Johnnie To est un des maîtres incontestés du polar hong-kongais avec des oeuvres absolument formidables à son actif comme le diptyque Election, PTU, Exilé ou encore Vengeance. Cependant, c'est en 2005 qu'il nous offre un sommet du genre avec Breakings News !
Si ce film brille par ses scènes d'action, notamment son impressionnante séquence d'ouverture que nous allons évoquer, il s'illustre aussi pour sa dimension pamphlétaire. En effet, le long-métrage de Johnnie To est également une charge acerbe contre les méthodes de certains médias, prêts à tout pour obtenir des images sensationnelles, parfois au détriment de la vérité, n'hésitant pas à user de manipulation.
Pour illustrer cela, le réalisateur nous plonge immédiatement dans l'ambiance urbaine de Hong-Kong. Le film s'ouvre sur le plan d'un immeuble en contre-plongée, avec le ciel en toile de fond. Une musique douce commence à être jouée pendant que la caméra descend vers une rue relativement étroite dans laquelle sont garées de nombreux véhicules.
Virtuosité et efficacité
Un homme tenant un journal et vêtu d'une veste en cuir arpente la rue et pénètre dans un immeuble. La caméra continue de le suivre en s'élevant jusqu'à la fenêtre d'un appartement. L'homme y pénètre et discute avec ses complices, des malfrats ayant commis un braquage.
La scène continue, toujours en plan-séquence ; la caméra descend et se place devant une voiture garé devant l'immeuble. Il s'agit de policiers en planque, surveillant les agissements des criminels dans le but de les appréhender. Une voiture débarque, attendant l'équipe de braqueurs qui tente de fuir. Mais des officiers en uniformes débarquent, faisant capoter l'opération de surveillance.
À partir de là, une fusillade éclate, se terminant par un échec cuisant de la police face aux malfrats, qui parviennent à prendre la fuite. D'une longueur de 7 minutes, ce plan-séquence d'une absolue virtuosité met en place tous les enjeux du scénario. Au moment où les policiers arrivent et que la musique s'arrête, on bascule dans un tout autre film, Johnnie To nous embarquant avec lui dans le tourbillon d'une fusillade meurtrière hyper réaliste.
Réaliser une telle séquence relève du tour de force ! En effet, la mise en place d'une scène aussi compliquée doit tout à la coordination minutieuse entre tous les artistes du film. Tout d'abord, les acteurs et les techniciens doivent être parfaitement synchronisés afin de garantir la réussite d'un tel projet. La séquence a donc bénéficié de nombreuses répétitions afin de que tout soit fluide et d'un réalisme confondant.
Un plan complexe et techniquement brillant
Une grue avec stabilisateur a été utilisée afin de garantir la fluidité des mouvements de caméra, d'une grande complexité. Johnnie To et son équipe ont dû préparer tout cela de manière extrêmement précise pour obtenir cette séquence ; afin de transmettre toute la tension du récit à raconter, il fallait prendre en compte les déplacements des acteurs, les échanges de tirs ou les véhicules qui passent.
La coordination de tous ces éléments est un exploit technique sensationnelle ; ainsi, cette scène nous offre une immersion fabuleuse au coeur d'une fusillade, nous cueillant dès le départ pour ne plus nous lâcher pendant 7 minutes avant que la pression ne redescende. En ce sens, la séquence d'ouverture de Breaking News est une des plus virtuoses jamais tournées.
Pour rappel, l'histoire suit une équipe du journal télévisé qui a retransmis en direct la fusillade qui a opposé un bataillon de forces de police à 5 malfrats qui venaient de dévaliser une banque. La diffusion de la défaite humiliante des policiers porte un coup terrible à leur crédibilité. Alors qu'il mène une autre enquête dans un bâtiment vétuste, le détective Heng découvre par hasard le repère des cambrioleurs.
Le chef du gang, Yuan, voit alors des milliers de policiers se rassembler autour de l'immeuble et se préparer à lancer l'assaut. Pour damer le pion aux médias sur leur propre terrain, l'inspecteur Rebecca décide de transformer cet assaut en véritable spectacle télévisé.