Avec Dumbo, Tim Burton a signé son dix-neuvième long métrage en presque 35 ans. Mais il y a autant de projets, auxquels il a été attaché de façon plus ou moins prononcée, qui n'ont pas vu le jour ou se sont faits sans lui. Découvrez donc la filmographie alternative du papa de Beetlejuice et Edward aux mains d'argent.
ÇA S'EST FAIT SANS LUI
Jurassic Park
Avant même sa publication, le roman de Michael Crichton a fait l'objet d'une bataille acharnée entre les studios pour l'obtention de ses droits. Sony voulait en effet l'offrir à Richard Donner et la Fox à Joe Dante, tandis que Warner avait fait de Tim Burton son poulain, pour une version où l'on imagine que le réalisateur se serait placé du côté des dinosaures. Mais nous ne le saurons jamais, car c'est Universal qui a décroché la timbale en 1990. Le reste appartient à l'Histoire du cinéma et des effets spéciaux. Burton aurait pu se rattraper quelques années plus tard, en mettant le scénario de Dinosaurs Attack ! (d'après la même collection de cartes que celle qui donnera naissance à Mars Attacks !) en scène. Mais son auteur et le réalisateur ont préféré jeter l'éponge, jugeant le projet trop proche de Jurassic Park.
D'autres anecdotes à savoir sur "Jurassic Park" :
After Hours
Avant que Martin Scorsese ne s'en empare, After Hours avait été confié à Tim Burton. Lequel a gentiment accepté de laisser sa place lorsque le réalisateur de Taxi Driver a jeté son dévolu sur le scénario alors qu'il ne parvenait pas à réunir les fonds pour sa Dernière tentation du Christ.
Batman Forever
Échaudés par la noirceur de Batman, le défi, qui a causé une baisse des recettes en salles et parmi les produits dérivés, la Warner a décidé de rendre l'opus suivant plus léger. Et ce malgré l'intérêt avoué de Tim Burton, qui voulait notamment faire revenir le Harvey Dent incarné par Billy Dee Williams pour le transformer en Double-Face. Mais le studio a mis son véto, laissant au cinéaste, crédité comme producteur, le soin d'approuver le choix des nouveaux scénaristes et du metteur en scène qui allait lui succéder. Ce dernier ne sera autre que Joel Schumacher, qui enterrera la saga en 1997 avec Batman & Robin. Mais sans Michael Keaton, qui a refusé de rempiler sans Burton, laissant ainsi la place à Val Kilmer puis George Clooney.
"Batman Forever". Pas par Tim Burton donc :
Catwoman
Faute d'Homme Chauve-Souris, Tim Burton a bien failli rester à Gotham City. Et avec Michelle Pfeiffer, le temps d'un spin-off consacré à celle qui avait fait très forte impression dans le deuxième opus de la saga. Évoqué dès 1993, le projet a malheureusement traîné en longueur : alors que le réalisateur hésitait entre ce film et une nouvelle adaptation de La Chute de la Maison Usher (qu'il ne fera pas non plus, préférant Mars Attacks !), le scénariste Daniel Waters a remis une première version du script de Catwoman le jour de la sortie américaine de Batman Forever... et reconnaîtra plus tard qu'il n'était pas vraiment judicieux de proposé quelque chose d'aussi noir au studio qui venait de sortir un opus aussi familial et coloré situé dans le même univers.
En août 1995, Michelle Pfeiffer rappelle qu'elle est toujours intéressée, mais que ses impératifs familiaux et son engagement sur d'autres projets risquaient de changer l'ordre de ses priorités. L'actrice sera momentanément remplacée par Ashley Judd, alors que le projet n'avance plus, mais c'est bien sous les traits d'Halle Berry que l'anti-héroïne féline s'illustre en 2004, devant la caméra du frenchie Pitof. Résultat : un échec sans appel, et une razzia aux Razzie Awards.
Big Top Pee-Wee
Réalisateur de Pee-Wee Big Adventure, Tim Burton a tout naturellement été approché par Paul Reubens et la Warner pour rempiler. Ce que le réalisateur a poliment décliné, étant déjà occupé sur un projet plus personnel : Beetlejuice. Le long métrage sera finalement réalisé par Randal Kleiser (Grease) et l'interprète du personnage re-tentera le coup en 2008 avec un scénario en main et la proposition que Johnny Depp incarne sa création. Il essuiera un refus du metteur en scène et du comédien, mais réussira quand même à faire revenir Pee-Wee Herman sur les écrans, grâce à Big Holiday, sorti en 2016 sur Netflix.
Chair de poule
Est-il vraiment surprenant d'apprendre que Tim Burton a été associé à une adaptation de Chair de poule, qui semblait être un terrain de jeu tout indiqué pour laisser libre cours à sa folie macabre ? En 1998, alors que les livres signés R.L. Stine font fureur, il était question que le cinéaste en produise la version cinéma, qu'il aurait éventuellement pu diriger lui-même. Mais le projet est tombé à l'eau, avant que Fox et Dreamworks ne le revendent à Sony, qui l'a confié à Rob Letterman, avec Jack Black devant la caméra, en 2015.
La version de Tim Burton aurait-elle été proche de celle-ci :
Mary Reilly
Tout commence en 1989, lorsque les producteurs Jon Peters et Peter Guber acquièrent les droits de l'oeuvre de Valerie Martin sur la servante du Dr. Jekyll pour le compte de la Warner, et envisagent de le confier à Roman Polanski. Une possibilité qui ne fait pas long feu car, quelques mois plus tard, Guber devient PDG de Sony Pictures, où il emporte le projet et le met entre les mains de Tim Burton qui valide le scénario de Christopher Hampton et accepte, en janvier 1993, de le réaliser, avec Winona Ryder dans le rôle principal, une fois qu'il aura terminé son Ed Wood.
Un biopic dont Peter Guber veut pourtant faire repousser les prises de vues, au profit de Mary Reilly, ce qui provoque la colère et le départ de Tim Burton. Premier second choix de Sony, qui a au passage renvoyé la productrice Denise Di Novi pour la remplacer par Ned Tanen, Stephen Frears reprend le flambeau. Sorti le 23 février 1996 dans les salles américaines, le résultat emmené par Julia Roberts se révèle être un échec public et critique.
La Famille Addams
De façon encore moins surprenante que pour Chair de poule, Tim Burton a été attaché à une version en stop-motion de La Famille Addams, qu'il devait co-écrire et co-produire, et peut-être réaliser. Ça, c'était en 2010. Trois ans plus tard, en juillet 2013, le projet est annulé... avant de ressusciter en octobre de la même année grâce à la MGM. Adapté des dessins originaux de Charles Addams et non des films et de la série qui en ont été tirés, le long métrage reste en stand-by pendant un bout de temps, jusqu'à être confié aux metteurs en scène de Sausage Party, Conrad Vernon et Greg Tiernan, en 2017, pour une sortie américaine fixée au 11 octobre 2019.
Maléfique
Fût un temps où Tim Burton, fort du succès d'Alice au pays des merveilles, devait retourner chez Disney pour cette relecture de La Belle au bois dormant du point de vue de la méchante. Mais Dark Shadows et Frankenweenie ont eu raison de sa motivation, et c'est Robert Stromberg qui a dirigé Angelina Jolie et Elle Fanning dans le film sorti en 2014.
Un long métrage qui aura bientôt une suite :
Stay Tuned
Si vous faites partie des rares personnes à avoir vu cette comédie dans laquelle un couple se retrouve prisonnier d'un poste de télévision et d'émissions plus tordues les unes que les autres, et que vous lui avez trouvé un petit côté burtonien, ça n'est pas un hasard : Morgan Creek Productions l'avait initialement proposée au réalisateur, le studio ayant particulièrement apprécié le style visuel de Beetlejuice. Mais Tim Burton a préféré se tourner vers Batman, le défi et les producteurs n'ont pas été rancuniers car Stay Tuned, finalement signé Peter Hyams en 1992, rend plusieurs fois hommage à l'univers du papa d'Edward aux mains d'argent.
Cabin Boy
C'est l'histoire d'un riche garçon qui, en route pour une croisière en mer, se trompe de bateau et se retrouve dans un navire de pêcheurs qui le prennent immédiatement pour un matelot. Inédit dans les salles françaises, le film aurait peut-être connu un autre destin si Tim Burton l'avait mis en scène au lieu d'opter pour Ed Wood, et de laisser les commandes de Cabin Boy à Adam Resnick.
ÇA NE S'EST PAS FAIT
Superman Lives
"Ce sera la première fois que vous pourrez croire que personne ne parvient à reconnaître Clark Kent en Superman, tant il est capable de changer sa personnalité", avait dit Tim Burton de son interprète Nicolas Cage, fan absolu du natif de Krypton qui devait lui prêter ses traits, moyennant un chèque de 20 millions de dollars, que le film se fasse ou pas (contre "seulement" 5 pour le cinéaste, avec les mêmes conditions). Écrit par Kevin Smith, qui a soufflé le nom du réalisateur à la Warner, Superman Lives devait adapter le célèbre comic book sur la mort et la résurrection du héros, et sortir en 1998, pour les 60 ans du personnage. Mais le destin s'en est mêlé.
Kevin Spacey devait (déjà) jouer Lex Luthor ; Christopher Walken était le favori de Burton pour incarner Brainiac, même si Jim Carrey et Gary Oldman étaient en lice ; le rôle de Lois Lane se jouait entre Sandra Bullock, Courteney Cox et Julianne Moore. Et après quelques délais et une réécriture du script par Wesley Strick, la pré-production débute en 1997. Des images des essais costumes ont depuis été dévoilées, et c'est tout ce qu'il reste, concrètement, du film. Car après avoir demandé une nouvelle réécriture à Dan Gilroy et repoussé le début des prises de vues, la Warner décide de mettre le long métrage en pause, pour des raisons budgétaires.
Superman Lives tombe définitivement à l'eau lorsque Tim Burton se tourne vers Sleepy Hollow, estimant avoir perdu un an de sa vie sur ce projet maudit qui a néanmoins donné lieu à un documentaire en 2015.
Ripley's Believe It or Not !
Avec Superman Lives, l'autre gros projet que Tim Burton n'a su faire aboutir : un biopic consacré à Robert Ripley, inventeur du concept "Incroyable mais vrai !", à qui Jim Carrey devait prêter ses traits. Écrit par les scénaristes d'Ed Wood et Man on the Moon, le film est mis en chantier au milieu des années 2000. Effrayée par un budget beaucoup trop important, la Paramount a mis un terme au projet, qui a rejoint la liste de ceux que Jim Carrey devait porter mais qui ont été bloqués par le montant de son salaire. C'est notamment pour cette raison que l'acteur acceptera de jouer gratuitement dans Yes Man, mais de toucher un gros pourcentage sur les recettes en échange. Fera-t-il de même si Believe It Or Not, qui semblait être relancé en 2011 mais ne donne plus signe de vie depuis, finit par voir le jour ?
Beetlejuice Goes Hawaiian
Depuis 1990, Tim Burton ne cache pas son envie de donner une suite à Beetlejuice, dans laquelle le bio-exorciste et Lydia se rendraient à Hawaï. Un scénario a d'abord été écrit par Jonathan Gems, puis par Daniel Waters et enfin Pamela Norris, alors que Kevin Smith a refusé de s'atteler à une version, pour mieux se pencher sur Superman Lives. En mars 1997, Gems semble pourtant fataliste, expliquant que le projet ne peut se faire, ne serait-ce que parce qu'il faudrait re-caster Winona Ryder, trop âgée pour reprendre le rôle qu'elle avait tenu dans le premier opus.
Alors que tout le monde pensait l'affaire enterrée, quelqu'un a dû prononcer son nom par trois fois dans les bureaux de Warner car Beetlejuice revient : en 2011, le romancier Seth Grahame-Smith est engagé pour écrire une nouvelle mouture du script, après avoir collaboré avec Tim Burton sur Dark Shadows. Il se dit alors que le film est l'une des priorités du studio, que Michael Keaton est prêt à rempiler, que Winona Ryder pourrait finalement revenir aussi et que le long métrage se tournerait fin 2015. S'il est dans cet article, c'est bien évidemment que cela ne s'est pas fait : "C'est quelque chose que j'aimerais faire dans les bonnes circonstances, mais il faut que ce soit bien", explique le cinéaste en 2016. "Ce n'est pas un film qui demande une suite, il n'y a pas de trilogie Beetlejuice. Donc nous verrons, si toutes les conditions sont réunies, car j'aime le personnage et Michael est incroyable dans le rôle. Mais il n'y a rien de concret pour le moment." Ni même trois ans plus tard.
Si la suite voit le jour, comportera-t-elle moins de gaffes ?
The Hawkline Monster
Des années avant Cowboys & Envahisseurs, il aurait pu y avoir The Hawkline Monster, mélange entre western et film de monstres dans lequel Tim Burton devait diriger Clint Eastwood et Jack Nicholson. Le réalisateur a préféré se tourner vers Mars Attacks !, ce qui est bien au vu du résultat. Mais nombreux sont ceux qui auraient aimé que ce projet voit le jour. Au moins par curiosité.
Pinocchio
En 2012, lorsqu'il a abandonné Maléfique, Tim Burton a bien failli se tourner vers un autre classique Disney : Pinocchio, dans lequel il voulait que Robert Downey Jr. incarne Gepetto. Passé depuis entre les mains de Ben Stiller et Sam Mendes, alors que Paul Thomas Anderson a momentanément été évoqué, le long métrage est aujourd'hui entre les mains de Paul King (Paddington), mais semble avoir plus de mal à avancer que le pantin du film, une fois débarrassé de ses ficelles.
Conversations with Vincent
Quiconque connaît un peu Tim Burton et ses références ne peut ignorer sa fascination pour Vincent Price, grande figure de l'horreur à qui il a offert le rôle de l'inventeur dans Edward aux mains d'argent. Mais le cinéaste ne comptait pas s'arrêter là et avait attaqué un documentaire en noir et blanc autour de l'acteur, produit par ses soins et notamment composé d'interviews du principal intéressé mais également de personnes telles que Roger Corman. Mis à mal par le tournage de Batman, le défi et - surtout - la mort de Vincent Price, le 25 octobre 1993, le projet a été repris en main par le metteur en scène un an plus tard. Initialement destiné au marché vidéo, Conversations with Vincent sera finalement abandonné, inachevé.
La passion de Burton pour Vincent Price a aussi donné le court animé "Vincent" en 1982 :
Mai, the Psychic Girl
Officiellement, Sweeney Todd est la première (et à ce jour dernière) comédie musicale de Tim Burton. Mais ce statut aurait pu revenir à Mai, the Psychic Girl, adaptation du manga homonyme dont le réalisateur avait acquis les droits en août 1991, pour le développer en long métrage avec Carolco Pictures et l'aide du groupe Sparks. Les producteurs espéraient un début de tournage en 1992, mais L'Étrange Noël de M. Jack et Ed Wood en ont décidé autrement. À tel point que les droits ont fini par expirer et que le réalisateur s'est retiré. Le projet n'est pas mort pour autant, puisqu'il est régulièrement revenu sur le devant la scène, et notamment en 2009, lorsqu'a été diffusée la comédie musicale radiophonique The Seduction of Ingmar Bergman, en partie inspirée du combat de Sparks pour que leur adaptation de Mai voit le jour. Quelques mois plus tard, Tim Burton a redit être intéressé, mais rien n'a bougé depuis.
BONUS
Toots and the Upside Down
Ce n'est pas un film que Tim Burton aurait dû réaliser, car il ne devait être que producteur de ce long métrage en stop-motion, le troisième de sa société Skellington Productions, affiliée à Disney, après L'Étrange Noël de M. Jack et James et la pêche géante. Adapté du roman homonyme de Carol Hughes, le film devait nous entraîner sur les traces d'une jeune fille ayant perdu sa mère et qui, dès que son père ne fait pas attention à elle, se réfugie dans un monde fantastique où des goblins et fées tentent de combattre une version maléfique de Jack Frost.
Déjà aux commandes des deux précédents films, Henry Selick devait mettre celui-ci en scène, sur un scénario de... Steven Soderbergh. Le tout produit par Miramax, pour ce qui aurait été son premier long métrage animé. Un beau projet que Disney a hélas enterré, en même temps que Skellington Productions, suite aux mauvais résultats de James et la pêche géante au box-office, qui n'a rapporté que 29 petits millions de dollars sur le seul sol américain.
Avez-vous remarqué tous ces détails cachés de "... M. Jack" ?