préféré parmi les oeuvres de Chabrol. De nombreuses personnes aiment Le Boucher, sorti peu de temps après, tandis que moi, j'ai toujours préféré celui-ci. Je me souviens m'être dit que je ferais mieux de ne pas y toucher, de ne pas en faire un remake, parce que l'original était justement si bon. Mais, fatalement, c'est ce que j'ai fait. Cependant, mon film ne s'inspire que très librement du film original. Il y a quelques scènes similaires, comme, par exemple, la rencontre des deux hommes.
Le film
Adrian Lyne : Je voulais tout simplement étudier la nature arbitraire de l'infidélité, le fait que cela peut arriver à n'importe qui – le fait d'être parfaitement heureux, d'avoir un enfant gentil, de vivre dans une superbe maison... ne vous met pas à l'abri. C'était source de nombreuses querelles avec le studio, qui voulait que le mariage soit merdique ; ils voulaient que le mariage soit morne, avec un couple où soit la femme soit le mari est absent. Ils voulaient que leurs relations sexuelles soient mauvaises. Or, moi, je voulais que tout soit parfait, contrairement au film de Chabrol, dans lequel il y avait une certaine formalité. (" C'était un peu formel, un peu BCBG, je trouve, le mariage dans ce film ").
Diane Lane : Ce film est selon moi un voyage à travers la capacité des gens à se surprendre, un voyage au coeur de leurs sentiments et de ce dont ils sont réellement capables de faire. Les gens arrivent à se surprendre eux-mêmes, que ce soit de façon positive ou négative. On découvre jusqu'où les gens sont capables d'aller. En rencontrant les personnages pour la première fois dans le film, on ignore, tout comme eux, ce que leur réserve l'avenir. (...)
La métaphore au début du film, avec les fortes bourrasques et le vélo qui se renverse, est une façon de dire qu'on ne sait jamais quand est-ce que l'on se trouvera face à un choix, à une tentation qui dépasse notre capacité d'y résister. Sérieusement, dans la vie, on devrait toujours se tenir prêt à affronter d'éventuelles bourrasques ! Car, le risque d'être pris au dépourvu, d'être mis à l'épreuve face à soi-même, est toujours présent.
Richard Gere
Adrian Lyne : Pour être parfaitement honnête, cela faisait un moment déjà que nous nous connaissions, par intervalles depuis vingt ans. L'idée de pouvoir le réinventer m'intriguait. Les spectateurs ont l'habitude de voir Richard Gere dans le rôle de l'amant, dans le rôle de l'élégant macho, du type plutôt arrogant, si vous préférez. Je trouvais ça passionnant de pouvoir changer tout cela. J'ai, par exemple, fait très attention à sa garde-robe, à chaque détail de ses vêtements : tout ce qui n'était pas élégant, tout ce qui était quelque peu terne et inintéressant, des cardigans, par exemple, etc. J'ai également travaillé sa démarche et sa façon de courir. Nous comparions beaucoup l'ancien et le nouveau Richard Gere.
Richard Gere : C'est toujours intéressant d'interpréter un personnage qui change et qui se découvre un nouveau caractère au fil de l'histoire. Et, de toute évidence, le personnage que je joue change considérablement. Il évolue d'un point A à un point Z, en termes de connaissance de soi. C'est toujours très gratifiant de camper un tel rôle en tant qu'acteur, quand un personnage se surprend lui-même au cours de l'histoire.
Diane Lane
Adrian Lyne : Ce qui est bien est que Diane dégage une sorte d'érotisme. Elle possède une sexualité. Mais, ce qui est intéressant est qu'elle reste gentille, qu'elle reste sympathique. En règle générale, je trouve que les personnes sexy ont tendance à être sévères, à être dures, du moins à Hollywood. Sans vouloir citer qui que ce soit, je ne trouve pas que la plupart des actrices sexy à Hollywood soient particulièrement sympathiques ; elles sont plutôt dures.
Diane Lane : Ce rôle a été un réel défi pour moi. Cependant, je savais que ce serait un moment de fierté dans ma carrière parce que ce personnage était chargé d'émotions. C'était un rôle très difficile, mais aussi très gratifiant, grâce au réalisateur, Adrian Lyne. Je savais qu'il n'accepterait jamais autre chose que le meilleur de moi-même. Et, c'était en effet le cas. Il était très exigeant. J'étais épuisée à l'époque, mais, avec le recul, je suis très heureuse de l'avoir fait.
Olivier Martinez
Adrian Lyne :Il était absolument charmant avec Diane. C'était drôle de les voir ensemble. Quand il la prenait dans ses bras ou lorsque nous filmions une scène d'amour... Puis, je me suis rendu compte que cela serait plus intéressant si son personnage était français, à cause des gestes, des choses qui paraissent tout à fait ordinaires et ennuyeuses en anglais ou en américain. Ces dernières deviennent soudainement beaucoup plus intéressantes et charmantes en français, du point de vue d'un anglo-saxon, bien entendu.
Propos recueillis par Clément Cuyer
Montage : Sébastien Raynal - Traduction : Camille Joubert
Retrouvez la de "Infidèle" et deux extraits du film
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