Après Terrence Malick, Michael Mann, J.J. Abrams, Christopher Nolan, Ridley et Tony Scott, les sœurs Wachowski ou encore le studio Ghibli, c'est un Français qui est à l'honneur de la collection d'essais édités par Playlist Society : Christophe Honoré, réalisateur qui s'illustre sur grand écran depuis deux décennies, et se présente comme l'un des héritiers de la Nouvelle Vague, à travers sa manière de diriger et faire grandir Louis Garrel dans ses films qui rappelle François Truffaut avec Jean-Pierre Léaud, ou sa collaboration avec le compositeur Alex Beaupain, sur des longs métrages musicaux notamment, dans lesquels transparaît l'influence de l'œuvre de Jacques Demy. Mais pas que.
Le cinéaste, qui a débuté aux "Cahiers du Cinéma" comme Truffaut, est également scénariste, écrivain (de romans et livres pour enfants) et metteur en scène de pièces de théâtre et d'opéras. Il possède donc plusieurs casquettes avec lesquelles il aborde ses thèmes et sujets de prédilection dans différents formats. C'est notamment le cas du SIDA, qui a emporté bon nombre de ses auteurs fétiches dans les années 80 et 90, et que l'on retrouve aussi bien dans "Tout contre Léo" (publié en 1996 et qu'il a transposé en téléfilm en 2002), ainsi que le film Plaire, aimer et courir vite et la pièce "Les Idoles", qui datent tous deux de 2018. Écrit par Mathieu Champalaune, journaliste et membre de la direction éditoriale de la revue de cinéma "Répliques", "Christophe Honoré - Les Corps libérés" revient sur le parcours de ce réalisateur qui, non content d'avoir adapté et modernisé les célèbres "Métamorphoses" d'Ovide, construit sa propre mythologie d'œuvre en œuvre.
"Les Chansons d'amour", le film qui l'a imposé auprès du grand public :
Il est ainsi question de son rapport à la littérature, au texte et au dialogue. A la ville (Paris, théâtre de plusieurs de ses longs métrages, ou Rennes, lieu de ses études). A la famille, lui qui évoque la mort tragique de son père dans plusieurs de ses récits. Et aux corps. De manière poétique, dans les ballets amoureux qu'ils forment (Les Bien-Aimés, Plaire, aimer et courir vite, le ménage à trois des Chansons d'amour), ou plus sombre, à travers le vieillissement, la mort et, encore une fois, les ravages du SIDA. Comme le rappelle très bien ce livre, les films de Christophe Honoré sont pourtant pleins de vie, malgré la mélancolie qui habite certains, car ses personnages sont en quête d'épanouissement et affranchissement, à l'image de Maria (Chiara Mastroianni), héroïne de son dernier opus, le fabuleux Chambre 212, qui brassait bon nombre de ses influences et obsessions, et ressemblait par moments à un film-somme débordant de vitalité.
Un an après la sortie du long métrage, ce livre édité par Playlist Society nous permet, également, de revisiter l'univers de l'un de nos réalisateurs les plus intéressants. Si les étiquettes "cinéma d'auteur français" et "héritier de la Nouvelle Vague" apposées sur son œuvre peuvent faire peur, il n'en est rien. Car malgré quelques opus plus crus (Ma mère, Homme au bain, Métamorphoses), son travail est très accessible puisqu'il se sert de ces thèmes et d'éléments autobiographiques pour parler de nous, et interroger notre place dans le monde, dans la ville, dans nos familles. Simple et passionnant, cet ouvrage met en lumière la richesse du travail de Christophe Honoré et donne envie de se replonger dans son œuvre. Ou de la découvrir. Car s'il convient d'avoir vu les films et pièces mentionnés, il peut aussi servir de porte d'entrée et vous donner envie d'en voir plus.
"Christophe Honoré - Les Corps libérés" de Mathieu Champalaune - Édité chez Playlist Society - Disponible depuis le 20 octobre 2020 - 14 euros
"Chambre 212", dernier long métrage en date de Christophe Honoré :