Afin de contrer la force de frappe de plus en plus importante des plateformes de streaming, les films seront-ils bientôt diffusés sur Canal+ seulement 3 à 4 mois après leur sortie au cinéma ? C'est en tout cas le souhait formulé par Maxime Saada, le président du directoire du groupe Canal+, dans une interview accordée au Figaro.
"Le monde du cinéma veut aujourd’hui se tourner vers de nouveaux acteurs pour assurer son financement. C’est louable. Mais il est en passe de le faire au détriment de ses partenaires historiques", explique le patron du groupe Canal+.
"Certes, les Netflix, Amazon et Disney sont des acteurs solides et solvables, contrairement à Mediapro. Mais en les faisant entrer dans le financement du cinéma français sans se préoccuper du devenir des acteurs en place, sur lesquels repose l’essentiel de ce système, le cinéma français court tout droit à la catastrophe".
Maxime Saada fait référence ici au fait que les plateformes de streaming devraient prochainement être autorisées à diffuser les films en France 12 à 15 mois après leur sortie en salle, au lieu du délai de 36 mois fixé actuellement.
Une réforme de la chronologie des médias étudiée par le gouvernement en contrepartie de l’obligation d’investissement dans la production française qui va être imposée aux plateformes telles que Netflix et Disney+ (une participation annuelle dans la création française qui correspondrait à 20 % de leur chiffre d'affaires).
Face à ce possible gros changement dans la chronologie des médias, Maxime Saada refuse de se laisser désavantager et aimerait que Canal+ garde une longueur d'avance sur les plateformes.
"Les plateformes américaines vont retrouver la place qu’occupait Canal+ avant 2018 et pour laquelle nous payions 200 millions d’euros annuellement", poursuit Maxime Saada. Il rappelle d'ailleurs que l'investissement de Netflix, Amazon et Disney+ s'élèverait à "50 à 60 millions d'euros", ce qui est quatre fois inférieur à la contribution de Canal+ dans la création française. La chaîne cryptée étant l'investisseur numéro un dans le cinéma français aujourd'hui.
"Tous les schémas envisagés aujourd’hui viendront dégrader la position de Canal+ dans le cinéma français, et par voie de conséquence ses investissements à venir". Pour riposter et faire face aux plateformes, la seule solution viable pour Maxime Saada serait donc d'autoriser Canal+ à "diffuser les films dès la fin de leur exploitation en salle, soit 3 à 4 mois après leur sortie", contre 6 à 8 mois à l'heure actuelle.
Un possible nouveau schéma qui, selon lui, ne nuira pas aux salles, qui viennent de rouvrir en France : "Les Français sont très attachés aux salles de cinéma comme ils l’ont démontré ces derniers jours. Et nous partageons cet attachement. (...) Et ce n’est pas parce que 5 millions d’abonnés à Canal+ sont en mesure de voir les films 3 ou 4 mois après leur sortie que cela nuira à la force d’attraction des salles".