Il a début avec la réalisation d'Hellraiser 5. Mais c'est dès son second long métrage, L'Exorcisme d'Emily Rose, que Scott Derrickson a commencé à marquer les esprits de fans de cinéma d'horreur. Avant d'enfoncer le clou quelques années plus tard grâce au terrifiant Sinister. Il s'est ensuite aventuré du côté de Marvel avec le premier Doctor Strange, et revient aujourd'hui à son genre de prédilection.
Adapté d'une nouvelle de Joe Hill, fils de Stephen King, Black Phone nous emmène à la fin des années 70 aux côtés d'un ado victime d'un kidnappeur et tueur en série... qui va peut-être avoir une chance d'en réchapper grâce à un téléphone permettant aux précédentes victimes de l'aider. Dans l'ambiance, sa manière de faire se percuter passé et présent ou encore la présence d'Ethan Hawke au casting, le long métrage s'inscrit dans la lignée de Sinister, avec des soupçons de Ça. Et le cinéaste revient dessus avec nous.
AlloCiné : En quoi "Black Phone" était-il le projet parfait pour votre retour à l'horreur ?
Scott Derrickson : C'était le bon moment, dans ma vie, pour raconter une histoire qui m'est personnelle et s'inspire beaucoup de mon enfance. J'ai grandi dans le quartier de North Denver en 1978, année au cours de laquelle le film se déroule. Et j'aime beaucoup la nouvelle de Joe Hill à laquelle j'ai pensé pendant des années, en cherchant à l'adapter au cinéma. Combiner mes souvenirs d'enfance avec son récit, c'est ce qui a donné naissance au film.
Est-ce pour appuyer cette idée de souvenirs d'enfance que vous donnez à certaines images un aspect de film de famille ?
Oui. J'ai grandi dans un endroit très particulier : North Denver, dans les années 70, était un quartier violent de travailleurs, avec beaucoup de violences domestiques, de bagarres dans les rues, de harcèlement... J'ai tenté de capturer ce que c'était. L'émotion prédominante de mon enfance était la peur. Car il y avait beaucoup de menaces autour de moi.
Et beaucoup de tueurs en séries animaient les discussions à cette époque : les meurtres de Charles Manson venaient de se produire, Ted Bundy venait de tuer quelques personnes dans le Colorado avant de s'échapper, la mère de mon voisin avait été tuée... Nous avions peur de ce tueur en série qui pouvait sortir de nulle part pour vous enlever et vous tuer, cela faisait partie du fait d'avoir cet âge à cette époque.
Combiner mes souvenirs d'enfance avec son récit, c'est ce qui a donné naissance au film
"Black Phone" semble s'inscrire dans la même veine que "Sinister" : à cause de la présence d'Ethan Hawke bien sûr, mais aussi la manière dont passé et présent se confrontent ou l'usage de films de famille. Est-ce ainsi que vous l'avez envisagé ?
Plus vous viellissez, en tant que réalisateur, et plus votre manière de penser, sur le plan cinématographique, vous est propre. Lorsque j'ai commencé à travailler sur Black Phone, je ne prévoyais pas d'utiliser des images en Super 8 comme je l'avais fait dans Sinister. Mais lorsque j'écrivais les séquences de rêve de Gwen (Madeleine McGraw), le Super 8 m'est apparu comme la meilleure manière de le faire.
Il y a un lien esthétique entre les deux films. Thématique aussi, avec les enfants fantômes notamment. Mais Black Phone me paraît beaucoup plus émouvant. Plus optimiste aussi. Je le vois davantage comme un film qui plaît au public et vous fait vous sentir mieux que Sinister (rires) Même s'il y a du suspense.
Propos recueillis par Maximilien Pierrette à Paris le 10 juin 2022