On ne vous fera pas l'affront de vous redire à quel point l'Empire contre-attaque est une formidable suite, qu'il n'est pas interdit d'ailleurs de trouver très supérieure à Un Nouvel espoir, où George Lucas jetait les bases de sa mythologie en devenir.
Le film d'Irvin Kershner introduit aussi un nouveau personnage, Yoda, petite créature verte à la syntaxe inimitable, dernier maître Jedi devenu ermite sur la planète Dagobah, désormais entrée dans la légende du cinéma.
D'Obi-Wan à Yoda
"You will go to the Dagobah system. There you will learn from Yoda, the Jedi master who instructed me..." lance dans le film Obi-Wan Kenobi, désormais sous forme d'esprit, à Luke Skywalker, alors qu'il se trouve encore sur la planète glacée Hoth. Qu'à cela ne tienne, c'est donc Yoda qui se chargera de former Luke.
Sauf qu'initialement, ce ne devait absolument pas être Yoda qui devait accueillir le jeune Skywalker, mais Obi-Wan Kenobi lui-même. Cette apparition a en fait permis à George Lucas de lui retirer un caillou dans sa chaussure, scénaristiquement parlant.
Dans le scénario original de Star Wars, Lucas s'est rendu compte qu'à la fin du second acte, Obi-Wan Kenobi n'avait plus rien à faire. "J'ai estimé que Ben Kenobi n'avait plus de fonction utile après le moment où il affronte Darth Vader. Et même si dans ce scénario il continuait le combat dans les airs [...], j'ai pensé qu'il serait bien plus intéressant, puissant et satisfaisant si Darth Vader le tuait". Une idée que lui aurait d'ailleurs soufflé son épouse à l'époque, Marcia Lucas.
Dans le traitement initial du scénario de l'Empire contre-attaque, Lucas faisait revenir Obi-Wan, pour former Luke en tant qu'apprenti Jedi. Obi-Wan désormais disparu, il fallait donc lui trouver un mentor de substitution, et suffisamment éloigné en terme d'apparence pour qu'il ne souffre pas de la comparaison avec la prestation et le charisme impeccable d'Alec Guiness.
"Pour soutenir ce qui serait de longues scènes de conversations, je voulais en faire un personnage extraterrestre unique, pour que ce soit divertissant" lâche Lucas dans le commentaire audio du film. Il ajoute :
"Et parce qu'il était censé être le plus grand Jedi de tous les temps, je voulais le faire très petit, et très peu "Jedi" en apparence, pour que ce soit une vraie surprise lorsque les spectateurs découvrent que cette petite créature ressemblant à une grenouille, pour ainsi dire, se révèle être ce grand maître Jedi. Mais c'est vraiment issu du problème que j'ai rencontré en tuant Obi-Wan Kenobi dans le premier épisode".
L'idée directrice, ainsi que Lucas l'a raconté dans l'ouvrage Star Wars: The Annotated Screenplays de Laurent Bouzereau, le frenchy expatrié à Hollywood et grand spécialiste des Making-of, était que Yoda fonctionne comme ces personnages croisés dans les contes de fées.
Un "type de personnage que l'on croise sur les bords de la route, prenant parfois la forme d'un vieil homme sage et avisé. Le héros suit son chemin et rencontre cette pauvre et insignifiante personne. Le but ou la leçon que le héros doit retenir est qu'il doit apprendre à respecter tout le monde, et à prêter attention au plus pauvre, car c'est là que se trouve la clé de son succès".
Toujours est-il que la première apparition de Yoda fit effectivement mouche, avec son côté attendrissant, enfantin et espiègle même, lorsqu'il fouille les affaires de Luke, à la recherche de quelques gourmandises et objets.