Dans The Forest of Love, Sono Sion soumet une fois de plus la noirceur de l'espèce humaine à l'analyse et taille un portrait au scalpel de la famille japonaise et de la société nippone dans son ensemble. Le prolifique cinéaste, qui réalise parfois plusieurs longs métrage en moins d'un an, reste malheureusement trop peu connu du public occidental, qui ne découvre souvent ses films que dans les festivals de cinéma de genre ou grâce aux direct to video.
The Forest of Love raconte l'histoire de Jo Murata, un homme sans merci qui utilise son charisme pour manipuler ceux qui l'entourent. Murata fait la rencontre de Shin et d'un groupe de cinéastes en herbe déterminés à faire de la relation turbulente entre Murata et Mitsuko le prochain sujet de leur film. Alors que ce petit monde se rapproche durant le tournage, mensonges et vérités s'entremêlent et chacun éprouve ses propres limite, le tout donnant lieu à des actes épouvantables.
Le film, punk à souhait, déjanté, souvent très drôle et parfois ultra-violent, est un concentré de tout ce qui fait de Sono Sion un cinéaste passionnant et éminemment politique et iconoclaste : film dans le film, relations de pouvoir entre les personnages, place des femmes dans la famille et dans la société... Pendant deux heures trente, le réalisateur de 57 ans fait également de nombreuses références à ses précédents films et brosse son auto-portrait avec beaucoup d'auto-dérision et un soupçon (une louche) de cynisme et The Forest of Love pourra plaire aux inconditionnels de Sono Sion aussi bien qu'aux novices.
Si The Forest of Love, disponible sur Netflix depuis le 11 octobre, est une excellente entrée en matière dans l'univers unique du cinéaste, on vous recommande également trois incontournables pour prolonger le plaisir :
Suicide Club
54 lycéennes se jettent simultanément sous une rame du métro, considéré comme un "fait divers", il s'agit en réalité d'une vague de suicides qui va se répandre à vive allure dans tout le pays. Kuroda, un détective est chargé de l'enquête...
Sorti en 2001, Suicide Club est loin d'être le premier film de Sono Sion, mais c'est le premier qui l'a fait connaître en dehors du Japon : il est très remarqué dans les festivals, pour ses scènes gores et grâce à sa scène d'ouverture, au cours de laquelle on assiste au joyeux suicide des 54 lycéennes. En France, il a été réédité en DVD en 2009 par Arte TV. Quatre ans plus tard, Sono Sion réalise Noriko no shokutaku (Noriko's Dinner Table), dont l'histoire se déroule parallèlement à celle de Suicide Club, cherchant à en éclairer les points inexpliqués.
Love Exposure
Fils d’un prêtre respecté, Yu intègre un groupe de pervers professionnels afin de vivre dans le péché. Malgré une vie de débauche, le jeune homme ne désespère pas de trouver l’âme soeur. Sa rencontre avec Yoko, dont l’innocence bafouée n’a d’égal que sa haine pour la gent masculine, va propulser le jeune homme bien au-delà des limites du bien et du mal…
Sorti en 2008, Love Exposure est considéré par les critiques et le public, à l'unanimité, comme le chef d'oeuvre de Sono Sion. Si l'on ne devait retenir qu'un film du réalisateur, au sein d'une filmographie impressionnante et inégale, ce serait celui-ci. Cette oeuvre bouleversante de près de quatre heures n'est jamais sortie dans les salles françaises, mais elle est heureusement disponible en DVD depuis 2013.
Guilty of Romance
Izumi est mariée à un célèbre romancier romantique mais leur vie semble n'être qu'une simple répétition sans romance. Un jour, elle décide de suivre ses désirs et accepte de poser nue et de mimer une relation sexuelle devant la caméra. Bientôt, elle rencontre un mentor et commence à vendre son corps à des étrangers, mais chez elle, elle reste la femme qu'elle est censée être. Un jour, le corps d'une personne assassinée est retrouvé dans le quartier des "love hôtels". La police essaie de comprendre ce qui s'est passé.
Guilty of Romance, thriller ultra-violent qui mélange les genres et lorgne du côté du drame autant que du cinéma expérimental, peut se targuer d'être, avec The Land of Hope, l'un des deux seuls films de Sono Sion à avoir été distribués en salle en France jusqu'à ce jour. Rien que pour ses fulgurances formelles sans équivalent, il vaut le détour.