Diffusée depuis la mi-août sur TF1, la saison 5 de Demain nous appartient, marquée par la diffusion du 1000ème épisode de la série et par l'intrigue événement de la prise d'otages, a fait souffler en quelques semaines un vent de fraîcheur et de renouveau sur les aventures des Delcourt, des Vallorta, et des autres familles de Sète.
En accueillant notamment de nouveaux visages, dont Jennifer Lauret, Emmanuel Moire, et Charlotte Gaccio, en disant au revoir à des personnages historiques, tels que Sandrine, Morgane, Ulysse, et Amanda, ou encore en changeant complètement la qualité d'image de la série et le générique d'ouverture, désormais rythmé par une chanson signée Vianney.
Alors que les téléspectateurs de Demain nous appartient suivent actuellement une intrigue de rentrée centrée sur la mort d'un élève au sein du lycée Agnès Varda - une des nouvelles arènes du feuilleton -, Marc Kressmann, qui a rejoint l'aventure Demain nous appartient il y a quelques mois en tant que nouveau directeur de collection et producteur artistique, est revenu pour nous sur le renouveau opéré, sur l'intrigue de la prise d'otages, et sur ce qui nous attend au fil des prochaines semaines à l'antenne.
AlloCiné : Vous êtes le nouveau directeur de collection et le producteur artistique de Demain nous appartient depuis le début de la saison 5. Comment êtes-vous arrivé sur la série ?
Marc Kressmann : Je connaissais Demain nous appartient avant même la diffusion de la série car, en 2017, j’étais le directeur artistique et le showrunner de Candice Renoir, qui se tourne également à Sète. J'ai donc vu débarquer les équipes de Demain nous appartient et, dès les premiers épisodes, j’ai trouvé ça très qualitatif pour une série quotidienne. J’étais assez admiratif. D'autant plus que le soap est un genre que je connais bien puisque j'ai commencé dans ce métier en travaillant comme scénariste sur des séries quotidiennes il y a une quinzaine d’année, dont Cinq soeurs, Paris 16ème, et Seconde chance.
Quand j’ai arrêté Candice Renoir il y a deux ans, j’ai dit "Au revoir Sète". Je ne pensais pas du tout que je finirais par arriver sur Demain nous appartient un jour. Et ce qui s’est passé c’est que je travaillais sur un autre projet avec Vincent Meslet (le directeur général de Newen France, qui produit la série, ndlr). À chaque fois qu’on se voyait on parlait des quotidiennes qu’il produisait. Et ça a dû finir par provoquer un déclic chez lui un jour. Il m'a donc proposé de rejoindre l'aventure fin février quand Eric Fuhrer a décidé d’arrêter d'être le directeur de collection des deux feuilletons de TF1 pour se consacrer pleinement à Ici tout commence.
Je ne m’y attendais pas du tout mais c’est une proposition qu’on ne refuse pas. J’ai dit ok pour être directeur de collection mais j’ai également demandé à être producteur artistique. Car c’est ce que j’avais fait sur Candice Renoir, ainsi que sur Munch, et pour moi c’était le prolongement naturel. C’est intéressant car ça me permet d’être à l’écriture, mais aussi de voir la production, les acteurs, pour que toutes les histoires collent le mieux à ce qu’on imagine.
J’avais ce goût pour la série quotidienne, je regardais les quatre feuilletons quotidiens français régulièrement. Et je connaissais donc bien Demain nous appartient. Je pense que c’est pour ça que Vincent Meslet m’a choisi. Et aussi pour apporter un regard neuf qui permettait d'offrir un renouveau à la série.
En quoi consiste exactement le travail d’une directeur de collection ?
La base de mon métier c’est l’écriture. Je dirige l’écriture des arches, c’est-à-dire les idées de départ, jusqu’aux dialogues. Je donne mon avis et fait des propositions à toutes les étapes. C’est très bien structuré. Dans d’autres séries on écrit plus, on intervient plus. Ici, je donne mes idées, des orientations. J’ai des idées d’histoires, de personnages. Et ensuite ça se développe en équipe.
Comment est née l’idée de la prise d’otages autour du 1000ème épisode ?
Quand on m’a dit "Tu vas arriver pour l’épisode 992, juste avant le 1000ème épisode", j'ai immédiatement pensé "Il faut faire quelque chose d’événementiel pour la 1000ème". D’autant plus que cela coïncidait avec le lancement de la saison 5. J’ai très vite pensé à une prise d’otages, en me disant que ça n’allait pas durer trop longtemps et que cela allait nous permettre de frapper un grand coup pour la rentrée.
À partir de là, je me suis dit "Il va y avoir des répercussions pour les personnages, pour les lieux, les décors, et je vais pouvoir raconter une histoire sur toute l’année". La prise d’otages lance plein d’histoires, plein de destins, plein de changements. Des départs, parfois tragiques, parfois plus positifs. Des changements de vies, de destins, sur quelques personnages et leurs familles. J’ai donc imaginé des arches sur une année. Tout en étant conscient que rien n'était figé, car les choses évoluent constamment sur un feuilleton quotidien. On ne peut pas tout prévoir un an à l’avance.
Et puis, symboliquement, j’arrive et je prends les gens en otages (rires). Je l’avais fait sur Candice Renoir, je savais que c’était très difficile à faire, très fatigant, mais d’un coup ça rassemblait toutes les équipes. Il y avait un côté prime, on voulait faire prime. Et tout le monde a tout de suite accepté cette démarche. Et ça permettait aussi de revenir sur le lieu du crime, là où tout avait commencé : Le Spoon. On renouvelle mais on garde aussi les fondamentaux. On repart de zéro tout en conservant quatre ans d’acquis et plein de personnages que le public aime.
Quels sont les grands axes de développement pour cette saison 5 de Demain nous appartient ?
Dès mon arrivée, il était clair que j’avais envie d’introduire de nouveaux personnages petit à petit. La famille Roussel tout d’abord, avec ses quatre enfants. La mère courage un peu à l’anglaise, positive, incarnée par Charlotte Gaccio, qui arrive pour une nouvelle vie à Sète et évidemment c’est le début des emmerdes. La famille d’Irène Lopez-Diallo, la CPE du lycée Agnès Varda, jouée par Thaïs Kirby, qui est une famille métissée, donc cela va permettre d’apporter plein d’histoires très riches et intéressantes.
On avait envie de personnages un peu plus modernes notamment. Et toujours du côté des arrivées, Xavier Deluc et Victoria Abril débarqueront bientôt dans la peau des parents de Raphaëlle, incarnée par Jennifer Lauret. Victoria commence à tourner à la mi-septembre et je peux déjà vous dire que son personnage est haut en couleurs. Et qu’il va compliquer les choses pour sa fille.
Cette saison, nous allons également aborder de nouvelles thématiques, comme la grossophobie et l’homophobie. Et puis il y a cette nouvelle arène, le lycée, avec de nouveaux profs, de nouveaux élèves. L’idée était de trouver des histoires fortes en fonction des acteurs et des personnages. Cela donne l’impression qu’on donne un grand coup de neuf, mais on garde l’ADN de Demain nous appartient : des meurtres, des histoires d’amour impossibles.
Et j’apporte aussi beaucoup de comédie. J’espère que cela va se voir. J’essaye d’avoir au moins une intrigue comédie par jour. Il y a des personnages qu’on va voir arriver qui sont assez surprenants, vous verrez. Et des changements de vie aussi, pour des personnages qu’on connaît déjà, qui sont là, et dont la trajectoire va surprendre. Il y aura des retours. C’est ce qui est bien dans Demain nous appartient : on a une grande troupe, donc on va pouvoir puiser dans cette galerie de personnages, en faire revenir certains, en faire vivre d’autres.
L’une des nouveautés de la rentrée passera aussi par Sofia (Emma Smet) et Charlie (Clémence Lassalas) qui se retrouvent ensemble dans le même BTS. Les deux ennemies jurées (rires). Ça va monter sur plusieurs intrigues, et ensuite on va essayer de faire des choses plus dramatiques. Ce qui est bien avec ces personnages c’est qu’ils peuvent à la fois jouer une arche A polar/mystère, et ensuite se retrouver dans de la comédie. C’est un beau terrain de jeu pour donner naissance à plein d’histoires.
Peut-on s’attendre à des intrigues allant davantage vers le genre, comme cela a déjà été expérimenté à une époque avec des pointes de fantastique ?
Complètement. Il y aura des surprises dans les mois à venir. On va essayer de faire des intrigues avec des couleurs différentes à chaque fois. De parler de sujets de société, puis de tomber dans le fantastique, voire l’horreur. Puis dans quelque chose de plus mélodramatique. Des intrigues avec des arènes différentes. Et ce que je veux essayer de faire c’est de construire chaque intrigue A autour d’un personnage féminin fort. Et sa famille. Et de nourrir tout ça jusqu’à l’arche d’été de l’année prochaine, que je suis déjà en train d’imaginer dans ma tête. Mais pour l’instant nous travaillons sur les épisodes de Noël, qui seront super feel good et remplis de bonnes surprises.
On m’a demandé de mettre plus de feel good et plus de comédie dans la série, car Demain nous appartient a été assez sombre dernièrement, notamment lors de l’intrigue consacrée à Sacha, qui était néanmoins très réussie. Comme je viens du soap, mais aussi de Munch et de Candice Renoir, j’ai un goût pour la comédie, la comédie policière. Mais j’aime bien aussi quand il y a des meurtres et des enquêtes. Il faut du noir pour faire remonter le rose. Et du rose il va y en avoir. J’avais envie de mettre en avant davantage de personnages LGBT, comme Roxane et Sara, et Jack aussi.
Jack qui est le premier personnage masculin gay de l’histoire de Demain nous appartient en fin de compte. Il était temps.
Oui, c’est vrai, il n’y avait pas de personnage gay, et ça manquait à la série. En arrivant, tout de suite, j’ai dit "Il manque un personnage ado gay". Et Jack est super, tout comme son interprète, Dimitri Fouque. On est ravi de la famille Roussel dans son ensemble. Jack va vivre des choses, heureuses et moins heureuses. Et avec Hadrien (Anthony Colette), tout ce que je peux dire, c’est que Jack va avoir sa nuit avec lui (rires). Lizzie (Juliette Mabilat), elle aussi, va avoir droit à une histoire d’amour. Tout comme Jordan (Maxime Lélue), qui aura une histoire d’amour très compliquée.
Avec cette famille, on y va, c’est un peu plus âpre. Il y a évidemment toujours de la comédie romantique classique dans Demain nous appartient, mais on essaye de faire des choses moins attendues aussi. Des histoires d’amour impossibles, des sujets de société, et des personnages féminins plus que jamais mis en valeur. C’est beaucoup de travail mais je m’amuse vraiment. On a 80 personnages, de beaux budgets, de beaux décors. C’est un terrain de jeu formidable.
À travers le nouveau lycée, et l’arrivée de nouveaux personnages tels que Nathan ou Dorian, y avait-il une volonté de rajeunir la série et de parler à un public plus jeune afin de ne pas se laisser devancer par le succès d’Ici tout commence ?
Effectivement, Ici tout commence a donné un coup de boost à Demain nous appartient. Je ne pense pas que la série nous ait vieilli, mais elle nous a montré qu’on pouvait aller plus loin dans les dialogues notamment, dans les intrigues. Le décor du lycée était choisi, on savait que Chloé allait devenir la nouvelle proviseure. C’était déjà acté depuis un moment. Et quand Emmanuel Moire est arrivé, je l’ai imaginé en prof de français. On va parler de littérature à 19h10, je trouve ça génial. Il y a une scène où on parle de Marguerite Duras.
On va mettre la musique à l’honneur aussi, pour avoir des cours qui sont intéressants et moins classiques. Et ce qui est bien avec le lycée c’est qu’on peut avoir le lycée classique, avec les Seconde, Première, et Terminale, mais on a aussi les BTS et les Prépa. Il y aura encore d’autres choses à venir petit à petit. Nous sommes très contents de notre nouvelle galerie de personnages adolescents.
Vous parliez de Nathan, joué par Adher. Ce qui est marrant c’est qu’il a été choisi au moment où j’arrivais, mais pour des intrigues que je n’avais pas écrites. J’avais vu ses premiers essais, il proposait des choses déjà très intéressantes, mais très vite, il est devenu exceptionnel. Donc on a décidé de le garder et de l’inclure dans les intrigues lycéennes. C’est pour ça que, si nous n’avions pas précisé son âge au départ et qu’il pouvait paraître plus vieux, il se retrouve finalement en Terminale au début de cette saison 5.
L’âge des adolescents a toujours été un peu compliqué à saisir lorsqu’on est téléspectateur de Demain nous appartient. Comme pour Sofia et Manon qui ne sont a priori pas jumelles mais ont toutes les deux passé le bac en juin…
C’est vrai que c’est très curieux. Peut-être qu’elles ont juste neuf mois d’écart (rires). Mais bon, Demain nous appartient c’est la vie en mieux !
Et évidemment, après le baiser échangé suite à la prise d’otages, les fans veulent savoir : Alex et Chloé vont-ils finir par se remettre ensemble ?
Ce que je peux dire c’est que l’histoire d’amour entre Chloé (Ingrid Chauvin) et Alex (Alexandre Brasseur) va être le fil rouge de la série. C’est Ross et Rachel. Et il va y avoir des tas d’obstacles.
Propos recueillis dans le cadre du Festival Séries Mania 2021 à Lille.