Sorti en 1987, Le Grand chemin de Jean-Loup Hubert suit Claire (Anémone), une femme enceinte, tout juste abandonnée par le père de ses enfants, forcée de confier son fils aîné à un couple d'amis. Le garçon doit apprendre à se familiariser avec la campagne et à vivre avec sa famille d'adoption au sein de laquelle règne une atmosphère pesante.
Le film est un succès (plus de 3 millions de spectateurs) et les prestations Richard Bohringer et Anémone sont saluées par les César du Meilleur acteur et de la Meilleure actrice. Si le comédien a déjà décroché le prix du meilleur second rôle en 1985 pour L'Addition, il s'agit pour sa partenaire de jeu de sa première récompense.
Le 12 mars 1988, lors de la cérémonie, l'actrice monte sur scène à l'annonce de son nom. Cette dernière est habillée comme un soldat de l'an II. Sans évoquer une seule fois Le Grand chemin, Anémone présente sa tenue et déclare sa flamme à Richard Anconina, son partenaire du film Envoyez les violons.
Avant de quitter la scène sans son prix, Anémone lance : « Bonne nouvelle ère du Verseau. Vous savez qu’on vient d’entrer dans l’ère du Verseau. Salut les mecs ! » Par la suite, l'actrice ne récupérera jamais sa statuette, malgré les nombreuses relances de Georges Cravenne, le créateur des César.
Quelques jours plus tard, la comédienne explique son geste dans une interview accordée à Paris Match : " À force de fréquenter ce milieu, j'ai de plus en plus envie de faire la révolution. J'ai pensé qu'un déguisement convenait mieux à une actrice qu'un discours. Le public n'a peut-être pas compris. Mais j'espère que c'était joli. Je crois à la force de la beauté ».
Les Césars, je trouve ça rasoir ! C'est lent, et c'est aussi hyper-hypocrite cette séance d'auto-félicitations alors que le cinéma français est en train de crever
Connue pour son franc-parler, Anémone ne mâche pas ses mots concernant la "grande famille du cinéma français" : "Les Césars, je trouve ça rasoir ! C'est lent, et c'est aussi hyper-hypocrite cette séance d'auto-félicitations alors que le cinéma français est en train de crever, que les commerciaux et les producteurs ont pris le dessus en écrabouillant les artistes. […]
Je n'ai de merci à dire ni à un système, ni à une institution. Peut-être seulement à des individus. Dans ce cas, je prends mon téléphone et je le fais directement ». Avant de conclure, pragmatique, qu'elle n'aurait de toute façon pas eu la place chez elle pour ranger ce César, et qu'elle l'aurait offert aux Restos du cœur s'il avait été en or.
Une intervention qui n'est pas sans rappeler celle de son complice du Splendid, Gérard Jugnot, 33 ans plus tard. En effet, au lendemain de la remise du César anniversaire à la troupe du Splendid le 12 mars dernier, le comédien affirmait au micro de RTL :
"Ce n’est pas ça qui va donner envie aux gens de retourner au cinéma. La soirée aurait pu être militante et politique avec un peu de légèreté et d’humour. C’est vrai qu’on souffre mais nous ne sommes pas les seuls. Il ne faudrait pas faire croire aux gens qu’il n’y a que les artistes qui souffrent dans cette période".
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