De quoi ça parle ?
Portrait sans concession des coulisses d'une matinale télé aux Etats-Unis, où l’ego, les ambitions et la quête éperdue du pouvoir génèrent des tensions au sein de l'équipe. Parmi ces personnes qui aident l'Amérique à se réveiller, deux femmes tentent de tirer leur épingle du jeu. Et l'affaire n'est pas aisée dans ce milieu impitoyable, d'autant qu'il leur faut gérer en parallèle les crises de leur vie personnelle et le renvoi très médiatique du présentateur vedette suite à des accusations de harcèlement sexuel...
Disponible sur AppleTV+. Un épisode inédit chaque vendredi. 10 épisodes vus sur 10.
ça ressemble à quoi ?
ça vaut le coup d'oeil ?
La presse américaine n'a pas été tendre avec The Morning Show, figure de proue de la nouvelle plateforme AppleTV+, après avoir pu accéder aux trois premiers épisodes seulement. Une erreur stratégique de la part du géant Apple de ne pas avoir d'emblée mis à disposition les 10 épisodes tant la série ne démarre véritablement qu'à partir du 4e. Un pilote laborieux et peu subtil et deux épisodes de meilleure facture plus tard, elle trouve son ton, entre le drama de prestige aux accents "Sorkinien" (A La Maison Blanche) et le soap savoureux, s'affirme dans ses prises de position post-#MeToo qui ne semblent pas simplement là pour surfer sur la vague, et se déleste de la pression qui semble entourer son existence-même et qui a engendré un développement chaotique avant la reprise en main du projet par la scénariste Kerry Ehrin. Au point de devenir réellement enthousiasmante et même addictive !
Certes classique dans sa forme -elle aurait pu naître ainsi dans les années 90 et son budget faramineux ne se voit qu'à de trop rares occasions, mention spéciale à l'épisode 6 en plein coeur des incendies en Californie- The Morning Show pose les bonnes questions, celles qui fâchent, et à juste distance. Elle fait le choix risqué mais sans complaisance de suivre le personnage de Steve Carell, accusé de harcèlement sexuel et renvoyé de son émission -une histoire qui rappelle celle de l'animateur vedette Matt Lauer- pour mieux déconstruire avec justesse et mordant le système patriarcal, pyramidal, encore très ancré dans les grands médias américains où les hommes d'influence s'entraident pendant que les femmes payent la misogynie au prix fort. Les scénaristes reviennent d'ailleurs habilement sur l'affaire Harvey Weinstein du point de vue de l'équipe de la matinale, sous le choc des révélations, au cours d'un épisode 8 magistral et pour le moins ironique. Si la série est résolument féministe, elle le prouve de manière bien plus fine que son introduction le laissait penser.
C'est lorsqu'elle fait confiance à la totalité de sa distribution que la série est à son meilleure. Car si retrouver Jennifer Aniston dans un rôle dramatique et son premier à la télévision depuis la fin de Friends est un plaisir de chaque instant, d'autant qu'elle l'habite à la perfection, The Morning Show ne pouvait pas fonctionner en ne reposant que sur ses épaules et celles de Reese Witherspoon, toutes deux productrices par ailleurs. Fourni et solide, le casting comprend Mark Duplass en producteur exécutif sous pression constante, tiraillé entre ses amitiés et ses obligations, Billy Crudup en génial patron de chaîne perfide qui a toujours un coup d'avance, Nestor Carbonell (Bates Motel, Lost) en monsieur météo fou amoureux, Jack Davenport en mari délaissé et Gugu MBatha-Raw en programmatrice dans la tourmente, dont l'intrigue va prendre une envergure essentielle. Tous parviennent à un moment ou à un autre à tirer leur éplingle du jeu et prendre la lumière grâce à des personnages bien écrits et des interprétation justes et inspirées.
The Morning Show fait partie de ces séries qui demandent un peu de patience à ses téléspectateurs pour convaincre et prendre possession de son plein potentiel mais, une fois lancée, elle rejoint le cercle fermé des séries indispensables de l'année. Sera-t-elle à Apple ce que House of Cards a été à Netflix ? Une saison 2 est déjà sur les rails.
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