Sorti en juin 2017 dans les salles mondiales, Wonder Woman est le premier long métrage en prises de vues réelles consacré à la super-héroïne DC. Mais celle-ci était déjà apparue sur grand écran quelques mois auparavant grâce à Batman v Superman, dans lequel Gal Gadot faisait ses débuts dans le rôle qui allait faire d'elle une star : celui de l'Amazone crée par William Moulton Marston et H.G Peter en 1941, et incarnée par Lynda Carter dans la série diffusée entre 1975 et 1979. Après l'avoir lancé dans L'Aube de la Justice, Zack Snyder a confié le personnage à Patty Jenkins (qui a remplacé Michelle MacLaren, initialement engagée avant de quitter le projet), non sans avoir pris soin de poser les bases de son aventure solo.
Si Wonder Woman se présente comme un film indépendant au sein de l'univers partagé que l'on appelait alors le DC Extended Universe, avec son absence de caméos et autres scènes post-générique destinés à teaser l'avenir, son récit est lié à celui de Batman v Superman grâce à une photo trouvée par Bruce Wayne (Ben Affleck) et avec laquelle il comprend que la mystérieuse Diana Prince est présente sur Terre depuis plus longtemps qu'elle ne le prétend. Et pour cause : le cliché date de la Première Guerre Mondiale, époque à laquelle se déroulera la grande majorité de l'opus de Patty Jenkins. Un long métrage tourné entre le 13 novembre 2015 et le 9 mai 2016, là où les prises de vues de L'Aube de la Justice se sont déroulées en 2014. Et c'est à ce moment-là qu'a été décidée la période pendant laquelle se déroulerait l'action.
C'est notamment pour cette raison que Zack Snyder est crédité comme auteur de l'histoire, avec Allan Heinberg et Jason Fuchs, puisque Batman v Superman a déterminé que Wonder Woman se déroulerait en 1918, en plus de dévoiler quelques-uns des membres de son casting, dont Chris Pine et Saïd Taghmaoui : "Nous vivons actuellement dans une époque proche de celle de la Première Guerre Mondiale, avec le nationalisme et le fait qu'il ne faudrait pas grand-chose pour démarrer un conflit mondial", expliquait Allan Heinberg à Entertainment Weekly en 2017, pour justifier ce choix. "[A l'époque], c'était la première fois que nous étions au coeur d'une guerre automatisée. La mitraillette était une nouvelle invention. Le gaz était utilisé pour la première fois. De nouvelles horreurs étaient lancées chaque jour."
Warner Bros. Pictures
S'il a d'emblée été décidé que le long métrage se déroulerait dans le passé, Patty Jenkins semble d'abord réticente face à l'idée des scénaristes : "Je l'ai d'abord remise en question car ce n'était pas vraiment son origin story", explique celle qui penchait plutôt pour la Seconde Guerre Mondiale, époque pendant laquelle le personnage a été créé. "Mais j'ai très vite réalisé ce qu'elle avait de génial. Car la Première Guerre Mondiale représente les racines de la civilisation telle que nous la connaissons aujourd'hui, sans forcément bien connaître son histoire. Même le fait de ne pas savoir qui avait raison [pendant le conflit] constitue un parallèle intéressant avec notre époque. Et vous ajoutez une divinité avec une boussole morale et un système de croyance, vous la déposez dans ce monde, et cela permet d'évoquer la question des droits des femmes, de parler d'une guerre automatisée où vous ne voyez pas qui vous tuez."
L'Amazone a cependant failli remonter encore plus loin dans le passé. Le 5 janvier dernier, Zack Snyder publie en effet une autre version de la photo vue dans Batman v Superman qui nous renvoie en 1854, pendant la Guerre de Crimée, qui a opposé l'Empire Ottoman, la France, la Grande-Bretagne et le Royaume de Sardaigne à l'Empire russe. Diana y est alors présentée comme "une guerrière fatiguée, qui a traqué Arès [dieu de la guerre et l'un de ses pires ennemis, ndlr] sur les champs de bataille du monde et n'a pas encore rencontré Steve [Trevor], qui l'aidera à restaurer sa foi en l'humanité et s'aimer elle-même." Une idée qui, si elle permettait d'explorer une époque et un conflit, le premier à avoir été documenté avec des photos, que l'on voit plus rarement au cinéma, n'a pas du tout plu à Patty Jenkins, à cause notamment des têtes coupées que l'héroïne porte comme des trophées, qui cadrent peu avec ce qu'elle incarne depuis sa naissance.
"Il y avait une défiance quant à nos différentes façons de faire et nos points de vue divergents", raconte la réalisatrice dans le podcast WTF où elle revient sur ses tensions avec la production, qui a notamment exigé de transformer le dernier acte. "C'est ce qu'il se passait, y compris lorsque j'ai rejoint le premier Wonder Woman et que l'on me disait 'Hum, d'accord, mais faisons plutôt les choses comme ceci.' Mais je leur répondais 'Les femmes ne veulent pas voir cela. Qu'elle soit dure, coriace et qu'elle coupe des têtes, ce n'est pas ce que nous voulons - je suis une fan de Wonder Woman, et ce n'est pas ce que nous recherchons [chez elle].' J'ai quand même senti beaucoup de nervosité vis-à-vis de mon point de vue." La réalisatrice a donc obtenu gain de cause et le long métrage, qui se déroule au crépuscule de la Première Guerre Mondiale, a globalement séduit les critiques et le public, et engrangé 822,3 millions de dollars de recettes dans le monde. Un succès qui a donné naissance à une suite située en 1984, alors qu'un troisième volet est d'ores et déjà prévu.
Zack Snyder, de son côté, a retrouvé Gal Gadot pour les besoins de Justice League. Suite à un drame familial, le metteur en scène a quitté le projet pendant la phase de post-production, remplacé par un Joss Whedon à qui la Warner a confié le soin de tout refaire ou presque. Mais il va pouvoir aller au bout de sa vision grâce au nouveau montage du film long de quatre heures, le désormais célèbre Snyder Cut, attendu en 2021 sur la plateforme HBO Max. Ce n'est pas pour autant que l'on y verra Wonder Woman couper et collectionner des têtes, car le réalisateur précise bien dans son tweet que la photo provient d'un "monde alternatif".
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