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    Gwendoline Hamon : "Cassandre a le paradoxe des anti-héros, forte et fragile à la fois"

    Rencontre avec l'héroïne de la fiction policière de France 3, à l'occasion de la projection d'un unitaire inédit au Festival de Luchon.

    Après trois saisons de Cassandre, avez-vous toujours autant de plaisir à retrouver votre personnage ?

    Gwendoline Hamon, interprète de Cassandre : Toujours, car il y a plein de choses que nous n'avons pas encore dévoilé de cette femme. On ne connaît pas sa mère, on ne connaît pas ses meilleur(e)s ami(e)s, on ne sait pas trop qui elle est en amour, quels sont les drames de son passé, ses angoisses... Et puis je m'efforce à chaque fois, notamment pour les scènes d'interrogatoire, de ne pas jouer de la même façon selon la personne que j'ai en face de moi. On ne parle pas de la même façon à une jeune fille, à un vieux monsieur, à un addict ou un criminel. Pour ne pas m'ennuyer, et ne pas ennuyer les spectateurs ! 

    Vous faites un peu de la psychologie, en somme.

    Oui, un peu ! C'est une femme qui est dans l'empathie, qui a un côté "psy", et qui en même temps peut avoir un drame dans sa vie faisant qu'elle ne va pas réagir de la même façon... Et sans aller jusqu'à vous dire que je suis fatiguée, un tournage comme ça j'y suis tous les jours, de toutes les séquences, il faut être concentrée pendant huit heures d'affilée puis se remettre à travailler le soir pour apprendre son texte... C'est une vie un peu ascétique, mais très saine en même temps. C'est une organisation : tu sais que pendant un mois, tu ne vas faire que travailler. Mais je suis quelqu'un de très organisée, je vais peu au restaurant, je ne fais plus la fête comme lorsque j'étais jeune... Ce serait de la connerie de faire le contraire, au niveau de ma santé et de ma mémoire je flancherais ! 

    Quels aspects du personnage de Cassandre vous ont plu ? Vous identifiez-vous à elle ?

    Déjà, c'était très flatteur qu'on me propose un rôle-titre pour une série, j'étais ravie. La télévision a beaucoup évolué et elle évolue encore, et c'était un joli personnage - alors certes c'était encore une flic, mais pourquoi ce sont des flics ? Parce que le public demande ça et aime ça ! On peut innover, mais il n'y a rien qui marche mieux que les polars, dans tous les pays. Le personnage était dessiné, mais personne ne savait vraiment parmi les auteurs ou au sein de la chaîne ce qu'elle allait devenir, c'était aussi à moi de faire en sorte de me l'approprier, d'en faire une amie afin d'inventer, de faire des propositions... Avant tout, c'est une femme comme les autres. Elle est flic, donc elle a une posture particulière : elle doit être respectée, avoir de l'autorité... C'est une femme intelligente, mais c'est une femme avant tout, avec un enfant, des problèmes de coeur, des problèmes familiaux et amicaux, des angoisses... Elle a le paradoxe des anti-héros, forte et fragile à la fois.

    Elle doit aussi s'imposer dans un milieu machiste, en se retrouvant propulsée dans un environnement où elle n'est pas forcément la bienvenue.

    Elle se retrouve dans un milieu où on ne l'attend pas, et où on est pas tellement content de voir arriver une parisienne dont on pense qu'elle est prétentieuse. Mais elle en a vu d'autres et elle ne vient que pour son fils, en ayant déjà accepté l'idée du sacrifice puisqu'elle a donné sa démission du 36 Quai des Orfèvres. Elle se dit "c'est pas grave si on ne m'accepte pas, je ferai mon trou à un moment donné." Elle est là avant tout pour redevenir une mère, parce qu'elle a raté le coche avec son fils. Or il se trouve que son équipe va petit à petit l'apprécier et même l'admirer, et qu'elle va être heureuse.

    Pensez-vous que c'est cet aspect de son parcours qui séduit les téléspectateurs ?

    Je pense que c'est à la fois un mélange des paysages qui sont sublimes - on tourne les scènes d'extérieur à Annecy - et le fait de prendre par rapport aux commissariats parisiens noirs et glauques. On y découvre plein de sports propices à la région : le parapente, le scooter des neiges, bientôt l'aviron... Et puis c'est cette équipe ! Dominique Pinon, Emilie Gavois-Kahn, Jessy Ugolin, Béatrice Agenin... Tous ces personnages qui sont très différents, avec leur caractère, avec leur impulsivité, leurs qualités et leurs défauts ! Cassandre, c'est ce qu'on appelle du polar familial. Les intrigues sont bien ficelées, et sont accompagnées par des scènes de rapprochements entre les personnages - pas seulement entre Roche (Alexandre Varga) et moi, mais aussi entre Marchand et la major, les problèmes de santé de sa mère dans le premier épisode de cette saison... On aborde plus l'intimité des personnages, et je crois que ça plaît aux gens. Il y a toujours un impératif de divertissement bien sûr, mais je le fait que Cassandre soit dans l'empathie, qu'elle puisse tout aussi bien être de mauvaise foi par moments, qu'elle ait un faible pour Roche, tout ça plaît beaucoup.

    Pensez-vous que si le flirt entre Roche et Cassandre devait être amené à se concrétiser, vous risquiez de perdre l'intérêt du public car tout repose sur une tension permanente entre eux ? 

    Ah, ce n'est pas la première fois qu'on me pose cette question ! Je n'en ai pas peur du tout, au contraire. Si un jour une histoire d'amour se produit elle peut être très furtive ! Ca peut être un baiser, un ratage, ils peuvent êtres bourrés, ça peut être suivi d'une énorme dispute... Ca peut tout à fait relancer la machine,et ne pas forcément aboutir à un "ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants". D'autant plus que Cassandre commence à vieillir un peu, elle ne va bientôt plus pouvoir faire d'enfants ! (rires) 

    Quels sont les enjeux de cette nouvelle saison, selon vous ?

    Je crois que Cassandre est de plus en plus à l'aise dans son environnement. Elle est droite dans ses bottes, et sait qui elle est, où elle est et ce qu'elle doit faire. Je la trouve plus rassurée et rassurante qu'avant. C'est vraiment une femme comme les autres, avec une immense force et une grande sensibilité, qu'elle cache quelques fois mais qui est bien présente. C'est une femme qui fait front, et je crois que c'est dû à son caractère aussi, on ne connaît pas bien son passé mais on sait qu'elle n'a pas de père, et qu'elle est en grand conflit avec sa mère. Il a des choses à régler dont on parlera plus tard.

    Pensez-vous que son passé sera abordé dans de futurs épisodes ?

    Oui je pense, le simple fait que j'en parle pourrait même intéresser les auteurs, je l'ai déjà soulevé. Il y a toujours un enfant en chacun de nous, avec des troubles, des angoisses non résolues qu'on a du mal à laisser s'évaper. Et Cassandre a des choses à régler c'est sûr. Et comme la série n'est pas feuilletonnante, ce sujet sera peut-être abordé un jour !

    Avez-vous d'autres projets en marge de la série ?

    Je n'ai pas un temps fou, mais j'essaie de me débrouiller pour faire des films quand je ne tourne pas Cassandre. Là j'ai fait un Crimes Parfaits pour France 3, j'ai tourné quelques jours dans Nous finirons ensemble, la suite des Petits Mouchoirs de Guillaume Canet, j'ai écrit un spectacle... Il faudrait que je m'organise mieux, notamment avec France 3 Régions qui ne me facilite pas la tâche parce que les dates de tournage sont très arrêtées. Mais il y a un temps pour tout ! C'est déjà tellement joyeux de pouvoir jouer ce personnage... Mais j'ai besoin d'interpréter d'autres rôles, d'autant plus que je viens du théâtre; je voulais jouer tout le répertoire ! J'ai une formation classique, mais j'aime autant la comédie que le drame. J'aurai autant de plaisir à jouer Phèdre qu'à jouer mon-cul-sur-la-commode ! (rires) Et Cassandre me permet un peu de faire les deux. Je n'aime que ça, me balader dans des univers différents, que ce soit le théâtre, la télé, le cinéma... J'en ai besoin. Mais j'ai conscience de ma chance de pouvoir beaucoup travailler dans ce métier précaire, ça n'a pas toujours été le cas et ce ne sera peut-être plus le cas demain. Il y a une forme de cruauté dans ce métier car le facteur chance existe, il faut être là au bon endroit au bon moment. Je mesure mes rêves, mais je pense que nous allons de plus en plus - même si nous avons vingt ans de retard en France - vers un décloisonnement des barrières entre théâtre, cinéma et télévision. Même si pour l'instant, ce sont plutôt les acteurs de cinéma qui ont le droit de venir à la télé que l'inverse !

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